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Январь
2024

“Le bonheur est pour demain” : une belle histoire d’amour entre Laetitia Casta et Damien Bonnard

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La réalisatrice et actrice Brigitte Sy (que la série Opéra, où elle jouait un personnage antipathique, a rendue populaire) a dans les années 1990 mis sur pied des stages de théâtre à la prison de la Santé, à Paris, puis produit un spectacle en visioconférence, avec à la fois des détenus et des acteur·rices qui leur donnaient la réplique sur la scène du théâtre de Chaillot.

Sy avait raconté dans son premier long métrage Les Mains libres, en 2010, l’histoire d’amour qu’elle avait vécue alors avec l’un des stagiaires-prisonniers. L’Innocent, le film réalisé par son fils Louis Garrel en 2022, donnait le contrechamp filial, sur un versant comique, de cette histoire d’amour. Dans L’Astragale (2015), adaptation du roman d’Albertine Sarrazin (1964), la cinéaste avait aussi conté une histoire d’amour entre deux délinquant·es. Le Bonheur est pour demain (titre ironique) semble être la synthèse de ses deux premiers longs métrages.

Histoire presque vraie

Inspiré par des personnages réels, le film est à la fois une histoire d’amour et une histoire d’amitié. Une histoire d’amour impossible entre un braqueur, Claude (Damien Bonnard) et une jeune mère, Sophie (Laetitia Casta). Une histoire d’amitié vécue avec la mère de Claude, Lucie (Béatrice Dalle), une femme qui a roulé sa bosse, a élevé ses deux fils à la va-comme-je-te-pousse et est séropositive.

L’action du film se situe au milieu des années 1990. Sophie gère un magasin de location de cassettes VHS. Elle s’habille n’importe comment, porte des perruques de toutes les couleurs. Elle vit avec le père de son enfant, qui est trafiquant de drogue. Elle s’ennuie. Et puis un jour, elle fait la connaissance de Claude et ils tombent amoureux l’un de l’autre. Seulement voilà, Claude braque une banque et prend 25 ans.

Film d’acteurs et d’actrices

Au départ, on est un peu inquiet : Laetitia Casta dans le rôle d’une femme du peuple, maquée avec un malfrat, vraiment ? Et puis Casta s’impose peu à peu, comme tous·tes les autres acteur·rices (c’est l’un des plus beaux rôles au cinéma de Béatrice Dalle), car Le bonheur est pour demain est un film d’acteur·rices, que Brigitte a savamment dirigé·es et filmé·es.

La manière dont la cinéaste filme par exemple le grand Damien Bonnard, que nous croyions pourtant bien connaître, est proprement stupéfiante. Elle fait de Claude un bloc de dureté et de charme comme il n’en avait jamais joué un auparavant : drôle, intelligent, franc, sans illusion sur rien, fataliste, très conscient de ce qu’il fait et de la gravité de ses exactions, les accomplissant comme si c’était son destin.

Noir et intelligent

Sans se perdre en chemin, le récit pratique habilement quelques ellipses, notamment et notablement tous les procès. Sy décrit aussi la prison, les parloirs – des lieux qu’elle a fréquentés, où elle a travaillé et qu’elle connaît donc très bien – et le monde des malfrats d’une manière presque froide, sans apitoiement (Claude tue quand même un homme pendant un braquage), mais aussi sans jugement. Ni sur les crimes et délits, ni sur les policiers, ni les gardiens de prison, ni même la justice.

C’est aussi ce qui fait la réussite de Le bonheur est pour demain : son intelligence et donc sa noirceur, car le monde est noir, même si le film se termine joliment sur une plage avec des enfants. Un film devrait toujours se terminer sur une plage avec des enfants.

Le bonheur est pour demain de Brigitte Sy, avec Laetitia Casta, Damien Bonnard et Béatrice Dalle, en salle le 31 janvier.