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Philippe Geluck, père de l'incontournable Chat, sort un livre d'anecdotes : "La liberté, dans la création, c'est magique"

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Hospitalisé pendant quelques jours la semaine dernière après un petit pépin de santé, c’est un Philippe Geluck en pleine forme que nous avons joint au téléphone pour évoquer avec lui la sortie de « Tout est vrai ». Un ouvrage dans laquelle il retrace à travers 150 anecdotes sa vie publique, mais aussi plus privée. Sans oublier son incontournable Chat, jamais très loin.Vous avez fêté vos 70 ans. Pourquoi avez-vous ressenti le besoin de rédiger ces mémoires, comme vous les intitulez dans la préface ? 

Même si je l’ai effectivement écrit, ce ne sont évidemment pas des mémoires, ce que je trouverais autocentré et prétentieux. Le Général de Gaulle les a écrites mais mon influence sur la marche du monde a été moindre que la sienne... Quoi que, on verra, dans le futur (sourire). Plus sérieusement, ce livre répond à l’envie de raconter des moments de ma vie, parfois attendrissants, en mêlant le ridicule à des choses plus étonnantes, des rencontres.

Je ne connais pas beaucoup de gens qui se sont promenés entièrement nus dans une supérette de l’Atlantique et qui ont fait des émissions télé avec Delon, Belmondo ou Belluci !

On y trouve en effet une foule d’anecdotes étonnantes. Tellement parfois que vous le rappelez dès le titre : Tout est vrai ! Sinon, cela n’aurait aucun intérêt... 

C’est certain ! Tout est garanti véridique. Le plus étonnant est par exemple l’autographe de Lioudmila Savelieva, dont je suis dépositaire, qui était une immense vedette en Union Soviétique, mais que personne ne connaît. Mon père étant distributeur de films de l’est, elle était, comme beaucoup d’autres, venue manger à la maison et j’avais reçu une photo dédicacée. Et quand mes copains me demandaient ce qu’elle avait écrit, je leur disais que je n’en savais rien car tout était écrit en Russe.

On le sait moins mais vous avez ensuite été acteur et comédien , pendant une décennie, en début de carrière. Pourquoi avoir changé de voie ensuite ?

Dans l’ordre, j’ai d’abord commencé à dessiner. Puis, à l’adolescence, j’étais abonné à un théâtre, dans lequel je tombais amoureux des jeunes premières, en enviant les acteurs qui les tenaient dans leurs bras. J’ai fait une école de théâtre, joué dans de nombreuses pièces. Mais je n’ai pas continué car dessiner me démangeait davantage, que nous venions d’avoir des enfants et que la vie de comédien n’était pas franchement compatible avec celle de papa. Et quelques années plus tard, je me suis aussi dit que je pensais ne pas être indispensable au métier. Il y en avait des bien meilleurs que moi. 

Acteur, dessinateur, animateur, chroniqueur... Votre vie a été très riche. A quel moment avez-vous été le plus heureux ?  

Ne parlons pas au passé ! Mais parmi les très grands moments, je pense qu’il y a eu mes années de radio avec mes potes en Belgique, où nous avons fait pleurer de rire le pays tout entier, l’expo pour les 20 ans du Chat aux Beaux-Arts à Paris en 2003, puis le moment absolument étourdissant avec les sculptures sur les Champs-Elysées. Mais tous les moments avec Drucker, Ruquier, qui sont devenus des amis sont également fabuleux.

A la télévision française, vous avez rencontré une multitude de personnalités, que vous égrainez dans le livre. S’il ne devait en rester qu’une ?

Je pense, car c’est un éblouissement d’enfant, à Jean-Paul Belmondo, avec qui on avait fait une émission magnifique, avant qu’il ait son accident cérébral. Il était généreux, drôle, rigolo.

J’avais écrit une courte pièce de théâtre et j'avais demandé à Jean-Paul Belmondo de me donner la réplique. Il avait accepté et j’avais conclu en disant que je pourrais mettre sur mon CV que j’ai joué avec lui, devant six millions de téléspectateurs, ce que peu de gens peuvent dire !

J’ai d’ailleurs oublié de l’écrire dans le livre mais je le mettrai dans le volume 2 ! Car depuis que j’ai bouclé ce livre, j’ai 10.000 trucs qui me sont revenus. 

Vous avez fêté l’an dernier les 40 ans du Chat. Que vous-a-t-il permis ? 

De rester moi-même en toutes circonstances, de traiter de sujets légers et graves de façon détachée ou grinçante. Il m’a donné la liberté et ça, en création, c’est magique. 

Vous glissez dans le livre quelques croquis du Chat, ayant trait à l’actualité. En quarante ans, est-il devenu plus sage ? 

Je ne crois pas. Au contraire, il se lâche plus. Je pense que mes albums sont devenus plus incisifs mais en gardant toujours un éventail le plus large possible pour alterner les gags gentillets et plus dérangeants. 

On a l’impression que vous ne vous en lassez pas. Cela veut dire qu’on va encore le voir longtemps ? 

Oui, tout cela ne fait que commencer. Il y aura déjà un nouvel album l’an prochain. Et puis c’est drôle parce que pendant mes jours de repos, j’ai classé quelques documents. Et je me suis rendu compte que j’avais des centaines, voire des milliers d’idées déjà prêtes qui font que, même si je venais à cesser d’être inspiré à partir de lundi prochain, je pourrais continuer à donner le change pendant plusieurs années, même si je ne pense pas avoir le temps de tout faire. 

Vous allez notamment être bien pris par le musée du Chat qui ouvrira ses portes en 2026 à Bruxelles. 

Disons plutôt 2027 car cela a pris un peu de retard. Ce sera un lieu très bien placé, à 200 mètres du musée Magritte, près des Beaux-Arts, et qui sera dédié à l’humour. Ce sera le musée du Chat et du dessin d’humour avec de nombreux hommages rendus à des dessinateurs du monde entier. 

Si on avait dit cela au jeune dessinateur que vous étiez au début des années 80... 

J’aurais dit pourquoi pas, mais travaillons encore un peu ! (rires). Cela reste de la folie. Il y a peu d’artistes qui ont vu naître un musée de leur vivant. Il y a Tomi Ungerer à Strasbourg, Pierre Soulages à Rodez...

Nous étions amis avec Pierre Soulages et un jour, de lui ai dit : “Pierre, je suis impressionné par ton travail que j’aime beaucoup mais tu dois reconnaître une chose, mes tableaux sont plus drôle que les tiens”.

Et cela l’a fait rire. Il m’a répondu “oui, je le reconnais”.

Vous dédiez ce livre à Antoine de Caunes. Peut-on savoir ce qui vous unit ?

Je lui suis et serai éternellement reconnaissant de m’avoir accueilli sur le plateau de Nulle Part Ailleurs au début des années 90 alors que personne ne me connaissait en France. C’est quelqu’un qui m’impressionne, que j’aime et que j’admire. Nous nous sommes découverts une passion respective pour Frédéric Dard. Cet été, j’ai inauguré une exposition de ses tableaux en présence de sa veuve et de sa fille et c’est en lui rendant hommage que je me suis dit que j’allais dédier ce livre à Antoine de Caunes.

Pour conclure, qui a le plus de succès auprès du public : Le Chat ou Philippe Geluck ? 

C’est à dire que quand les gens demandent des selfies, c’est avec moi, donc c’est bien fait pour sa gueule à lui ! Quand ils me demandent de le dessiner, ça c’est lui, et c’est donc bien fait pour ma gueule à moi ! Mais c’est que toujours d’une gentillesse, d’une émotion.

Ce qui me touche, c’est quand les gens me disent à quel point le personnage du Chat est entré dans leur vie.

Et désormais, ce sont des gamins de 10 - 12 ans qui viennent m’en parler, qui ont découvert mes albums et qui en sont dingues. Que des dessins faits dans les années 80 fassent marrer quarante ans plus tard, ça, c’est très très magique. 

Propos recueillis par Maxime Escot