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Декабрь
2025

A l’aube de 2026, la crise existentielle de la droite et du centre

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Sa création s’est évanouie. A son arrivée à Matignon en septembre 2024, Michel Barnier a conceptualisé le "socle commun", coalition de la droite et du centre censée appuyer son action. Qui ose encore prononcer ce mot, vestige d’une époque révolue ? Cette alliance de circonstances a disparu. A l’aube de 2027, les partis de cet arc avancent en ordre dispersé. Affaiblis, aussi, tant les secousses politiques actuelles affectent en priorité ces mouvements. Gabriel Attal a de la mémoire. L’ancien Premier ministre sait combien son attitude offensive sous Michel Barnier lui a coûté dans l’opinion publique à l’automne 2024. Le secrétaire général de Renaissance fait assaut de prudence dans l’interminable examen budgétaire. A l’image de son homologue LR Laurent Wauquiez, plus conciliant que jamais avec Sébastien Lecornu.

Ce camp occupe un rôle ingrat dans les débats. La droite et le centre ? De simples artisans du compromis, condamnés à avaler des couleuvres au nom de la sacro-sainte "stabilité". Quitte à mettre en sourdine leur identité politique en acceptant la suspension de la réforme des retraites, présentée comme vitale lors de son adoption. "On ne peut pas être à l’origine du désordre. Nous sommes intrinsèquement liés à la dissolution, donc c’est : 'prière de ne pas en rajouter'", admet une ministre. Laquelle note que l’appel au compromis des Français pourra demain se transformer en procès en incohérence. En parallèle, leurs adversaires avancent leurs pions. Le Rassemblement national et La France insoumise, intransigeants envers l’exécutif, confortent leur statut d’opposant au pouvoir sortant. Le PS tente d’arracher des victoires pour donner du sens à sa rupture avec LFI.

Mais l’ode au compromis ne fait pas une offre politique. Gabriel Attal a dévoilé cet automne son projet de nouveau système des retraites, quand Edouard Philippe vante son "deal fiscal inédit" avec les entreprises, première pierre de son programme économique. "C’est bien qu’il se passe des choses dans l’espace central, salue un ministre macroniste. Si on attend comme les lapins dans les phares, on se fera rouler dessus par le camion de l’extrême droite." Mais ces propositions peinent à percer le mur du son, vite englouties par les débats parlementaires. "Ce n’est pas notre moment, note un membre de l’exécutif. Les gens n’entendent pas nos propositions."

Effritement partout, dynamique nulle part

Le bloc central et la droite n’ont aucun gain politique à attendre de la séquence. Alors, que faire ? Eviter de commettre des erreurs, déjà. Gabriel Attal compare en privé cette période à la série télévisée Squid Game, dans laquelle des Sud-Coréens surendettés doivent survivre à une série de jeux mortels pour emporter une petite fortune. Tout est mouvant, gare à la chute. Bruno Retailleau a perdu des plumes en quittant de manière fracassante le gouvernement après la nomination de Bruno Le Maire. Edouard Philippe a surpris avec son appel à une élection présidentielle anticipée pour dénouer la crise. Tous ces prétendants à la magistrature suprême sont à la peine dans les sondages, distancés par Jordan Bardella et sous la menace de Jean-Luc Mélenchon. Peu audibles, et sans gain à espérer.

Effritement partout, dynamique nulle part. Les appels à une primaire naissent de ce spleen généralisé. Ils sont le symptôme d’un affaiblissement, qu'une candidature commune à l’élection présidentielle est appelée à compenser. En 2012 et 2017, la primaire devait donner un élan populaire au candidat LR ou PS. Elle a cette fois pour simple ambition d’éviter une élimination au premier tour de l’élection présidentielle. Elle est d’une nature plus arithmétique que politique. Et tant pis pour les profonds désaccords idéologiques entre les représentants de l’ex "socle commun". "Bardella va être candidat à l’été et on va avoir une guerre de petits chevaux d’ici décembre 2026 ?", se lamente une ministre.

Le RN, lui, avance en bloc. La droite et le centre peinent à endiguer la montée en puissance de la formation d’extrême droite, insensible aux affres judiciaires de Marine Le Pen. L’attaquer sur les "valeurs" ? Cibler son programme économique ou l’incompétence supposée de Jordan Bardella ? Ces partis n’ont pas réussi à trouver l’angle d’attaque idéal contre cette formation. Mais la politique est d’abord une affaire d’offre. Pour défier ce parti, l’ancien "socle commun" devra imposer une proposition politique dans les mois à venir. "Ce qui se joue est l’installation de thèmes, analyse un ministre. Le RN est redoutable pour cela. Or dans une présidentielle, installer le thème c’est faire 75 % du chemin." Le RN mène une bataille culturelle. Sitôt la séquence budgétaire terminée, le bloc central devra lancer la sienne.