EN DIRECT - La faute au tracteur, au jeune foin : la défense cherche à disculper le meurtrier présumé de Justine Vayrac jugé pour incendie volontaire
L'essentiel• Lucas L. répond ce mardi 16 janvier 2024 de faits d'incendies volontaires (*). • Les faits se sont produits lors de la nuit du 2 août 2020, dans la commune de Saint-Hilaire-Peyroux, près de Brive, en Corrèze.• Le jeune homme de 22 ans a été extrait de sa cellule de la maison d'arrêt de Périgueux, où il est détenu dans le cadre de sa mise en examen pour le meurtre de Justine Vayrac (*).• Devant le tribunal, Lucas L. répond avec beaucoup d'assurance aux questions qui lui sont posées.• La procureure a requis deux ans et demi d'emprisonnement, pour un jeune homme qui "ment allègrement, jusque devant le tribunal".(*) Pour ces deux faits, Lucas L. bénéficie de la présomption d'innocence.
15 h 15 | La foudre, le jeune foin, un tracteur... Tout sauf Lucas L.
Logiquement, puisqu’il avait annoncé qu’il plaiderait la relaxe, Maître Labrousse propose d’autres explications à l’incendie. Il évoque la foudre, pourtant écartée par les enquêteurs. Il évoque la présence, dans les bâtiments, de jeune foin susceptible de s’embraser, “un élément complètement passé sous silence par l’expert judiciaire”.
Maître Labrousse envisage même que l’incendie soit parti d’une fusée de feu d’artifice, en s’appuyant sur les bruits décrits par la voisine qui, réveillée en pleine nuit par le vacarme de l’incendie, a donné l’alerte.
“Je ne vais pas laisser accuser Lucas sur des sornettes de cette nature”, s’emporte Maître Labrousse, qui critique abondamment le travail de l’expert judiciaire. Cet incendie, “il est accidentel, affirme l’avocat. C’est manifestement ce tracteur qui a foutu le feu.” Autre hypothèse envisagée par la défense, ce serait l’onduleur des panneaux photovoltaïques qui serait à l’origine de l’incendie.
14 heures | L'audience reprend avec la plaidoirie de la défense
Maître Labrousse, qui assure la défense de Lucas L. cite des témoignages qui font état d’un comportement du garçon qui donnerait toute satisfaction. Au procès de Lucas L. devant le tribunal correctionnel, mardi 16 janvier 2024, l'avocat de la défense, Maître Labrousse. Photo Stéphanie Para
Il s’agace ensuite contre une enquête “menée tambour battant”, alors que “les incendies criminels ne sont presque jamais élucidés”. L’avocat de la défense dénonce le fait que “les enquêteurs excluent toutes les autres hypothèses de travail, à cause des silos, résume-t-il. Celui qui a mis le feu a signé son crime ! “ , moque-t-il.
Il s'indigne ensuite, revenant sur le fait qu'après la "violation de son contrôle judiciaire (il est allé voir sa petite amie), on le met en prison. Voilà ce qu'on a fait à un gamin de 18 ans et des brouettes ! "
13 heures | L'audience est suspendue
La procureure rappelle que, lorsque Lucas L. “demande une main levée du contrôle judiciaire”, il a “l’outrecuidance à venir présenter des obligations qui n’existent pas et un projet professionnel qui n’existe pas non plus”. Elle décrit un jeune homme qui “évolue dans ses déclarations en mentant allègrement jusque devant le tribunal”.
La procureure requiert de deux ans et demi de prison, avec mandat de dépôt. Elle demande aussi une obligation de travailler, une obligation de soins, une interdiction d’entrer en contact avec les victimes, mais aussi de porter ou de détenir une arme pendant cinq ans.
Les débats reprendront à 14 h 15.
12 h 45 | Dans le box, un Lucas L. attentif au visage impassible
Lucas L. écoute posément la procureure de la République. Il est désormais assis, la tête légèrement penchée en arrière, les bras croisés. Il regarde régulièrement vers la présidente du tribunal, mais ne porte pas les yeux vers la salle. Il garde un visage impassible.Lors de l'arrivée de Lucas L. au tribunal de Tulle, ce mardi 16 janvier 2024. Photo
12 h 30 | le tribunal écoute les réquisitions de la procureure
La procureure de la République s’attache à démontrer la culpabilité de Lucas L. Elle s’appuie notamment sur les données de la téléphonie.
Sur la question de savoir si le jeune homme se trouvait à proximité de l’exploitation au moment où l’incendie a été déclenché, “oui, il y est, il est exactement au bon endroit dans le bon créneau horaire”, affirme-t-elle.
12 heures | “Qui se cache derrière ce visage d’ange ?”
Maître Christine Marche, l’avocate des parties civiles, annonce qu’elle aimerait que cette audience permette de répondre à la question suivante : “Qui êtes-vous, Lucas L. ? Qui se cache derrière ce visage d’ange ?”
Elle revient sur l'incendie, le "désastre" découvert par les propriétaires de l'exploitation, le 2 août 2020. Sur la manière dont les soupçons se sont orientés vers le jeune homme.
“Le fameux silo. La fameuse basket. La fameuse photo. C’est compliqué de ne pas reconnaître, estime l’avocate, alors qu’on lui met toutes les preuves sous les yeux. Eh bien non, pour Lucas L., ça ne peut pas être lui.”
L’avocate se résume : “aujourd’hui, vous êtes là avec quelqu’un qui présente un très beau visage, mais derrière, il se cache quelqu’un d’autre.” Maître Marche évoque l’ampleur de la destruction dans la ferme et ses conséquences. Une évocation visiblement très douloureuse pour le fils de la famille, qui venait de reprendre l’exploitation. Et qui suit avec beaucoup d’intérêt les débats.
Pour les parties civiles, l’avocate réclame 20.000 euros pour indemniser le fil, autant pour le père, 11.000 euros environ de surcoûts qui n’ont pas été pris en charge par l’assurance et 5.000 euros de frais d’avocat.
Puis Maître Marche conclut : "Vous le voyez, devant l’évidence, aujourd’hui encore à midi et quart, on continue à nier.”
Photo Stéphanie Para
11 h 30 | l’examen de la personnalité démarre
Le rappel des faits avait déjà permis de glaner quelques éléments sur le comportement de Lucas L., notamment avec les déclarations de sa mère, de son père et de ses amis, lors de l’enquête. On avait entendu que, selon sa mère, Lucas était un garçon “rancunier”.
Les deux experts sollicités dessinent le portrait d’un jeune homme qui a, à propos de l’incendie, “adopté un positionnement inébranlable”. Les experts ne décèlent pas de trouble monomaniaque, à l’époque (dans les mois suivants les faits) mais notent une “intolérance à la frustration”, une possible “blessure narcissique”. L’intéressé “ne se livrant guère et offrant un profil lisse” lors d’une des expertises.
L’un des experts préconise des soins pour “contenir une impulsivité inquiétante et qui interroge.” Me Labrousse, pour la défense, insiste pour souligner que cette remarque se rapporte à une mesure envisagée en cas de condamnation.
11 heures | Lucas L. répond posément aux questions du tribunal
“Je suis comme sur la dernière audition”, répond Lucas L. à la présidente qui l’interroge sur les versions différentes qu’il avait données en garde à vue. Il revient notamment sur son trajet de retour de la fête de Vigeois, cette nuit-là, qui n’est pas le plus direct. Il l’explique ainsi :
“Arrivé à Leroy Merlin, avec l’application Waze, j’ai vu qu’il y avait un contrôle de gendarmes. J’étais jeune permis, je ne pouvais pas me permettre de me faire arrêter.”
Le jeune homme répond avec assurance, d’une voix très calme, très posée. Ses déclarations se font d’une voix détendue. Il semble très sûr de lui dès qu’il rend la parole. “Je ne sais pas”, répond-il souvent. Au sujet des modalités d’ouverture du silo d’aliment qu’il est suspecté d’avoir ouvert pour en rendre le contenu immangeable pour les animaux, il répond : “tout le monde est capable de l’ouvrir, même un enfant de 5 ans.”
S’ensuit un échange tendu avec la procureure, à propos des différentes déclarations de Lucas L. “Vous êtes en train de mentir monsieur”, lui lance-t-elle. “Non”, répond-il. “Ne pas s’en rappeler, ce n’est pas la même chose que d’inventer quelque chose à l’audience, souligne la procureure. C‘est curieux, vous ne vous rappelez pas la tenue que vous portiez, mais vous êtes en capacité nous dire que vous êtes descendu à tel endroit pour uriner...” Photo Stéphanie Para
10 h 30 | Lors de l'enquête, les soupçons des enquêteurs se sont rapidement orientés vers Lucas L.
La présidente revient sur l’enquête menée par les gendarmes sur les lieux, alors que l’incendie faisait encore rage. Forts de leurs observations, les militaires privilégient la thèse de l’acte malveillant. Les soupçons s’orientent rapidement vers Lucas L., “un petit jeune en contrat de qualif”, dans l’exploitation depuis un an. Le jeudi précédent les faits, le jeune homme avait subi “une remontée de bretelles”, notamment au sujet des horaires d’embauche et de la qualité de son travail, relate la présidente.
Toujours debout et immobile dans son box, Lucas L. suit avec attention l’exposé des faits. Il hoche parfois la tête.
10 h 15| Le prévenu, Lucas L., entre dans le box
Dans la salle d'audience, peu avant 10 heures, se sont installés des membres de la famille de Lucas L. qui patientaient dans la salle des pas perdus. Leurs visages sont fermés.
Veste à carreaux, tenue soignée, visage juvénile, Lucas L. entre dans le box vitré de la salle d'audience.
La présidente du tribunal exige "un silence complet, total, pour que la justice se rende sereinement". Puis elle rappelle les faits.
9 h 30 | Les victimes appréhendent de "revoir Lucas"
Dans la salle d'audience du tribunal de Tulle, l'exploitant agricole dont les bâtiments sont partis en fumée en 2020, son épouse et leur fils sont là. Ils confient à La Montagne qu'ils appréhendent de revoir Lucas, qu'ils n'ont plus vu depuis les faits, "à part avec l'affaire Justine, à la télé". Ils sont venus avec un épais dossier.
Après une première affaire jugée, l'audience a été suspendue jusqu'à l'arrivée de Lucas L. qui doit être extrait de sa cellule de la maison d'arrêt de Périgueux, en Dordogne, à 120 kilomètres de là environ.
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(*) Pour ces deux faits, Lucas L. bénéficie de la présomption d'innocence.
Pomme Labrousse