Vice-présidence de Trump : le bal des prétendants est ouvert
La campagne des primaires républicaine a pris, ces jours-ci, des allures de casting de cinéma. Lors de ses meetings électoraux dans l’Iowa et le New Hampshire, Donald Trump a rameuté à ses côtés une série de prétendants au poste de vice-président. Tous ont chanté ses louanges et rivalisé de flatterie dans l’espoir de remporter le premier rôle. Ces auditions publiques servent à mettre en concurrence les différents candidats, une méthode de management très prisée par l’ex-promoteur immobilier qui l’employait déjà dans son jeu télévisé The Apprentice. Elle permet également de tester leur qualité oratoire, leur popularité et… leur aptitude à lui passer la brosse à reluire.
Ces "entretiens d’embauche" en direct live entretiennent aussi le suspense et dopent l’audimat. En général, le vainqueur des primaires annonce le nom de son n° 2 à l’été, avant la convention du Parti. Mais Donald Trump, ex-pro de la télé réalité, distille déjà quelques indices. Lors d’un meeting, il a déclaré qu’il savait déjà "qui ça allait être". Dans une interview, il a ajouté en minaudant que c’était "quelqu’un de bien, assez standard", et que "les gens ne seraient pas tellement surpris".
La sélection d’un colistier est toujours stratégique. Il est choisi pour ses compétences ou pour sa capacité à attirer un segment de l’électorat. Joe Biden a par exemple fait appel à Kamala Harris, une femme noire, plus jeune que lui. En 2008, Barack Obama a nommé Joe Biden parce qu’il avait l’expérience en politique étrangère qui manquait au jeune sénateur. Quant à Donald Trump, il a choisi Mike Pence en 2016 pour s’assurer le soutien des évangéliques. Surtout, il voulait un coéquipier d’une loyauté totale, qui ne tente pas de lui faire de l’ombre.
L'hypothèse d'une femme
Cette année, dit-on, il envisagerait un n° 2 féminin dans le but de séduire les électrices blanches et urbaines. On parle beaucoup d’Elise Stefanik, représentante au Congrès de l’Etat de New York. Cette trumpiste ambitieuse s’est fait remarquer récemment par ses questions lors d’une audition au Congrès sur l’antisémitisme dans les campus qui ont conduit au limogeage de deux présidentes d’université.
C’est "une tueuse", s’est extasié Donald Trump. Parmi les autres prétendants figurent Kristi Noem, la sémillante gouverneure du Dakota du Sud et Kari Lake, ex-présentatrice de télé qui, toutes deux, défendent Trump avec ardeur. Son également évoqués les noms de Sarah Huckabee Sanders, son ancienne porte-parole devenue gouverneur de l’Arkansas ; Marjorie Taylor Greene, élue de Géorgie ; J.D. Vance, sénateur de l’Ohio ; et Tim Scott, sénateur noir très populaire de Caroline du Sud qui, après une candidature ratée aux primaires républicaines, fait maintenant la claque pour Donald Trump.
Nikki Haley, son adversaire aux primaires, ne semble en revanche pas figurer sur la liste. Elle "n’a pas l’étoffe présidentielle", tacle l’ancien président. Sa sélection serait vue comme une trahison par la base trumpiste adepte de "l’Amérique d’abord". L’ancienne ambassadrice à l'ONU milite en effet en faveur d’une politique étrangère interventionniste. "Nikki Haley veut s’engager dans tous les conflits que le monde a à offrir", a ironisé le fils de Trump, Donald Jr.
Un poste très difficile
L’ex-président pourrait toutefois changer d’avis si le scrutin s’annonce trop serré. Car Nikki Haley, femme d’origine indienne plutôt modérée, est susceptible de lui attirer l’électorat centriste, féminin et diplômé qui, pour l’heure, le boude. "Cependant, il est difficile d’imaginer que le choix d’un n° 2 modifie beaucoup la perception que les Américains ont de Trump, car tout le monde le connaît", estime Joel Goldstein, spécialiste des vice-présidents à l’Université de Saint-Louis.
Même s’il clame que sa décision est déjà prise, rien n’est joué. En 2016, il a hésité jusqu’au dernier moment avant de choisir Mike Pence. Le plus étonnant reste sans doute le nombre de candidats qui briguent cette fonction pourtant loin d’être une sinécure. "Cela requiert de répondre avec doigté aux constantes controverses et de maintenir une relation avec Trump, ce qui constitue en soi un défi politique et diplomatique complexe", note Rich Lowry, directeur du magazine conservateur National Review.
"L’expérience de Mike Pence incite à la prudence", reprend Joel Goldstein. Après avoir joué les lieutenants fidèles pendant quatre ans, il a été qualifié de traître par Donald Trump pour avoir refusé de bloquer la passation de pouvoir en 2020. Le 6 janvier 2021, il a été obligé de se cacher pour échapper à la foule qui prenait d’assaut le Capitole en scandant : "Pendons Pence." Sa carrière politique a été torpillée, au point qu’il a dû abandonner très tôt la course aux primaires. Pas très encourageant pour son successeur !