Commerce international : loin de se disloquer, la mondialisation s’adapte pour survivre selon Coface
Bousculé par les crises qui s’enchainent depuis la pandémie de Covid-19, le modèle qui régit les échanges commerciaux depuis plus de trente ans tangue, mais ne sombre pas, selon une récente étude de Coface. Dans un nouveau contexte géopolitique, elle s’adapte pour survivre.
Vouée à disparaître la mondialisation ? Si la question anime les débats entre économistes, elle a également des implications concrètes pour les entreprises exportatrices. Les différentes crises qui se sont succédé dans le monde depuis 2020 ont ainsi remodelé les supply chains mais également les routes maritimes, empruntées par 90 % des marchandises échangées dans le monde. Les confinements en Chine, les pénuries de boîtes, la crise en mer Rouge et maintenant la grève dans les ports de la façade Est des Etats-Unis font exploser les taux de fret.
Le tableau dressé par Coface de la mondialisation montre une fragmentation en deux blocs avec, d’une part, les pays occidentaux, incluant la plupart des membres de l’OTAN, mais aussi l’Australie et la Corée du Sud, et, d’autre part, la Russie et la Chine. Les flux commerciaux au sein de chaque bloc sont restés relativement stables tandis que ceux entre ces deux groupes de pays ont diminué de manière plus importante et plus rapide. Les flux mensuels entre les deux géants ont en effet chuté de 20 % depuis leur pic de 2021.
Pas de découplage en vue
Selon l’assureur-crédit, un découplage entre les Etats-Unis et la Chine, qui a pourtant fait couler beaucoup d’encre et conduit la politique commerciale de l’administration Biden, n’est pas à l’autre du jour. Entre autres raisons par qu’il d’agit de deux économies trop importantes et trop complémentaires pour s’ignorer mutuellement. Etats-Unis représentent 29 % de la consommation mondiale, mais seulement 13 % de la valeur de la production des biens. A l’inverse, la Chine fabrique 27 % des marchandises échangées dans le monde. Pour les deux premières puissances mondiales, commercer avec l’extérieur signifie donc obligatoirement commercer entre eux.
En outre, un examen des spécialisations industrielles de ces deux pays contredit pareillement un découplage total. Exemple avec la construction navale, secteur qui fait figure de cas d’espèce selon Coface. La Chine (47 %), la Corée du Sud (29 %) et le Japon (17 %) représentent ensemble la quasi-totalité du tonnage maritime mondial. 59 % des commandes de navires marchands sont adressées aux chantiers navals chinois. Le marché du conteneur est encore plus concentré : Chine assure la moitié de la production mondiale.
Le protectionnisme, une fausse bonne idée
Idem dans la production de grues de quai : 70 % des équipements installés dans le monde proviennent d’une seule entreprise d’Etat chinoise, Shanghai Zhenhua Heavy Industries Company. Ces grues, dites S2S, ont fait partie des produits chinois visés par les surtaxes douanières mises en place en mai dernier par l’administration Biden et l’augmentation de 25 % des droits de douane sur ces équipements indispensables au bon fonctionnement des ports et du transport maritime met la pression sur le coût des opérations portuaires américaines et risque de décourager certains travaux de modernisation ou d’extension.
Les exemples de domination chinoise sur un segment de production sont nombreux (batteries électriques, panneaux solaires…) et les réactions protectionnistes des Etats-Unis, comme le montre l’exemple des grues, risque de les pénaliser plus que de protéger les entreprises nationales. Idem sur les surtaxes mises en place par l’UE sur les véhicules électriques made in China : elles pèsent également sur les constructeurs qui produisent en Chine des voitures qui ne peuvent (du moins pas encore) être produite sur le Vieux continent, faute de d’une filière suffisamment développée.
Toutefois, la résistance du commerce mondial sera mise à l’épreuve dans les années à venir, estime Coface. L’intensification des guerres commerciales, promise par certains candidats à la présidence des Etats-Unis, associée à une escalade continue des tensions mondiales, pourrait en effet entraîner des perturbations majeures dans les chaînes d’approvisionnement mondiales.
Sophie Creusillet
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