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Октябрь
2024

Le Limousin particulièrement touché par la pauvreté des plus de 60 ans, selon le dernier rapport national des Petits frères des Pauvres

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Certains retraités sont bien loin de se demander à quelle période ils vont pouvoir retourner à leur résidence secondaire ou quelle destination choisir pour leurs prochaines vacances.

Deux millions de personnes âgées vivent sous le seuil de pauvreté en France, selon le dernier rapport annuel de l’association des Petits frères des Pauvres (*). Ces derniers perçoivent 1.216 euros par mois au mieux, 1.012 euros de minimum vieillesse voire moins pour ceux qui ont la double peine de devoir cumuler précarité et solitude.

450 euros de facture pour des appels surtaxés

L’association dresse le constat que la pauvreté isole et nourrit un sentiment de honte. Les personnes âgées concernées déclarent avoir des difficultés à payer les factures du quotidien et plus de la moitié des plus de 60 ans (55 %) en situation de pauvreté estiment que leurs conditions de vie se sont dégradées depuis cinq ans.

Domicilié dans le centre-ville de Limoges, Joël, 69 ans, ne pouvait plus supporter son état. Fragilisé par la maladie, les visites des Petits frères des Pauvres depuis le mois d’août lui apportent comme un peu de soleil dans l’eau froide. 

À chaque coup de sonnette, le septuagénaire rassemble ses forces pour se lever de son lit et traverser le couloir qui mène à la cuisine. Son pied le fait souffrir et la respiration est pénible, mais la bouffée d’oxygène est telle que le visage se métamorphose. Le regard s’éclaire, le sourire se dessine, les douleurs sont moins vives le temps des échanges.

Ce jour-là, Anne et Joëlle, coresponsables des Petits frères des Pauvres à Limoges, viennent prendre de ses nouvelles. Elles l’écoutent sans économiser les sourires et petites attentions. 

Une dizaine de signalements par an

Il était temps d’agir. Sans nouvelles de sa famille et contraint dans ses déplacements depuis quatre ans, l’isolement social nuisible à l’équilibre mental finissait d’étouffer cet homme visiblement diminué.

Mais Joël est longtemps resté sourd aux propositions formulées à plusieurs reprises par les infirmiers, l’auxiliaire de vie et l’assistante sociale pour le sortir de son isolement. C’est finalement à l’abri des regards qu’il confiera sa détresse, au soir de Noël 2023. « Je m’ennuyais beaucoup. C’était devenu trop difficile. Alors j’ai pris le téléphone, j’avais vraiment besoin de parler », raconte-t-il en serrant son verre de limonade.

Seul dans sa démarche, il s’adresse aux mauvaises personnes. Les numéros composés sont surtaxés et Joël enchaîne les appels pendant plusieurs jours.

La facture téléphonique grimpe jusqu’à 450 euros, aggravant encore davantage la situation financière plus que précaire du septuagénaire qui perçoit le minimum vieillesse pour seul revenu. Anne-Laure Mourier, son assistante sociale, finira par le convaincre d’être accompagné par les Petits frères des Pauvres. 

En Limousin, chaque antenne de l’association, basée à Limoges, Brive et Guéret - respectivement créées en 1990, 2011 et 2016 - reçoit une dizaine de signalements par an sur des personnes considérées en « mort sociale », aussi bien en zone rurale, en ville que dans les quartiers populaires sur un territoire particulièrement touché (ci-dessous). Les personnes sont signalées par les Centre communaux d’action sociale (CCAS) avec lesquels l’association est en partenariat, les professionnels de santé, les travailleurs sociaux, l’entourage, des associations. 

Visites à domicile et en Ehpad

À Limoges, les « équipes d’action territoriale » de l’association travaillent avec la Maison des séniors créée en 2018 pour mettre en place des rencontres afin de rompre l’isolement.

À Brive, l’association participe aux actions « une visite, un sourire » impulsées par le CCAS. Ce dispositif rassemble des associations de terrain qui décident ensemble vers quel organisme orienter les personnes isolées repérées sur le territoire. 

Les visites des Petits frères des Pauvres se font à domicile mais aussi en Ehpad. À Brive, l’association est en partenariat avec l’établissement Bel Air pour le suivi de neuf résidents. Quarante à soixante personnes sont chaque année accompagnées par autant de bénévoles dans les trois antennes du Limousin. 

(*) Rapport national annuel des Petits frères des Pauvres : Vivre sous le seuil de pauvreté quand on a plus de 60 ans, octobre 2024.

Aline Combrouze