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Февраль
2024

Quatre ans après l'entrée en vigueur du Brexit, les Britanniques vivant en Creuse en subissent encore les conséquences

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C’était le 31 janvier 2020. Le Royaume-Uni quittait officiellement l’Union européenne après le référendum de 2016. Quatre ans plus tard, les Britanniques vivant en Creuse ressentent plus que jamais la fracture entre leur terre natale et leur territoire d’adoption. Comme Helen Burgoyne. Cette artiste anglaise est installée à Dun-le-Palestel depuis 2007. « Au quotidien, rien n’a vraiment changé, mais certaines choses sont très stressantes et m’inquiètent beaucoup. »

Elle a désormais une carte de séjour, tout comme trois de ses enfants. Son petit dernier, 14 ans, est né à Guéret, et a obtenu la nationalité française l’année dernière. Mais pour le reste de la fratrie, la situation est beaucoup plus compliquée. « Avant le Brexit, je pense que c’était plus facile d’obtenir la nationalité française. Et la situation politique générale n’arrange rien. Mes trois grands enfants ont 25, 24 et 21 ans. Leur demande de nationalisation a été rejetée. Pour ma grande par exemple, il y a eu deux refus. J’ai dû faire une contestation. Là, ce n’est pas complètement fini : le maire va essayer de nous aider. Pour mon autre fils, on nous a dit qu’il ne gagnait pas suffisamment d’argent et qu’il n’était pas assez intégré dans la société. Mais c’est faux, mes enfants sont complètement français, ils ont grandi ici. » Autre inquiétude : la difficulté qu’ont ses enfants à trouver du travail. « Ma fille avait finalement réussi à en trouver en Suisse. Alors qu’elle était en route et qu’elle arrivait à Lyon pour prendre le train, une dame l’appelle en lui disant : “Oh, vous êtes anglaise, je pensais que vous étiez française. Ce ne sera pas possible, vous n’avez pas le droit de travailler”. Elle a dû faire demi-tour. Tout ça, ça rend mes enfants tristes. Pour eux, ils sont français, mais ils n’ont pas les mêmes droits que leurs amis. »

Helen, comme tous les autres Britanniques, rencontrent aussi un autre problème qu’ils n’avaient pas avant : les échanges de colis avec le Royaume-Uni sont beaucoup plus chers. « Maintenant, quand on reçoit des cadeaux de la famille en Angleterre, La Poste nous demande de payer des frais de douane… » Elle a aussi arrêté de vendre ses toiles au Royaume-Uni, les coûts d’envoi étant devenus trop élevés.

Le retour des douanes britanniques

La douane, c’est aussi ce qu’ont redouté Andy et Cris Bassam quand le Brexit est entré en vigueur. Ce couple d’Anglais tient l’épicerie britannique British Market Stall, à Guéret. Avant 2020, ils pouvaient se fournir directement au Royaume-Uni pour proposer à leurs clients creusois des produits typiquement britanniques. Mais ils ont dû changer leur façon de s’approvisionner, comme ils nous le racontaient il y a quelques mois, à l’ouverture de leur nouveau commerce à Guéret. Avec le retour des douanes britanniques, Andy et Cris se sont tournés vers l’Irlande pour importer le fromage et la viande. Des produits de « haute qualité » qui rencontrent un certain succès d’après Andy : « Ce sont des produits que les Britanniques ont l’habitude d’acheter dans les épiceries de leur pays natal ». Il a fallu trouver de nouveaux fournisseurs et s’adapter à l’allongement des temps de livraison (18 heures de ferry en moyenne depuis l’Irlande). Les produits secs sont toujours importés du Royaume-Uni mais les inspections sanitaires sont interminables, regrettait Andy. « Il faut le temps de s’adapter », reconnaissait-il tout en ayant déjà obtenu des rabais en associant ses commandes avec un magasin de Dordogne.

Plus de droit de vote

Mervyn et Rosie habitent non loin de Boussac. Très investis dans la vie locale depuis des années, ils regrettent aujourd’hui ne plus pouvoir voter aux municipales, alors qu’ils pouvaient le faire avant le Brexit. Ce Brexit qui a aussi d’autres conséquences sur leurs proches : leur petite-fille, qui voulait suivre le programme Erasmus pour étudier à l’étranger, n’en a plus le droit. Le couple cite aussi l’exemple de ces amis, qui ont une maison de vacances en France. Avant 2020, ils venaient en profiter tout l’été. Et depuis le Brexit, ils ne sont autorisés à y rester que 90 jours…

Sophie Emery