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Comment Gil Avérous, maire de Châteauroux, est devenu ministre des sports ?

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C’est le ministre surprise du gouvernement Barnier. Un élu local, très impliqué dans le sport, peu ou pas connu du grand public. C’est pourtant lui qui a décroché le maroquin des Sports, de la Jeunesse et de la Vie associative, quelques semaines après que la parenthèse olympique et paralympique s’est refermée. Paris 2024 mais aussi Châteauroux 2024. Gil Avérous, 51 ans, cultive la discrétion, mais s’est fait remarquer en décrochant, en 2022, les épreuves de tir sportif dans sa ville d’élection.

Un lobbying  « discret »

Ces épreuves étaient prévues à La Courneuve, mais la dépollution du site et le coût de l’opération ne jouaient pas en sa faveur. Avec des JO qui se voulaient sobres sur les plans écologique et budgétaire, ça aurait été « une hérésie » selon Gil Avérous alors que la préfecture de l’Indre disposait déjà d’installations de qualité, le Centre national de tir sportif (CNTS).

« Il a très vite compris les retombées économiques dont pouvait bénéficier son territoire. Il a fait du lobbying à son image, discret et efficace, alors que c’était très loin d’être gagné pour le CNTS, un site qui, au départ, semblait accumuler les inconvénients, jugé trop loin de Paris et implanté sur un territoire qui, vu de la capitale, ne semblait pas en capacité d’accueillir le monde entier »

Gil Avérous s’est ouvert les portes du comité olympique, des ministères. « Il a fait rayonner sa ville durant les JO », confirme une source de Matignon.

Le maire de Châteauroux n’avait pas tardé à faire un clin d’œil à Michel Barnier, lors de sa nomination en tant que Premier ministre. Dans un message sur le réseau social X, le 5 septembre, il adresse ses « félicitations à Michel Barnier, notre nouveau Premier ministre. Comme président de @VillesdeFrance et maire de @Chateauroux36, je suis sûr que nous aurons des échanges constructifs pour les territoires et les villes moyennes qui font notre pays. Le redressement du pays ne peut se faire qu’avec élus locaux et notamment les maires ». Message probablement reçu 5 sur 5 à Matignon.

« Les JO ont été une vraie passerelle pour entrer au gouvernement, confirme le député du Cher de l’ex-majorité présidentielle François Cormier-Bouligeon. Il a une réussite locale et a œuvré dans le domaine du sport. Il n’est pas dans la politique politicienne. Il est dynamique, sympathique, ouvert et pas sectaire. Il fait partie des LR qui ont compris qu’il fallait travailler avec une majorité ouverte. Beaucoup se voyaient à ce poste avec beaucoup d’immodestie, c’est une heureuse surprise pas totalement surprenante. » Pas de doute selon ce député, avoir décroché les JO à Châteauroux, c’est, en amont, « avoir su travailler un réseau de décideurs du sport en France ».

« Ligne directe » avec les ministres

Habile professionnel des politiques locales, Gil Avérous, élu en 2014 et réélu dans un fauteuil en 2020, murmure aussi aux oreilles des ministres. Sa stature nationale, il se l’est aussi construite depuis 2022, à la tête de Villes de France, association qui représente les communes de 10.000 à 100.000 habitants. « C’est une bête de travail qui, depuis qu’il a ce statut de porte-parole des villes moyennes, est en ligne directe et permanente avec Paris, glisse un élu indrien. Les journées durant lesquelles il est en contact avec un ministre sont bien plus nombreuses que celles sans ministre au bout du fil. »

Le 23 septembre, il a succédé à Amélie Oudéa-Castéra. « Je ne viens pas ici pour révolutionner les choses », lançait-il sobrement, lors de la passation de pouvoir. Il va devoir entretenir la flamme des JO, tout en gérant un portefeuille aux Sports qui n’échappe pas aux coupes budgétaires. Mais surtout incarner l’ambition nationale du sport décentralisé souhaité par Michel Barnier. Avec la modestie et le bon sens d’un élu local. « L’important, c’est de développer le sport pour tous, aider les clubs, former les bénévoles et développer les équipements sportifs de proximité », liste le député François Cormier-Bouligeon.

Gil Avérous n’est pas un ancien athlète. Mais un compétiteur dans les vestiaires de la politique. Ancien directeur général des services en collectivité et directeur de cabinet, il s’est forgé une solide contenance politique sur le terrain. Et son nom circulait depuis 2020 à chaque remaniement ministériel. « Gil a toujours eu envie de s’investir dans une action gouvernementale », confirme Nadine Bellurot, sénatrice (LR) de l’Indre. « À un moment ou à un autre, il allait être appelé au gouvernement », est-elle convaincue, louant son action locale, son engagement auprès de la jeunesse et sa capacité à accueillir les JO qui ont été un tremplin. « Il s’est ouvert des réseaux avec Villes de France. C’est un ministère qui lui va bien. »

LR : le pas de côté

Depuis son désaccord avec la ligne de LR du « ni-ni », Gil Avérous avait quitté le parti, fin 2023, en appelant à voter pour le président sortant Emmanuel Macron au second tour de la présidentielle de 2022 face à Marine Le Pen. Comme son mentor Nicolas Sarkozy, qui l’a fait chevalier de la Légion d’Honneur en 2021, il a fait un pas clair vers Macron : d’abord une tribune co-signée en avril 2022 avec deux autres élus LR soutenant l’action du Président de la République. Puis un appel aux députés de son camp à participer à la majorité présidentielle en juin 2022. Une démarche remarquée à l’Élysée.

« Il ne faut pas chercher midi à 14 heures. Si Gil Avérous est là où il est actuellement, il le doit évidemment à son travail en tant qu’élu de terrain, à ses Jeux réussis, à son solide réseau à droite et à son rapprochement avec la Macronie » glisse un élu proche de lui.

Macron-compatible, beaucoup lui reconnaissent une vraie réussite pour avoir su réveiller et transformer Châteauroux, petite préfecture de l’Indre dont il reste toujours maire. « Il a construit une ambition pour Châteauroux qui ne se résume pas à de la simple com’, il construit sur du dur », reconnaît le député François Cormier-Bouligeon.

Les Jeux olympiques à peine refermés, Gil Avérous affichait déjà une posture nationale sur X. « Le sport est un élément fédérateur national incomparable. Un élément essentiel de la cohésion qui doit faire l’objet d’une réelle politique nationale. Je rêve d’un héritage social sportif de @Paris2024. Nous avons tout à gagner à investir dans le sport, à promouvoir des valeurs qui forgent toute une société. » Un rêve à concrétiser pour le nouveau ministre.

Thomas Migault et Benjamin Gardel