La gestion forestière peut-elle être raisonnée ? La preuve par l'exemple dans la forêt des Creux, à Neuvic
Joindre l’utile à l’agréable, voilà ce qui sous-tend le projet de sentier forestier pédagogique lancé par C.I.M.A. Bois dans la forêt des Creux, à Neuvic.« De manière générale, j'ai toujours été sensible à la communication autour de la forêt, commence Jérémie Auduc, technicien forestier. Et j’en ai un peu marre d’entendre toujours des discours négatifs sur la manière dont on gère la forêt. Entre écologie et capitalisme, il y a une voie médiane. C’est à nous, forestiers, de communiquer positivement et d’apprendre au grand public. »
Sa collaboratrice Pauline Gouguet, technicienne forestière comme lui, a envie de créer un sentier pédagogique. Entre eux, l’idée germe « de créer quelque chose à taille humaine pour expliquer ce que sont réellement la gestion et l’exploitation forestière », relate-t-il.
« Une abatteuse, un porteur, ce ne sont pas des gros mots, reprend Jérémie Auduc. Les coupes rases restent un outil de sylviculture parmi d’autres, mais qui peuvent être pratiquées différemment. Voilà ce qu’est notre boulot, c’est ce qu’il faudrait pouvoir expliquer. »
Reprendre la gestion de la forêt des CreuxUn millier d'arbres ont dû être coupés pour reprendre en main la gestion de la forêt des Creux. À Neuvic justement, la forêt communale des Creux est couverte, sur 18 ha, d’un mélange remarquable de résineux et de feuillus.
« Elle présente tous les types de peuplement qu’on trouve en Limousin », toutes les essences et tous les âges de développement, de 30 ans à plus de 50 ans. Sauf que « cette forêt n’est pas gérée depuis environ 25 ans », constate-t-il.
« Les gens verront une vraie forêt, exploitée et gérée intelligemment »
L’endroit est idéal pour créer le sentier forestier pédagogique de leurs rêves. « Ce n’est pas un arboretum, les gens ne vont pas y découvrir de nouvelles essences, mais ils verront une vraie forêt, exploitée et gérée intelligemment. C’est-à-dire en prenant en compte les trois objectifs essentiels à son bon développement, économique, écologique, mais aussi social. »
4 km de sentier à travers la forêtEntre les épicéas et les chênes, un sentier aménagé d’environ 4 km serpentera ; trois parcours, plus ou moins longs, seront accessibles à partir d’un parking, à l’orée du bois. Une quinzaine de panneaux expliqueront, là les espèces présentes, là les modes de gestion mis en œuvre. Éclaircies, futaies, taillis ? « L’idée, c’est que ce soit bien vulgarisé et compréhensible par tous. » Les panneaux évolueront au fil des années et des travaux à venir.
Ce sera un réel outil pour travailler avec nos clients propriétaires forestiers sur tous les éléments techniques de la gestion forestière.
Un cône de vision, équipé de quelques tables de pique-nique ouvrira sur une parcelle de bois adjacente. Des passerelles permettront de franchir les deux ruisseaux qui parcourent Les Creux.
« Les gens viendront en forêt, ils marcheront dans une forêt », prévient Pauline Gouguet. Aménagés, les espaces resteront naturels. Mais, remarque son collègue, « si c’est fait intelligemment et de manière cohérente, une ornière, ce n’est pas un gros mot. »Réunion de chantier en plein bois.
« Ce sera un réel outil pour travailler avec nos clients propriétaires forestiers sur tous les éléments techniques de la gestion forestière », apprécie Jérémie Auduc. Un outil également pour les écoles, les lycées… « La forêt est un patrimoine omniprésent autour d’eux, c’est mieux s’ils le comprennent ».
Un outil enfin pour le grand public et les touristes. À proximité du centre-ville, la forêt des Creux restera ouverte à tous ; un espace d’attractivité.
Dans les coulisses du chantier de restauration de l'église Saint-Barthélemy de Lamazière-Basse
Les travaux de bûcheronnage manuel, débardage et abattage mécanisé sont réalisés par l’École forestière de Meymac. L’aménagement du sentier et les deux passerelles en bois au-dessus des ruisseaux par des élèves de bac pro du lycée agricole Henri-Queuille de Neuvic. L’empierrement du parking revient à C.I.M.A. Bois et FSTP Services.
« On essaye de maintenir au mieux les épicéas et de conserver les mélanges d’essences en place », avance Jérémie Auduc. Les coupes sont raisonnées, pour harmoniser les peuplements en place et assurer la régénération du bois. « A priori, on n’aura plus besoin d’intervenir, en dehors du suivi des peuplements, d’ici 6 ou 7 ans », calcule le technicien.
Les recettes prévisionnelles de la vente des bois coupés seront réinvesties par la commune dans l’aménagement du sentier. Qui deviendra un espace idéal de formation et de médiation.
Blandine Hutin-Mercier