Conférence de presse : Emmanuel Macron «en mode ORTF» ?
«Quand tu as besoin de trois heures pour expliquer que tu es un génie c’est qu’a priori ça ne saute pas aux yeux.» L’humoriste chroniqueur Gaspard Proust n’a pas épargné le président de la République sur Europe 1 ce 17 janvier, au lendemain de sa longue conférence de presse tenue à l’Élysée.
La longueur de l’intervention a en effet été largement critiquée, plus sérieusement aussi. Ainsi, le coordinateur national des Insoumis Manuel Bompard a dénoncé sur X (ex-Twitter) «un exercice digne de l'ORTF», une critique qui peut aussi bien faire référence aux formats longs qui avaient cours du temps de «l'Office de radiodiffusion-télévision française», dans les années 60 et 70, qu'à l’aspect monopolistique de cet établissement public sur la radio.
«On appelait ça la grand-messe sous de Gaulle»
La question du monopole était aussi à l’ordre du jour dans la bouche de l’éditorialiste de la télévision publique Patrick Cohen, qui s’est interrogé après la prise de parole présidentielle : «Est-ce qu'il fallait kidnapper l'ensemble du paysage audiovisuel pour cette soirée présidentielle en mode ORTF ?» Le chroniqueur de «C à Vous» a lui aussi taclé un exercice «trop, trop long» et un président «au sommet de la mise en scène monarchique, jupitérienne avec un chef suprême et omniscient qui aborde tous les sujets, qui connaît tous les détails».
Avant même l’intervention présidentielle, le journaliste Patrice Duhamel rappelait sur France Info : «On appelait ça la grand-messe sous de Gaulle.»
Les longueurs de la prise de parole présidentielle ont aussi été évoquées par le président du Rassemblement national, Jordan Bardella, qui dénonçait dès le 16 janvier au soir sur France 2 : «Emmanuel Macron commente, il enchaîne les numéros dans lesquels il se veut le beau parleur du déclin français.» Marine Le Pen, présidente du groupe Rassemblement national à l’Assemblée nationale a elle dénoncé sur X un «énième et interminable bavardage».
Le grand rendez-vous avec la Nation s’est transformé en un énième et interminable bavardage ; un entre-soi sans hauteur, sans vision et surtout sans solutions aux problèmes critiques des Français. Le fond comme le ton ne sont pas au niveau d’un président de la République.
— Marine Le Pen (@MLP_officiel) January 16, 2024
«Vieille France» et «réactionnaire» pour les écologistes
Sur le fond, le président Macron n’a pas non plus convaincu. À gauche, la secrétaire nationale des écologistes, Marine Tondelier, a dénoncé sur X «un discours de politique générale lunaire et paternaliste. Flippant, vraiment. Et ringard».
Son homologue présidente du groupe EELV à l’Assemblée Cyrielle Chatelain s’insurge de son côté contre le «plan contre l’infertilité» que préconise le président qu’elle juge «productiviste» et «réactionnaire». Et d’ajouter : «Le discours d’Emmanuel Macron a 70 ans de retard.» Une critique qui trouve un écho dans la Une du journal Libération : «Emmanuel Macron : vieille France.»
Le président des Républicains Éric Ciotti évoque pour sa part un président qui «promet monts et merveilles». Et de s’interroger : «Qui est président depuis 2017 ?» La tête de liste LR aux élections européennes, François-Xavier Bellamy, va également dans ce sens en affirmant au micro de BFMTV : «Ce qui compte […] ce n’est pas d’annoncer, c’est d’agir.»
François Ruffin, député LFI de la Somme, préfère interpeller le président en donnant une touche provinciale et sociale à sa critique : « À la place de faire son show à Paris, le président Macron devrait être au chevet de Valdunes, pillé par des fonds américains, puis allemands, puis chinois.»