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Ноябрь
2024

"On perd 200 fermes chaque semaine" : la Haute-Loire va accueillir un forum sur la délicate question de la transmission agricole

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La sociologue Brigitte Chizelle se consacre depuis plus de 20 ans à l’étude de différentes problématiques liées au monde agricole. À la tête, avec son associé Dominique Lataste, de l’organisme de formation Autrement-dit, elle est spécialisée sur les questions de ruralité et d’agriculture, en particulier sur celle de la transmission agricole. Annoncée au forum d’Azerat, jeudi, elle livre son analyse sur ce sujet et ses enjeux.

 

 Quel regard portez-vous sur l’installation transmission dans le monde agricole ?Ce sujet est souvent interprété à travers le prisme économique.Le facteur humain est relégué au second plan. Il y a environ 200 fermes qui cessent leur activité chaque semaine en France. Pourquoi il y a si peu de transmission d’exploitations ? On s’est rendu compte qu’il y avait une disparité entre ce que souhaitent les cédants et l’attente des repreneurs.

 

 Quel type de décalage y a-t-il entre les cédants et les potentiels acquéreurs ?On a étudié beaucoup de cas de transmission d’exploitations et on s’est aperçu que dans la majorité des cas, c’est le cédant qui a les clés de l’opération. Il y a beaucoup de candidats à l’installation. Les cédants doivent être accompagnés, c’est primordial.

 

 Concrètement, quels sont les points qui posent problème lorsque l’on souhaite céder son exploitation ?La question de l’habitation est rarement anticipée. C’est un peu un sujet tabou. Par exemple, si le cédant vit en couple, il y a souvent un des deux conjoints qui est plus attaché à la maison que l’autre et qui souhaite la conserver. Si le repreneur veut absolument habiter sur l’exploitation, ça va créer des problèmes. L’identité de vie du cédant peut aussi avoir un impact. A-t-il développé d’autres activités en parallèle pour continuer à exister ? Sa vie se résume-t-elle à son activité professionnelle ? Tout ça peut être un frein au moment de céder son exploitation.

 Pour le cédant, il peut y avoir un fort attachement à ce qu’il considère être l’œuvre d’une vie.C’est le cas dans des exploitations qui fonctionnent bien. Pour le cédant, c’est difficile d’envisager qu’un repreneur fasse différemment de lui alors qu’il a lui-même trouvé un équilibre entre rentabilité et confort de travail.

 

Quels sont les freins du côté du repreneur ?On est dans une société qui est de plus en plus nomade. Les nouvelles générations changent davantage de métier, de lieu de vie, de situation personnelle. La question de l’engagement sur la durée est un frein. Est-ce que dans 10 ans on aura toujours envie d’être agriculteur ? Le niveau de revenus pose aussi un problème, même si certains jeunes qui se lancent s’en sortent très bien.

 

On parle aussi d’une crise de vocation. Qu’en est-il ?Les enfants d’agriculteurs n’ont pas forcément envie de devenir agriculteurs. Et ceux qui ne sont pas issus du monde agricole se sentent parfois illégitimes ou mal considérés par les gens de la profession.

 

Quelles pistes faudrait-il explorer pour favoriser la transmission ?Il faut qu’il y ait une volonté politique sur ce sujet. En premier lieu, au niveau des communes et des communautés de communes. Elles ont une proximité avec les gens du territoire. Elles peuvent les sensibiliser, faire des réserves de foncier sur un secteur donné.

 

Quel est l’enjeu de réussir ce processus de transmission ?Il est important de maintenir un nombre suffisant de fermes en France. Des fermes à taille familiale. C’est aussi une question de souveraineté alimentaire. Si on a une alimentation de qualité par rapport à d’autres pays occidentaux, c’est grâce à nos producteurs. Est-ce que la transmission est souhaitée en haut de l’échelle politique ? On est en droit de se le demander. 

Le monde agricole et le grand public ont rendez-vous à la salle municipale d’Azerat, jeudi, pour débattre autour du phénomène de cession/acquisition d’exploitations. Différentes thématiques seront abordées pour défricher le sujet : les difficultés, les freins mais aussi les outils pour favoriser l’installation d’une nouvelle génération d’agriculteurs. 

Pâtures, troupeaux, bâtiments

Un rendez-vous qui ne se cantonne pas aux seuls acteurs du monde agricole. Tous ceux qui s’intéressent à la vie de leur territoire, leur environnement et à une alimentation de qualité sont conviés. Les conférences, ateliers, débats, courts-métrages et témoignages traiteront, entre autres, de l’ensauvagement des pâtures qui se transforment en roncier, de la disparition des troupeaux, des bâtiments vides qui finissent par s’abîmer… Auzon communauté, dASA et Haute-Loire bio ont aussi convié d’autres associations comme Terre de liens ou Îlots paysans, soutiens au niveau national du monde agricole local. 

 

Jérémy Virot

Le programmeTous les évènements ont lieu dans la salle municipale d’Azerat, sont gratuits, sans inscriptions et ouverts à tous les agriculteurs, porteurs de projet, étudiants, élus, propriétaires fonciers, partenaires…L’après-midi. 13 h 30. Accueil et mot des élus. 14 heures. Introduction à la transmission agricole. Par Brigitte Chizelle, sociologue d’intervention dans le domaine agricole et rural, spécialiste de la transmission.14 h 45. Ateliers au choix. " Restructurer pour mieux transmettre, oui mais comment ? " ou " Se tester pour mieux s’installer/transmettre ", avec îlots paysans, l’AFOCG et la Chambre d’agriculture.16 H 15. Réunion plénière et discussions avec tous les intervenants. 17 heures. Temps d’échange et de rencontres autour d’un verre.En soirée20 heures. Ciné-débat avec les courts-métrages Devenir paysanne, s’installer en agriculture et Reprises de fermes. Avec le témoignage de Pauline Mercuri, paysanne boulangère à Saint-Privat-du-Dragon, animé par la FRICVAM Auvergne et le réseau des Amap Aura. Évènement gratuit, sans inscription et ouvert à tous.Renseignements auprès de Cloé Montcher - Haute-Loire Bio au 04.71.02.07.18 ou cloe.hauteloirebio@aurabio.org et de Christine Paques - dASA au 06.33.66.64.80 ou par mail à l’adresse dasa.christine@gmail.com.