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"Les départs en vacances, c'était quelque chose !" : à l'Embouteillage de Lapalisse, une époque formidable refait surface dans le rétroviseur

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C’est donc cela, l’Embouteillage de Lapalisse. Des voitures qui déboulent d’un peu partout avec leurs moteurs pétaradants, des automobilistes qui conduisent la fenêtre grande ouverte et le cigare au bec, des enfants qui sortent la tête de la fenêtre avec leur béret soudain emporté par un vent toujours un peu trop fort.

Notre grand format : Nationale 7,la route mythique des vacances

Sans compter ces gendarmes faisant la circulation au giratoire le sifflet à la bouche et le képi vissé sur la tête, prêts à enfourcher leur R50 en cas d’urgence. Ambiance sixties garantie pour un événement qui, cette année encore, fédère des milliers de passionnés, amoureux des belles automobiles autant que d’une période pas loin d’être bénie, à en croire certains.

« On voyait les gens dans les voitures, en plein soleil, avec les enfants qui disaient “c’est quand qu’on arrive ?” »Nicole et Hubert Cantat, garagistes à Lapalisse

Pour rejoindre le sud du pays, il fallait prendre son mal en patience. Mais ceux qui ont vécu cette période n'en gardent que des souvenirs attendris.

Des files qui s'étiraient sur plusieurs kilomètres

Mais alors, c’était vraiment cela, ces années 60 et 70 que l’Embouteillage entend faire revivre le plus fidèlement possible ? « En tout cas, des bouchons, il y en avait », sourit Nicole Cantat, qui tient depuis 1970 l’un des garages historiques de la commune, sis au bord de la RN 7. « J’ai connu des files qui partaient d’ici pour aller jusqu’à Périgny, soit près de 5 kilomètres. Il y avait des voitures de partout au pied du château aussi, sur la route de Roanne et Lyon. C’était quelque chose. Surtout à la période des grandes vacances, bien sûr. On voyait les gens dans les voitures, en plein soleil, avec les enfants qui disaient “c’est quand qu’on arrive ?”. C’était folklorique. »  

"Quand il y avait des bouchons, on s’arrêtait. Sans compter les fois où on crevait, hein. Mais entre automobilistes, on se dépannait, c’était convivial".

marius et germaine, de coulanges

Un folklore que Marius et Germaine, des fidèles du rendez-vous venus de Coulanges, ont bien connu eux aussi. Du haut de leurs 80 et 84 ans, ils s’en souviennent comme si c’était hier. « Il fallait plusieurs heures pour arriver à Nice. On était dans la DS, on traversait des routes avec plein de platanes et puis quand il y avait des bouchons, on s’arrêtait. Sans compter les fois où on crevait, hein. Mais entre automobilistes, on se dépannait, c’était convivial. Cette époque, c’était le bon temps. » C’est précisément pour retrouver cette ambiance que les deux joyeux lurons sont revenus prendre part à cet Embouteillage. Guidés, aussi, par une forme « de nostalgie ».Comme ici, avec cette Peugeot 204 de gendarmerie évoquant Cruchot et Saint-Tropez, ce week-end est l’occasion de vivre de drôles de scènes qui ont de quoi bousculer les repères temporels. Et surtout de quoi faire largement sourire.

De la DS à l’électrique…

« C’est sûr que cette période était vraiment différente », abonde Christian, un autre féru de mécaniques anciennes tout droit venu de l’Isère pour garnir les bouchons lapalissois. « Des embouteillages, il y en avait plein le trajet quand on partait en vacances. Mais on prenait le temps, on traversait des villages où il y avait plein de commerces, on pique-niquait au bord de la route. C’était toujours très amical. » Bernard, originaire de l’Oise, se rappelle lui de « ces trajets en Simca 5 où il fallait jusqu’à deux jours pour rejoindre la mer, en croisant des véhicules où les bagages étaient sur le toit. Et il y en avait des bouchons, notamment par ici, à Lapalisse, ou vers Orange. Aujourd’hui, c’est autre chose ».

Au fils des différentes éditions de l’Embouteillage, des amitiés solides se sont nouées entre des participants venus de toute la France. Qui ont même créé une chanson spéciale pour célébrer leurs retrouvailles : « Et c’est où qu’on aime les vieilles voitures ? À Lapalisse ! ».

Une « autre chose » qui doit beaucoup à l’arrivée des autoroutes bien sûr et plus localement (plus tardivement aussi) à celle du contournement de Lapalisse. « Le trafic n’est plus le même maintenant, c’est sûr, a depuis longtemps constaté Nicole, la garagiste. Là, la route, on la traverse plus facilement à pied qu’à l’époque (rires). Aujourd’hui, dans le coin, il doit rester deux garages. Dans les années 1970, il y en avait une dizaine. » La spécialiste de l’automobile voit bien le changement à travers un autre prisme : celui de la mécanique. « J’en ai vu, des belles voitures. On répare toujours des véhicules anciens ici, mais on a dû s’adapter : dernièrement, on a acheté une borne de rechargement pour voitures électriques. » Comme le symbole d’une ère nouvelle à laquelle Nicole compte bien s’adapter, sans trop regarder dans le rétroviseur.

Dans les rues d’un Lapalisse plongé le temps d’un week-end dans une autre époque, les belles cylindrées côtoient des visiteurs qui ont ressorti redingotes et marcels. Pour faire encore plus vrai. « L’époque des embouteillages sur la RN 7, c’est une autre vie. On en a bien profité. Mais maintenant, il faut bien vivre avec son époque. » Grâce à cet événement qu’est l’Embouteillage, le garage Cantat continue de recevoir, tous les deux ans, des automobilistes venus de toute la France et de pays voisins. Et ça, Nicole n’en est pas peu fière. « Car ça fait parler de Lapalisse dans toute l’Europe ! » Un motif de fierté pour ses habitants : c’est aussi cela, l’Embouteillage de Lapalisse.

L’événement se poursuit aujourd’hui, avec encore nombre d’animations à Lapalisse : défilé de véhicules, exposants, concerts, marchés gourmands. Exposition de véhicules anciens au château, mais aussi à Saint-Prix.

Une ambiance de fête règne sur une RN7 qui renoue avec ses grandes heures.  

Pierre Geraudie

Photos François-Xavier Gutton