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Январь
2024

En Corrèze, la crise de la noix alimente aussi la colère des agriculteurs

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En Corrèze, la crise de la noix alimente aussi la colère des agriculteurs

Depuis deux ans, les producteurs corréziens de noix peinent à écouler leur production à un prix décent. Ils ont tenté de trouver des réponses à leurs questions lors d'un rassemblement devant une usine de transformation de fruits secs à coque, installée entre Brive et Tulle.

A côté des problèmes de l'élevage ou des retards des versements des aides de la politique agricole commune (PAC), c'est une des causes de la colère exprimée aujourd'hui par les agriculteurs de la Corrèze, qui tiennent toujours un barrage sur la chaussée de l'autoroute A20, au nord de Brive.

Depuis deux ans, les producteurs de noix font face à une crise sans précédent, qui a conduit à un effondrement des prix, au point qu'en 2023, certains n'ont tout simplement pas pu écouler toute leur récolte.

Noix gaillarde d'un côté du paquet, noix du Chili de l'autre

La concurrence étrangère est féroce et la demande intérieure en noix plutôt faible. Mais lors d'une visite inopinée dans un point de vente briviste, le week-end dernier, les agriculteurs sont tombés sur des paquets de cerneaux de noix, conditionnés par la Noix gaillarde, dans un atelier installé à la gare d'Aubazine, entre Tulle et Brive.

"Le marketing est bien fait, ironise un producteur. D'un côté, on lit Noix gaillarde et s'attend à ce que le produit soit local, et de l'autre, on lit que les cerneaux viennent du Chili !"

Alors, ce mardi 30 janvier 2024, une quarantaine d'agriculteurs s'est présentée devant les grilles de la société, pour tenter de comprendre les écarts de prix entre la production locale et celle qui vient de l'étranger (Chili, Californie...).

"Vous ne jouez pas la carte du local et ça pique", a d'emblée fait remarquer un agriculteur face à trois représentants de la Noix gaillarde, une commerciale et deux cadres.

"On a de la noix du Périgord, ont-ils objecté. On achète environ vingt tonnes de noix (sans coquille) en France. On transforme des fruits secs à coque, mais ce sont nos clients qui fixent les critères".

Un mystère de prix entre le producteur et le consommateur

Et là comme ailleurs, c'est le prix qui fait la différence. Des noix produites et acheminées sur des milliers de kilomètres reviendraient donc moins cher que celles qui ont poussé dans le sud de la Corrèze et vendues (les bonnes années) un à deux euros le kg par les producteurs ?Lors du rassemblement à Aubazine (photo Stéphanie Para)

En magasin, le cerneau de noix est parfois revendu jusqu'à presque 20 euros le kg. Pour le monde agricole, le delta reste un mystère. "Vous mettez la tête sous l'eau aux producteurs locaux !" ; "20 tonnes de noix française par an, c'est ridicule" ; "pourquoi ne pas baisser vos marges pour prendre de la noix corrézienne ?"

Contactée au téléphone, la direction de la Noix gaillarde a, sous la pression, accepté qu'une délégation d'agriculteurs, accompagnée par les forces de l'ordre, entre dans les locaux de la Noix gaillarde.

"Nous ne sommes pas là pour faire un audit, ou pour tout casser, a assuré cet agriculteur, mais pour tenter de comprendre comment ça marche", au risque de voir le patriotisme économique se fracasser sur la logique de la mondialisation.

Eric Porte