L'Otrson ? Quel est cet orchestre d'un nouveau genre, qui met en musique les sons du quotidien en Creuse ?
Ce samedi après-midi dans la salle d’Epicentre, à Jarnages, on cuisine, on bricole, on soude, on perce, on scie, on tricote, on coud et on colle. Mais surtout, on sonne. Pas tout à fait juste, pas tout à fait faux, mais peu importe, ici tout fait musique, surtout la « broc ». « J’aime bien ce mot », sourit la violoncelliste Martine Altenburger, de l’association Ryoanji. Il semble que son tintement musical promet tous les possibles.Martine Altenburger sous l'oeil avisé de Man'hu de la Compagnie des objets perdus @ Julie Ho Hoa
La co-directrice artistique d’Epicentre est tout occupée à greffer des anneaux, grelots improvisés, sur une boîte de sardines en vue de mettre un peu d’ambiance au Carnaval de Jarnages le 10 février prochain. Sous le regard expert des artistes, musiciens et constructeurs d’objets sonores, Jéranium et Man’hu de la Compagnie des objets perdus, basée à Naillat. Car cette boîte de sardines, pour Jéranium, ce n’est pas qu’un simple emballage métallique bon pour la poubelle.
@ Julie Ho Hoa
« Tout fait son dans notre quotidien. Je dis souvent que quand je fais la vaisselle, c’est un petit concert »
Bien plus agréable d’ailleurs la vaisselle de cette façon ! « Je vous conseille de faire ça parce que ça change vraiment la façon dont on regarde les objets qui nous entourent », ajoute ce musicien des plus créatifs.L’Otrson a pioché dans les stocks d'objets de la recyclerie des Ateliers de la mine à Lavaveix-les-Mines pour trouver de quoi fabriquer ses instruments @ Julie Ho Hoa
Il va d’une table à l’autre pour apprendre à coudre ensemble deux boîtes de conserve, trancher entre le son des pois chiches ou des haricots, essayer de faire tinter deux couvercles. Car de ces cartons de « broc » qui ont investi Epicentre surgit peu à peu tout un orchestre : celui de L’Otrson, « L’Orchestre de ressourcerie sonore ».
Jéranium de la Compagnie des objets perdus donne ses astuces @ Julie Ho Hoa
« L’idée, c’est qu’on prenne vraiment tout ce qui est abandonné, qui ne sert plus pour faire de la musique », explique Martine Altenburger qui mène, depuis le mois d’octobre, ce projet avec une vingtaine de musiciens bidouilleurs de Jarnages, âgés de 8 à 75 ans. Direction la recyclerie des Ateliers de la mine, à Lavaveix-les-Mines pour faire ses emplettes et mettre en musique tout un capharnaüm d’objets.
« Je suis instrumentiste et dans la musique, j’ai toujours adoré tout ce qu’on nous interdit de faire sonner, tous ces sons qui n’ont pas le droit d’exister parce qu’on considère qu’ils ne sont pas propres, qu’ils font mal aux oreilles, alors que non, pas plus qu’une belle note jouée sur une corde de violoncelle ! »
@ Julie Ho HoaQue l'on soit petit ou grand, musicien confirmé ou grand amateur, L'Otrson accueille bien volontiers tout esprit curieux ! @ Julie Ho HoaPlace à la musique !Le registre de L’Otrson, c’est « le plaisir de faire du bruit » ! Pour Jeranium, être curieux et observateur, c’est déjà, quelque part, être musicien.
« Il faut apprendre à écouter notre environnement sonore plutôt qu’en être gêné, apprivoiser un peu tout ça, faire de la musique du quotidien, quelque chose de ludique et d’intéressant avec des textures, des timbres particuliers. »
@ Julie Ho HoaAprès ce quatrième atelier de fabrication d’instruments de musique, l’orchestre a pour la première fois répété « pour faire sonner tout ça ensemble, marier les différents sons et les différents objets », explique Jéranium. @ Julie Ho Hoa @ Julie Ho Hoa
« Là, il y a l’exigence d’être à l’écoute les uns des autres, de respecter des consignes, de le faire avec beaucoup d’attention, on se retrouve finalement comme un musicien qui pratique depuis des années et des années un instrument », souligne Martine Altenburger. Mais toujours avec un délicieux plaisir enfantin.@ Julie Ho Hoa
Un grand concert est également programmé le 22 juin aux Ateliers de la mine, à Lavaveix. L’Otrson est également promis à de belles rencontres, notamment avec les compositeurs et musiciens de passage à la salle Epicentre. En juin, ils improviseront ainsi avec l’ensemble Hiatus. « De fil en aiguille, c’est un orchestre qui va trouver son identité, ses différents projets et concerts », se réjouit Martine Altenburger. Sa singularité, il l’a déjà trouvée.
En Creuse, une fabrique festive d’instruments de musique uniques à base d'objets recyclés
Texte & photos : Julie Ho Hoajulie.hohoa@centrefrance.com