Eurydice 2016
Nous avons bien conscience de vous faire un joli cadeau avec l’évocation de ce livre d’Olivier Liron : nous assumons. C’est bientôt Noël
Élégiaque – Entre L’Écume des jours de Boris Vian (il en a l’humour parfois absurde – doux aussi) et Orphée et Eurydice, le ballet de Pina Bausch, Olivier Liron livre un premier roman grave et d’une térébrante poésie.
« On dit parfois que l’amour n’existe pas en soi ; il n’y a pas d’amour, il n’y a que des preuves d’amour. Mais si on réfléchit un peu, c’est une énorme bêtise de penser ça, non ? Au contraire, il n’y a jamais de preuves. L’amour est impossible à prouver. Il n’y a pas de preuves d’amour. Il n’y a que l’amour. »
« La vie est une chose magnifique, mais il ne faut jamais la croire quand elle veut vous faire désespérer. On peut dire la même chose de la littérature »
On devrait établir une « Bibliothèque des premiers romans ». Ce serait passionnant – et éloquent aussi. Il y a souvent ce qui s’ensuivra, « en précipité », dans un premier roman. Pas toujours, mais c’est possible.
Danse d’atomes d’or d’Olivier Liron aurait sa place dans cette bibliothèque. Son roman, qui se souvient de la fantaisie d’un Toulet, vient de loin, porté par l’élan que procure la nécessité – une sommation… ou un poème.
Il commence comme un coup de foudre : une rencontre, entre O. et Loren. Il s’achève comme la vie : la mort. Entre-temps, Loren disparaît.
Et O, désespéré par une disparition subite, inopinée, inexpliquée, la cherche, et l’évoque : « Tu me le disais toujours en riant : notre époque n’est pas une grande époque pour les sentiments. J’aimerais inventer une histoire avec des sentiments ingénus et ailés pour te faire revenir d’entre les ombres. »
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« Je déteste les jeux de sociétés. / Tu n’aimes pas les jeux ? / Si, j’aime les jeux. C’est la société que je n’aime pas. »
Dans un autoportrait (fin du livre), Liron, 29 ans en 2016, évoque l’autobiographie : « Ce livre est une déclaration d’amour à la poésie qui nous permet de toujours survivre à tout, ou presque. C’est un roman sur les grands mystères de la vie : l’amour, le Coca-Cola et le périphérique de Caen. Bien sûr, c’est aussi un roman sur le tourbillon qu’est une passion amoureuse. C’est une histoire romantique parce que tout y est sincère, et romanesque, parce que tout y est vrai. Je mentirais si je disais que ce roman n’est pas autobiographique. Un jour, j’ai rencontré une femme dont je suis tombé passionnément amoureux. Je n’ai pas compris ce qui s’est passé ensuite. Voici l’histoire de cet amour ».
Pour avoir reconduit cette idée-clé (selon nous) de la porosité du romanesque et de la vie, Olivier Liron a grandement mérité de la République des Lettres. Gageons que celle-ci saura l’accueillir.
« La solitude n’est pas très intéressante à raconter, il me semble. J’abrège. Je ne m’attarde pas. Je veux croire simplement que le monde m’était étrange. J’étais étranger au monde. Est-ce que le mot étranger pourrait être un verbe, à l’instar d’étrangler ? Je m’étranges, tu m’étranges. Elle étrange. L’amour étrange. »
Olivier Liron Danse d’atomes d’or – Alma éditeur 2016, puis Folio novembre 2024, 232 pages.
Et toujours : Bréviaire capricieux de littérature contemporaine pour lecteurs déconcertés, désorientés, désemparés, de François Kasbi, Éditions de Paris-Max Chaleil, 2018 – à propos de 600 écrivains, femmes et hommes, de France ou d’ailleurs.
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