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Sept choses à savoir sur Élodie Bouteloup, la nouvelle présidente du tribunal de Guéret

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Élodie Bouteloup a pris ses fonctions de présidente du tribunal début septembre. Rencontre avec celle qui succède ainsi à Michaël Humbert.

1. Dès le primaire, elle voulait être juge des enfants

« Très jeune, depuis le primaire, j’ai décidé que je serai un jour juge des enfants. Donc, j’ai fait des études de droit, j’ai passé le concours de la magistrature mais, pendant cette formation, j’ai eu une révélation pour le Parquet. J’ai commencé par être parquetière pendant six ans. Après, je suis effectivement devenue juge des enfants, je suis retournée au Parquet puis au siège, notamment à Limoges sur les dernières années où j’ai exercé plein de fonctions différentes : tutelle, juge des affaires familiales, juge des enfants à nouveau, juge correctionnel, pôle social. »

"Et j’avais envie encore de renouveau, de nouveaux challenges et j’ai donc postulé pour être présidente du tribunal de Guéret."

D’un point de vue plus personnel, cette mère de trois enfants a grandi en région parisienne, entre Val-d’Oise et Oise. Ses familles sont originaires de la Mayenne et de la Bourgogne.

2. On lui a vanté les mérites de la Creuse et elle n'est « pas déçue »

« J’étais à Limoges, où je vis toujours. Et j’ai regardé les postes disponibles à proximité, dont celui de Guéret. Je m’étais renseignée sur la Creuse, notamment auprès de l’ancien président qui m’avait vanté les mérites de ce département et je n’ai pas été déçue. »

3. Elle veut favoriser les alternatives à l'incarcération

Lors de l’audience solennelle de rentrée, la présidente avait indiqué vouloir favoriser les alternatives à l’incarcération.

"J’ai été particulièrement sensible à l’engagement des acteurs ici."

« J’en ai parlé avec les magistrats, avec la maire de Guéret également, on a un département qui fonctionne très bien de ce point de vue là puisqu’on a énormément de mairies engagées dans l'habilitation pour les Tig (Travaux d’intérêt général) notamment, une vraie sensibilité à la question qui favorise l’encadrement des personnes qui vont accueillir les tigistes. Ce qui permet aussi d’avoir des candidatures. Et ça n’existe pas partout : je peux vous dire qu’à Limoges par exemple, c’était loin d’être le cas. »

4. Son rôle de présidente aux multiples facettes dans une petite juridiction

« Il y a deux rôles bien différents. On est déjà le premier juge du tribunal. Surtout sur des petites juridictions, on a une part juridictionnelle très importante dans un contexte, en plus, de vacance de postes. Je me suis positionnée sur plein d’activités différentes. Donc, il y a vraiment les fonctions de présidente sur les référés mais après, j’ai décidé d’aider au niveau des affaires familiales. De la correctionnelle aussi, on n’a pas de juge de la liberté et de la détention en titre : c’est moi, avec des collègues qui tournent en suppléance. Et après, il y a tout le côté administration, gestion avec la procureure. »

Les qualités humaines essentielles à ses yeux pour ce rôle ?

« Pour un président comme pour les magistrats, deux me viennent immédiatement : l’écoute et le respect. »

5. Une présidente « attentive au moral des troupes »

« J’ai surtout essayé d’être attentive, là, au moral des troupes – surtout dans ce contexte de sous-effectifs qui m’inquiètent beaucoup – de voir ce qui pourrait être amélioré. Parfois, on accepte des conditions de travail qui sont quand même assez difficiles. Ce qui m’a interpellé, c’est l’organisation de certaines audiences pénales, notamment sur les correctionnelles qui commencent l’après-midi. Guéret est encore une des rares juridictions où les audiences commencent l’après-midi, auxquelles s’ajoutent les comparutions immédiates… »

"Finir à 23 heures, minuit, il me semble que ce n’est pas satisfaisant. On va en discuter collectivement. J’ai d’ailleurs commencé à en parler avec la procureure de la République, avec le bâtonnier aussi, pour débuter ces audiences le matin. Il me semble qu’on ne rend pas forcément bien la justice quand on la rend à minuit."

« C’est pareil pour les CRPC (Comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité) : ce n’est pas un contentieux d’urgence et là, c’est vraiment engagé, on va passer à des audiences le matin. »

Creuse : un tribunal de grande instance "sinistré et en état d'urgence absolue" (janvier 2017)

6. Elle envisage la tenue de procès fictifs

Concernant le travail de communication et d'ouverture entrepris ici, « oui, on va toujours faire des actions en ce sens au sein du tribunal. Fin novembre, on en a une sur la justice des mineurs. Une communication que l’on fait aussi via le CDAD (Conseil départemental d’accès au droit) : il a été fermé pendant un certain temps, monsieur Humbert l’a remis sur pied, mais je me suis rendu compte qu’il n’était pas encore tout à fait visible. Cela m’a décidé à me rendre dans les Maisons France Services. La semaine dernière, je suis allée à Bonnat et ça m’a confortée dans le fait qu’il n’y avait pas forcément les bons réflexes : sur dix personnes à qui on avait donné les coordonnées du CDAD, il y avait eu seulement deux saisines. On va donc faire l’inverse : on prendra les coordonnées des gens que le CDAD contactera. Je pense qu’ainsi, on arrivera à toucher un peu plus de monde. Le fait d’aller sur le terrain permet aussi de débloquer ce genre de situation ».

"Après, j’aimerais vraiment développer le partenariat avec l’Éducation nationale et notamment les collèges. Il y a des choses qui sont faites mais il y a un seul collège qui participe. Ça ne me paraît pas suffisant. Plus on touchera le public jeune, tôt, mieux il connaîtra le fonctionnement de la justice."

« Et pas uniquement en assistant aux audiences : j’aimerais qu’il y ait un point debrief après entre les élèves et les magistrats. Pourquoi pas, aussi, faire des procès fictifs ? »

7. Ces défis qui l'attendent

D’abord les travaux. « Le problème de l’immobilier est conséquent ici. On manque déjà de locaux et on nous a annoncé l’arrivée de deux magistrats pour lesquels on n’aura pas de place ! Et puis, il y a ce site des Tanneries (juste derrière le tribunal, qui accueille notamment le conseil des prud’hommes, N.D.L.R.) qui n’est pas idéal en termes de sécurité et de conditions de travail. L’objectif serait de regrouper tout le monde. Il y avait eu un projet d’extension du tribunal sur la place Bonnyaud mais les Bâtiments de France avaient refusé. Aujourd’hui, il y a un projet de rachat d’un bâtiment dans la continuité du tribunal. C’est en discussion mais on a des craintes, vu le budget annoncé, que l’immobilier passe au second plan. » 

Enfin, la nouvelle présidente espère bien maintenir ces délais raisonnables du traitement des affaires.

"On est autour de quatre mois en matière civile ou en matière pénale, donc, oui, ce sont des délais assez raisonnables. Mais c’est au prix d’un travail très important et d’une fatigue réelle des magistrats et des greffiers. Donc il faut faire attention." 

Propos recueillis par Séverine Perrier