Argent : ces placements sécurisés bien rémunérés
Difficile de se lancer dans un investissement en actions aujourd’hui tant les perspectives de croissance sont incertaines. Certes, la Bourse de Paris a affiché d’excellents résultats en 2023, avec une hausse de 16,5 % du CAC 40. Mais précisément : une telle performance peut-elle se renouveler en 2024 ? De nombreux épargnants craignent au contraire un repli du marché et, dès lors, se demandent que faire.
Qu’ils se rassurent : il est possible de profiter de placements sécurisés bien rémunérés pendant quelques mois, en attendant le bon moment pour revenir en Bourse. Ces produits sans risque et liquides - il faut pouvoir en sortir rapidement pour investir lorsqu’une occasion se présente - rapportent autour de 3 % par an, un niveau inédit depuis dix ans. Les hausses successives des taux directeurs décidés par la Banque centrale européenne (BCE), intervenues entre juillet 2022 et septembre 2023, ont porté le taux de dépôt à 4 %, redonnant des couleurs aux placements de court terme. De ce fait, les planètes devraient rester alignées tant que les banquiers centraux ne décident pas de les baisser. "Cela ne devrait pas arriver avant la fin du premier semestre 2024", indique Philippe Crevel, directeur du Cercle de l’épargne. Les épargnants ont donc encore quelques mois devant eux pour profiter d’un rendement attractif sur leur épargne sans risque. Le fléchissement devrait ensuite être graduel.
La bonne stratégie consiste donc à privilégier le livret A et le livret de développement durable et solidaire (LDDS), dont le rendement est gelé à 3 % jusqu’au 31 janvier 2025. "Il faut les remplir en priorité à hauteur de leur plafond respectif, soit 22 950 euros pour le livret A et 12 000 euros pour le LDDS", conseille Maxime Chipoy, le président de MoneyVox. Ces produits sont en effet les plus rémunérateurs du marché pour placer son argent sur un an car ils sont exonérés d’impôts et de prélèvements sociaux. "La bonne nouvelle, c’est que leur rendement réel, c’est-à-dire après inflation, va redevenir positif dans le courant de l’année 2024", souligne Philippe Crevel. La Banque de France table en effet sur une hausse des prix de 2,5 % cette année, après 4,9 % en 2023. Les foyers modestes, eux, doivent plutôt s’orienter vers le livret d’épargne populaire (LEP), rapportant 5 % depuis le 1er février. Lui non plus n’est pas soumis à l’impôt ni aux prélèvements sociaux et il est désormais possible d’y verser jusqu’à 10 000 euros.
L’assurance-vie se redresse
Au-delà des plafonds de l’épargne réglementée, il faut chercher d’autres solutions, souvent moins rémunératrices. Certes, le rendement du fonds en euros de l’assurance-vie se redresse : il devrait s’établir autour de 2,5 % en 2023, avant prélèvements sociaux, et certains épargnants pourront obtenir beaucoup plus avec les bonus versés par les assureurs à leurs clients investissant en partie en unités de compte. Mais ce support ne peut se substituer au livret A puisqu’il ne bénéficie pas de la même liquidité. Mieux vaut s’intéresser aux livrets bancaires classiques (fiscalisés), pouvant souvent recueillir jusqu’à 10 millions d’euros.
Bonne nouvelle : les acteurs de l’épargne en ligne se livrent une guerre des taux depuis quelques mois, dont le grand gagnant est l’épargnant. "Les livrets des banques de réseaux sont en revanche très décevants, avec des taux souvent compris entre 0,10 % et 0,50 %" relève Maxime Chipoy. Ailleurs, il est possible de trouver des offres, réservées aux nouveaux clients, à 5 %, voire 5,50 % sur trois ou quatre mois. Une fois cette période passée, le taux standard s’applique, se montant à 3 % pour les meilleurs. Attention : ce taux augmenté ne s’applique que sur une somme limitée : 20 000 euros chez BforBank, 150 000 euros chez Cashbee ou encore 200 000 euros chez Placement-Direct.fr et Meilleurtaux Placement. "Notre livret est plus rémunérateur que le livret A sur une durée d’investissement courte", souligne Gilles Belloir, le directeur général de Placement-direct.fr. Sur trois mois, le rendement net de prélèvement forfaitaire unique ressort ainsi à 0,92 % (5,25 % pendant trois mois – 30 % de taxes) contre 0,75 % pour le livret A (3 % sur trois mois). Les particuliers ayant une somme importante à placer pour quelques mois, par exemple issue de la vente d’un bien immobilier ou d’une donation, ont intérêt à faire le tour du marché pour choisir la meilleure offre car ces dernières sont régulièrement renouvelées.
Si vous avez un horizon de placement précis, de douze ou dix-huit mois, par exemple, vous pouvez également vous pencher sur les comptes à terme, dont le taux est fixé une fois pour toutes lors de la souscription. Celui-ci est légèrement supérieur à celui des livrets afin de compenser le blocage des fonds. Car s’il reste possible de sortir par anticipation d’un compte à terme, l’opération se solde alors par une pénalité sur le rendement. "Mieux vaut répartir son épargne sur plusieurs comptes à terme arrivant à échéance progressivement, par exemple à douze, dix-huit et vingt-quatre mois, afin d’éviter d’avoir à sortir par anticipation", conseille Maxime Chipoy. Ainsi, Distingo Bank propose actuellement un rendement de 3,50 % sur son compte à terme un an, 3,20 % sur dix mois et 3 % pour son livret. "Nous ne proposons plus actuellement de comptes à terme supérieurs à un an car les taux d’intérêt de marché sont inférieurs sur les durées plus longues", précise Sarah Zamoun, responsable de l’activité Distingo. Les taux d’intérêt à deux ans sont en effet inférieurs à ceux à un an. Les banques de réseaux proposent aussi des taux attractifs à leurs clients, mais souvent pour des dépôts significatifs, supérieurs à 50 000 euros.
Quant aux fonds monétaires, ils font leur grand retour après sept années de performances négatives. Ils affichent une hausse moyenne de 3,37 % sur un an au 2 janvier 2024 d’après Morningstar, ce qui en fait une bonne solution de remplacement aux livrets réglementés, une fois leurs plafonds atteints. Logés dans un compte titres, leurs gains sont soumis au prélèvement forfaitaire unique de 30 %. Mais ces supports peuvent aussi être souscrits dans différentes enveloppes fiscales dont l’assurance-vie et ils subissent alors la fiscalité afférente.
Quoi qu’il en soit, veillez à choisir un produit dont les frais de gestion sont les plus limités possibles (ils s’élèvent en moyenne à 0,15 %) pour ne pas trop peser sur la performance. Sachez enfin que les perspectives restent favorables pour 2024. Les fonds monétaires sont en effet investis dans des titres émis par des entreprises et des banques, dont le rendement est indirectement lié au niveau des taux directeurs de la BCE.
Le PEL, une option à ne pas négliger
S’il est moins bien rémunéré que le livret A, il possède d’autres atouts.
Les plans d’épargne logement (PEL) ouverts depuis le 1er janvier 2024 rapportent 2,25 % brut, soit 1,57 % net après ponction du prélèvement forfaitaire unique de 30 %. Certes, ce taux reste bien inférieur aux 3 % net du livret A et du LDDS. Mais le PEL présente un avantage : son taux est fixé pour les quinze prochaines années, tandis que celui des autres placements réglementés varie au fil du temps. Dans deux ou trois ans, le rendement du livret A sera peut-être inférieur au niveau actuel du PEL.
La bonne stratégie consiste donc à ouvrir un plan pour prendre date, si l’on n’en détient pas encore, quitte à n’y placer que le strict minimum dans un premier temps. Combien ? Il faut verser 225 euros à l’ouverture, puis au moins 540 euros par an, soit un effort d’épargne de 45 euros par mois.
Attention, ce produit n’est pas liquide : tout retrait entraîne sa clôture, il ne faut donc y investir que des sommes dont on est certain de ne pas avoir besoin. Après une phase d’épargne d’au moins quatre ans, la dernière génération de PEL permettra d’emprunter pour financer sa résidence principale, au taux de 3,45 %. Difficile de savoir si ce taux sera attractif le jour venu, mais l’historique plaide plutôt en sa faveur.
Un article du dossier spécial de L’Express "Investir en 2024 : les bonnes stratégies face un environnement incertain", publié dans l’hebdo du 15 février.