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Maladie inconnue en République démocratique du Congo : "Ce qu’il faut absolument savoir, c’est si…"

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C’est une séquence que l’on voudrait réservée au passé. Depuis quelques semaines, une mystérieuse maladie ne cesse de se répandre en République démocratique du Congo (RDC). Des cas qui flambent, un grand nombre de décès, et aucune information sur le mal en question… Difficile de ne pas tracer un parallèle avec l’émergence du Covid-19. "Les deux situations n’ont pourtant, pour le moment du moins, pas grand-chose en commun", rassure Brigitte Autran, présidente du Comité de veille et d’anticipation des risques sanitaires (Covars).

L’instance n’a pas de prérogatives internationales. Mais elle suit tout de même de près la situation en RDC, afin de prévenir toute menace pour la santé des Français. L’heure n’est pas à une nouvelle pandémie, rassure la spécialiste, professeur émérite d’immunologie à la Sorbonne, mais il va tout de même falloir surveiller se passe en Afrique centrale, dit-elle. C’est de là que provient la dernière pandémie après le Sars-CoV-2, le Mpox, dont les conséquences, bien que peu discutées en Occident, sont importantes.

L’Express : Les institutions congolaises fournissent chacune un décompte différent du nombre de morts. Si bien qu’une demi-douzaine de bilans circulent en même temps dans la presse. On parle de 27, 79, et même de 131 victimes. A quelle estimation faut-il se fier ?

Brigitte Autran : Le décompte varie fortement en fonction des sources. J’ai dans les mains des documents de l’Institut national de santé publique de RDC. Ils font état de 27 victimes et date de ce jour. Ne nous y trompons pas : ce chiffre est certainement sous-estimé. Mais il s’agit à mon sens du bilan le plus fiable dont nous disposons. Le nombre réel de décès nous est en réalité inconnu. Recueillir des informations dans ce pays est extrêmement difficile, en raison de la faiblesse de ses infrastructures sanitaires. Panzi, d’où provient la majorité des cas, est un village très difficilement accessible, situé à 700 kilomètres de la capitale Kinshasa.

Comment peut-on interpréter ce chiffre ?

Le nombre de victime est élevé. Il y avait au 3 décembre, toujours d’après l’Institut national de santé publique, 382 cas détectés. Cela porterait potentiellement le taux de mortalité à 7 %. C’est important, anormal. Mais il ne faut pas tirer de conclusions hâtives. Rappelons que l’épidémie intervient dans l’une des régions les plus pauvres du pays, lui-même peu organisé. Il y a un taux de dénutrition très élevé, donc beaucoup de gens meurent à la moindre infection. A ceci s’ajoute un grand manque de dépistage. Le taux réel de mortalité reste incertain.

Que sait-on des symptômes et de la nature de cet agent pathogène ?

Selon les autorités sanitaires, l’agent pathogène affecterait essentiellement les voies respiratoires, bien qu’on recense aussi des maux de tête et des douleurs musculaires. On peut donc penser à une pathologie pulmonaire. Mais on ne sait quasiment rien. Il est possible qu’il s’agisse d’un virus ou d’une bactérie déjà connue, aucune piste n’est exclue.

Nous n’avons aucune donnée fiable sur le mode de transmission ou la contagiosité. Des prélèvements ont été envoyés dans des laboratoires nationaux pour faire un premier séquençage. L’Organisation mondiale de la santé [OMS] a déployé une équipe d’épidémiologistes, de cliniciens, de techniciens de laboratoire et d’experts de la lutte anti-infectieuse pour aider les autorités sanitaires. D’ici à dimanche, nous devrions en savoir plus.

Que va-t-il falloir surveiller dans les prochaines semaines ?

Il faut absolument savoir si la cause est bactérienne ou virale. Cela change tout. Si c’est bactérien, peut-être que nous avons déjà des antibiotiques efficaces. Si c’est viral, la situation pourrait être bien plus compliquée, car il y a très peu de médicaments antiviraux efficaces. Le risque, alors, serait qu’il soit beaucoup plus difficile de lutter contre cet agent pathogène. Africa CDC, l’OMS et de nombreuses ONG sont présentes sur place, l’attention est élevée. Nous devrions bientôt en savoir plus sur la réponse à apporter.

Est-ce qu’il peut s’agir du Covid-19, ou du Mpox ?

Des dépistages rapides ont été faits, semble-t-il, et excluraient a priori le Covid, même si à ce stade, il n’est pas possible d’avoir des certitudes. Le Mpox, ou orthopoxvirose simienne de son nom scientifique, a émergé au Congo dans les années 1970, et un variant a récemment muté là-bas, mais il est peu probable que ce soit cela. Cette maladie est très identifiable car elle provoque des vésicules et des pustules. Il peut y avoir des formes pulmonaires du Mpox mais si c’était le cas, les médecins sur place auraient rapporté des atteintes sur la bouche et le corps des malades. Mais on ne peut rien exclure.

Hongkong vient de renforcer ses mesures de contrôle sanitaire aux frontières pour les vols en provenance d’Afrique. Faut-il faire pareil ?

Pour l’instant, il n’y a pas de raison particulière d’appliquer des mesures de contrôle sanitaire aux frontières. Ce n’est pas une décision internationale, mais le fait de Hongkong uniquement. Depuis l’épidémie de Sars en 2003, le pays est souvent le premier à procéder à de telles réponses. Mais il est important que les médecins français qui seraient susceptibles de recevoir des patients venant de la zone soient au courant de la situation. Cela fait partie de la surveillance mise en place en France.