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Февраль
2024

“Cinéaste mais pas vampire” : Marie Rivière revient sur la relation d’Éric Rohmer avec ses actrices

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Benoît Jacquot, Jacques Doillon, Philippe Garrel, Alain Corneau… Depuis quelques mois, ces cinéastes français sont remis en cause par plusieurs témoignages d’actrices, qui dénoncent un système de domination. La figure fantasmée et romantisée de l’auteur, construite dès les années 1960, aurait permis et légitimé des rapports de pouvoir et de prédation entre le réalisateur et ses (jeunes) comédiennes.

Dans ce contexte, Marie Rivière, l’une des actrices fétiches de Rohmer (Le Rayon vert, La Femme de l’aviateur, etc.), a tenu à réagir via une courte vidéo postée sur YouTube à un article d’Anne Diatkine paru dans Libération le 8 février. Le texte analyse “l’appétence malsaine des cinéastes des années 1980 pour les jeunes filles” – parmi lesquels figurerait Éric Rohmer.

La journaliste cite longuement une interview de l’agente Isabelle de la Patellière accordée à la revue Cinématographe en 1986. Bien avant le mouvement MeToo, elle s’inquiétait d’une certaine tendance du cinéma français : “Tous les jours, je reçois des coups de téléphone de metteurs en scène qui systématiquement me demandent de leur présenter une très jeune fille, le plus souvent inconnue. Jusqu’ici, leur âge tournait autour de 17, 18 ans, mais depuis le succès de L’Effrontée, nous sommes descendus à 14, 15.”

L’agente mentionne alors Jacques Doillon (aujourd’hui accusé de viol sur mineur par Judith Godrèche), mais aussi Éric Rohmer, comme des exemples de réalisateurs qui “se nourrissent aujourd’hui de la substance de leurs actrices plus qu’ils n’inventent des personnages”. Elle les compare ensuite à “des sortes de vampires qui ont un souci quasi documentaire de [filmer les jeunes actrices], de saisir sur le vif des instants de vie”.

“Il ne faut pas mettre tous les cinéastes dans un même panier

Ces propos ont fait réagir Marie Rivière, qui a tenu à défendre le cinéaste avec lequel elle a joué à de nombreuses reprises : “Nan, mais attendez, il faut arrêter la fumette là. Il ne faut pas mettre tous les cinéastes dans un même panier. Je parle d’Éric Rohmer, et je le défendrai toujours, et toutes ses actrices le défendront toujours.” Elle s’oppose ainsi à la qualification de “vampire”, en soulignant qu’il “cherchait chez la jeune fille à montrer son âme et pas son cul”.

Elle revient sur l’une des interventions de Rohmer lors de la sortie de Conte d’automne. Critiqué par un journaliste d’avoir choisi Béatrice Romand et Marie Rivière, des actrices “ménopausées”, c’est-à-dire âgées de plus de 40 ans, le réalisateur aurait ainsi rétorqué : “Vous parlez comme ça de mes actrices parce qu’elles ont la quarantaine, mais vous comprenez que moi-même, je pourrai être leur père. Vous faites du jeunisme, moi en tant que réalisateur, vous ne me critiquez pas, alors que j’ai le double de leur âge. Et vous dites qu’elles sont trop âgées déjà car ce sont des actrices.” Marie Rivière félicite alors la modernité de cette prise de position, avant de conclure : “Pour moi, personnellement, c’est quelqu’un qui m’a sauvé, qui m’a donné tout ce que la vie avait de bon.