En plein procès pour corruption, ce nouveau scandale qui fragilise Benyamin Netanyahou
En pleine reprise de son procès pour corruption, fraude et abus de confiance commencé en 2020, le Premier ministre israélien, Benyamin Netanyahou, est éclaboussé par un autre scandale impliquant l’un de ses ex-conseillers, accusé de fuite présumée de documents couverts par le secret. Eli Feldstein a été inculpé soupçonné d’avoir divulgué un document classifié concernant les négociations en vue de la libération des otages enlevés lors de l’attaque du Hamas le 7 octobre 2023 en Israël et retenus à Gaza, afin d’infléchir en faveur du Premier ministre une couverture médiatique critique à son égard.
Selon les détracteurs de Benyamin Netanyahou, cette affaire met en lumière une corruption profondément enracinée au sein de son cabinet, ainsi que les relations troubles entre des militaires de haut rang et des hommes politiques de la coalition gouvernementale de droite.
Arrêté fin octobre et placé en détention provisoire avant d’être assigné à résidence la semaine dernière, Eli Feldstein aurait reçu des informations classifiées d’un sous-officier de réserve, dont l’identité n’a pas été révélée.
Lors d’une conférence de presse lundi soir, à la veille de la reprise de son procès pour corruption dont il conteste avec véhémence les accusations, Benyamin Netanyahou a été interrogé sur cette affaire. Il a déclaré que les accusations visant son ex-conseiller s’inscrivaient dans le cadre d’une attaque plus large contre lui et ses partisans. Quelques semaines plus tôt, il avait qualifié l’arrestation et l’inculpation de ce dernier de chasse aux sorcières et d’abus du système judiciaire.
Atteinte à la sécurité de l’Etat
Eli Feldstein et le sous-officier ont été inculpés en novembre pour atteinte à la sécurité de l’Etat. Le document que le premier est accusé d’avoir divulgué au quotidien populaire allemand Bild tendait à montrer que le chef du Hamas d’alors, Yahya Sinouar, était le principal obstacle à un accord pour la libération des otages, et que les manifestations en Israël pour leur retour étaient contre-productives.
L’armée a depuis rejeté les informations contenues dans le document, lesquelles allaient dans le sens de la ligne défendue par Benyamin Netanyahou, opposé à un accord de cessez-le-feu avec le mouvement islamiste palestinien contre lequel Israël est en guerre dans la bande de Gaza depuis le 7 octobre 2023.
L’affaire est particulièrement grave, les charges retenues contre Eli Feldstein et le sous-officier leur faisant encourir une peine allant jusqu’à la réclusion criminelle à perpétuité.
Un document divulgué volontairement pour des motifs politiques
Le procureur général d’Israël a estimé que l’ex-conseiller de Benyamin Netanyahou avait divulgué le document pour des motifs politiques en septembre, soit deux mois après l’avoir reçu, lorsque la pression de l’opinion publique contre le Premier ministre était extrêmement forte. L’armée venait alors d’annoncer la découverte dans la bande de Gaza des corps de six otages, tués à bout portant par leurs ravisseurs quelques jours seulement auparavant, provoquant un choc en Israël.
Selon Barak Medina, professeur de droit à l’Université hébraïque de Jérusalem, "l’avocat d’Eli Feldstein a fait valoir que Benyamin Netanyahou avait approuvé la remise de ce document à Bild", en vue de faire échouer les négociations sur la libération des otages.
Les critiques de Benyamin Netanyahou l’accusent de vouloir poursuivre la guerre à Gaza au détriment des otages, afin de se maintenir au pouvoir pour échapper à ses affaires de corruption et à une commission d’enquête sur le fiasco sécuritaire et militaire du 7 octobre.
Déjà trois affaires de corruption
Son procès pour corruption, qui a repris mardi, s’est ouvert en 2020 mais avait été interrompu par la guerre à Gaza. Le Premier ministre est poursuivi pour corruption, fraude et abus de confiance. Dans la première affaire, lui et son épouse, Sara, sont accusés d’avoir accepté pour plus de 260 000 dollars de produits de luxe (cigares, bijoux, champagne) de la part de milliardaires, notamment du producteur hollywoodien d’origine israélienne Arnon Milchan et l’homme d’affaires australien James Packer, en échange de faveurs politiques. Dans la deuxième, Benyamin Netanyahou est poursuivi pour avoir tenté de négocier une couverture plus favorable de la part d’Arnon Mozes, éditeur du quotidien Yedioth Aharonoth, premier quotidien national payant, en échange de la promesse d’une loi qui aurait entravé la circulation du journal gratuit Israel Hayom, un titre populaire en Israël.
Dans le dernier dossier, le dirigeant israélien est accusé d’avoir tenté de faciliter une fusion souhaitée par un ami proche, Shaul Elovitch, alors actionnaire majoritaire de Bezeq, le plus grand groupe de télécommunications du pays, en échange d’une couverture favorable de sa politique sur le site web d’information populaire Walla, également propriété de Shaul Elovitch.