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Октябрь
2024

ESG ou le tigre de papier qui ne fait plus rugir les fonds de placement

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L’ESG (critères environnementaux, sociaux et de gouvernance), autrefois perçu comme une force puissante, se révèle être moins impressionnant que prévu. Les fonds de placement, qui le défendaient auparavant, ne le soutiennent plus avec la même vigueur. La remise en question de la transition verte — en dehors de Bruxelles-Strasbourg — a débuté.

La grande remise en question des entreprises vertes a enfin lieu

Tel est le sous-titre d’un article paru dans le Financial Times. On y apprend que des industriels auparavant défenseurs de l’environnement reconnaissent les profondes lacunes du concept de durabilité. Il est gratifiant pour un dirigeant de proclamer des engagements en faveur du développement durable, mais les entreprises qui ne font plus de bénéfices ne feront plus de développement du tout.

Dans son récent rapport, Mario Draghi a souligné combien l’UE s’enfonce dans le manque de compétitivité. Il confirme le sous-titre de mon dernier livre « Énergie, mensonges d’État. La destruction organisée de la compétitivité de l’UE ». Il écrit que « nous avons atteint le point où, si nous n’agissons pas, nous devrons compromettre notre bien-être, notre environnement ou notre liberté. » Il va falloir choisir !

BlackRock, un des premiers à revoir sa copie

Les investisseurs s’étaient précipités sur les critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) pour évaluer les risques et les opportunités à long terme des entreprises, en plus des indicateurs financiers traditionnels, mais cette tendance s’essouffle.

Larry Fink, le PDG de BlackRock a traditionnellement plaidé pour l’importance des critères ESG dans les décisions d’investissement, soulignant que les entreprises doivent tenir compte des impacts sociaux et environnementaux pour assurer leur viabilité à long terme. Cependant, au cours des dernières années, il a également fait preuve de prudence face aux critiques croissantes et aux pressions politiques. Dans ses lettres les plus récentes, il a souligné que les entreprises doivent naviguer dans un paysage complexe où les opinions sur les enjeux ESG sont de plus en plus polarisées.

BlackRock dans un récent  rapport se montre circonspect sur les propositions avancées par certains actionnaires pour renforcer l’engagement de l’entreprise en matière de critères ESG. Ce fonds de placement est bien conscient que des États américains ont décidé de ne plus collaborer avec des gestionnaires de fonds qui favorisent les initiatives ESG.

Des Etats américains ont lancé la charge contre ESG

En effet, plusieurs États américains ont pris des mesures pour limiter la collaboration avec des gestionnaires de fonds qui mettent en avant des critères ESG dans leurs décisions d’investissement.

Le Texas a adopté une loi qui interdit aux agences de l’État de faire affaire avec des entreprises qui « boycottent » l’industrie des énergies fossiles comme BlackRock, BNP Paribas et Crédit Suisse. Le gouverneur de Floride, Ron DeSantis, a fait passer une résolution interdisant aux gestionnaires du fonds de pension de l’État de Floride de prendre en compte les facteurs ESG dans leurs décisions d’investissement. Le Kentucky a adopté une loi similaire à celle du Texas. L’État de West Virginia a annoncé qu’il cesserait de faire affaire avec plusieurs grandes banques, dont Goldman Sachs, JPMorgan Chase et Wells Fargo. L’Oklahoma a adopté une loi qui exige que le trésorier de l’État maintienne une liste des institutions financières qui boycottent les entreprises du secteur de l’énergie.

Ces exemples montrent une tendance croissante dans certains États, particulièrement ceux avec une forte industrie des énergies fossiles, à s’opposer aux politiques d’investissement basées sur des critères ESG. Ils considèrent que ces politiques peuvent nuire à leurs industries locales et à leurs économies.

Le retournement du système financier ― et des autres ― pour favoriser l’avenir des énergies fossiles

Les fonds d’investissement sont conscients que les investissements dans les projets d’énergies fossiles se multiplient partout dans le monde, à l’exception de l’UE. Le développement des énergies renouvelables se poursuit, mais cela ne renversera pas la demande en énergie fossile. D’ailleurs, il suffit d’observer les marches arrière récentes de BP, Equinor, Vattenfall et tant d’autres. Shell, par exemple, a abandonné son objectif de réduction de 45 % de l’intensité nette de carbone en 2035, invoquant l’incertitude quant au rythme du changement dans la transition énergétique.

Il n’y a pas que le secteur bancaire ou énergétique qui prenne ses distances avec le rêve vert. Les géants de l’intelligence artificielle, comme Google ou Microsoft, s’étaient positionnés comme des leaders en matière d’ESG en se fixant des objectifs ambitieux de consommation net zéro, comme si soudainement ils avaient trouvé la solution miracle. Avec l’essor de l’intelligence artificielle, gourmande en énergie, les positions politiquement correctes sont mises à mal. Forbes rapporte que seulement 4 % de ces entreprises sont en passe d’atteindre leurs objectifs de réduction des émissions.

Presque toutes les industries continueront à dépendre de l’énergie thermique pour leurs processus : cimenteries, verreries, briqueteries et industries céramiques, mais aussi brasseries, etc. Il en va de même pour de nombreux services qui ont besoin de chaleur en grande quantité, comme les hôpitaux ou les piscines. À court ou moyen terme, critères ESG ou pas, il n’est guère possible de remplacer le gaz et les produits pétroliers qui alimentent ces industries et services par des énergies renouvelables. Les fonds de placement en ont pleinement conscience et continuent donc d’investir dans les énergies fossiles.

La décision de réduire l’importance accordée aux critères ESG est logique à la fois pour protéger les actionnaires, mais aussi parce qu’ils n’ont aucun impact sur la consommation globale en énergie, sur l’indispensable nécessité de consommer plus pour les pays africains et, somme toute, pour la géopolitique de l’énergie c’est-à-dire la marche du monde. Les pays BRICS+ doivent bien rire en voyant l’UE et son système bancaire s’évertuer à coup de milliards à imposer des politiques ESG pendant qu’eux prospèrent.

Les fonds de placement américains et la banque BRICS ont pleinement conscience que les investissements dans les projets d’énergies fossiles et nucléaires continuent d’être décidés partout dans le monde, à l’exception de l’UE. Les grandes entreprises ont emboîté le pas. Tous continuent donc d’investir dans ce secteur pour assurer la prospérité du monde, car l’énergie est essentielle à la vie. Le Financial Times a raison de titrer « La grande remise en question des entreprises vertes a enfin lieu ».

Que va faire Bruxelles-Strasbourg ?

Une version plus détaillée de cet article se trouve sur ce lien.