La loi visant à limiter l'engrillagement est-elle constitutionnelle ?
Nouvel épisode dans le feuilleton de la loi du 2 février 2023 visant à limiter l’engrillagement des espaces naturels et à protéger la propriété privée, notamment en Sologne. Mardi 8 octobre matin, devant le Conseil constitutionnel, une audition, présidée par Laurent Fabius, lui était consacrée dans le cadre d’une question prioritaire de constitutionnalité. Avocats des pro grillages et des anti grillages ont fait entendre leurs arguments respectifs devant les neuf membres du conseil.
"Une révolution juridique"Pour les pro, Maître Henri Savoie, a été le premier à "dégainer". Il a pointé du doigt une loi "très large remettant en cause un droit très ancien, celui de se clore. Si ce droit a vécu et qu’il disparaît, il n’y a plus de clôtures. C’est une révolution juridique".
Il a également considéré que la loi du 2 février 2023 ne s’appuyait pas sur des motifs d’intérêt général puissants mais "inconsistants. Il n’y a pas d’éléments factuels. Le législateur a travaillé en aveugle."
Il considère qu’il y a une double atteinte au droit de propriété, que la règle des 30 ans de rétroactivité (de destruction des grillages construits à partir de 1993) est arbitraire. "Cette loi est mauvaise, mal préparée, basée sur de mauvais motifs, remettant en cause des droits fondamentaux. Elle est inconstitutionnelle", a-t-il conclu dans une plaidoirie précise et concise comme lui avait demandé Laurent Fabius au regard du nombre d’intervenants.
Pour les anti, Maître Michaël Grienenberger-Fass, qui défendait quatre associations, dont Les amis des chemins de Sologne, a mis en avant que :
Chasseurs, promeneurs et agriculteurs soutenaient une même cause, celle d’une nature libre d’entraves devenues intolérables par leurs excès, pour tous ceux que le devenir des milieux et des espèces naturelles préoccupe.
"Prisonniers des clôtures"Il a rajouté que la loi devenait urgente et nécessaire : "Chaque année, plusieurs centaines d’animaux périssent, prisonniers, des clôtures sur l’ensemble du territoire solognot. Pour que les animaux que ces enclos retiennent, ce sont plusieurs milliers de grands animaux… Cette situation est juridiquement d’autant plus singulière que le gibier est une chose n’appartenant à personne autant qu’à tout le monde. Il n’est pas susceptible d’appropriation et donc de rétention."
La réponse du Conseil constitutionnel sera connue dans dix jours, le vendredi 18 octobre.
Alexis Marie