En Creuse, ces femmes combattent le cancer du sein à coups de sabre
« C’est parti. Une attaque, une parade, une riposte. » Casque d’escrime sur la tête et plastron blanc, quatre femmes, âgées de 50 à 68 ans, suivent très méticuleusement les consignes du maître d’armes Denis Lecavelier des Etangs-Levallois. Au-delà de leur tenue, ces élèves partagent une histoire commune : celle de s’être battues contre le cancer du sein.
L'escrime riposte : une thérapie par le sportTous les vendredis soir depuis trois ans, ces Creusoises ont la possibilité de suivre des cours d’ escrime riposte au gymnase Fayolle, à Guéret. Une véritable thérapie par le sport (nommée Solution RIPOSTE) créée en 2014 par l’escrimeuse et médecin toulousaine, Dominique Hornus-Dragne, et introduite dans la préfecture par le gynécologue et chirurgien Michel Kapella.
Les cours d'escrime riposte sont dispensés à Guéret depuis trois ans.
« L’opération du cancer du sein peut être très lourde, détaille le docteur, présent à chaque séance pour suivre les progrès de ses patientes. La mastectomie par exemple, qui consiste à retirer partiellement ou totalement le sein atteint, peut entraîner des complications comme la fibrose ou la sclérose. Là-dessus, vous rajoutez la radiothérapie qui brûle les tissus. Cela entraîne des adhérences et donc une raideur de l’épaule. La pratique de l’escrime va permettre d’assouplir l’articulation. » Comment ? En provoquant une réaction réflexe chez la patiente.
« Quand quelqu’un vous attaque avec un sabre, vous allez inconsciemment vouloir sauver votre vie. Vous allez donc monter votre bras plus vite et plus haut pour vous protéger. »
Selon les séances, les néo-escrimeuse peuvent aussi manier le sabre laser façon guerre des étoiles. « Avec cette technique, on travaille encore plus la mémoire des patientes parce qu'elles doivent retenir une chorégraphie très précise », détaille le maître d'arme, Denis Lecavalier des Etangs-Levallois. Et Michel Kapella de compléter : « L’hormonothérapie et la chimiothérapie créent des trous dans le cerveau qui se matérialisent par des fuites d’idées et des défauts de concentration. En s'appliquant sur la coordination de leurs mouvements, les patientes vont recréer des connexions synaptiques et réveiller les zones éteintes du cerveau. »
Un jeu d’enfant ! Sauf pour Jaqueline qui peine à retenir l’enchaînement énoncé par le maître d’armes. « Pied droit devant, on allonge le bras pour attaquer… » Sous hormonothérapie depuis décembre, la retraitée reconnaît qu’elle a « quelques problèmes de coordination » mais qu’importe, l’escrime l’aide « à supporter les traitements et à garder la forme ! »
Valérie, 58 ans, a subit une tumorectomie au niveau du sein gauche. L'escrime riposte lui donne la motivation de se battre.
Garder la forme, oui, mais aussi le goût de se battre contre une maladie qui abîme tant le corps que l'esprit.
« Certaines participantes, quand elles m'attaquent, elles expriment bien plus que "je fais de l’escrime". Elles se battent contre le cancer en même temps qu’elles se battent face à moi. »
Aux côtés du professeur, Valérie, 58 ans, acquièce. « Quand je suis face au maître d’armes, je me dis que je veux le toucher, je veux y arriver et je veux faire mieux. » Bien plus qu'un sport, l'escrime riposte est une revanche sur la maladie pour cette mère de famille. C'est aussi l'occasion de rencontrer des femmes qui partagent sa douleur. « On a toutes eu un parcours différent face au cancer mais les voir en forme et progresser, c'est super agréable. » Le visage apaisé, Valérie rigole : « la prochaine étape, ce sont les Jeux Olympiques ! »
Informations pratiques. Les séances d'escrime riposte ont lieu tous les vendredis, de 19 h 30 à 20 h 30, au gymnase Fayolle à Guéret. Contact : Denis Lecavalier au 06.23.09.25.24 ou Rose en Marche au 05.87.56.18.29 ; www.solutionriposte.fr
Texte et photos : Camille Moreau