Girolles, cèpes et autres : ce chef de Haute-Loire vous livre ses astuces de pro
Pour déguster des champignons, poêlés, gratinés ou en velouté, il faut déjà en trouver, mais les paniers dit-on, se remplissent sans difficulté cette année. Ensuite, un travail de préparation à la fois minutieux et fastidieux, s’impose en cuisine pour préserver toute la saveur des cèpes et girolles, les champignons stars de l’automne. Comment procéder ? Restaurateur à Saint-Bonnet-le-Froid aujourd’hui retraité, André Chatelard donne quelques clés pour magnifier le goût de ces mets, sans prendre de risques inconsidérés.
Les girollesLe nettoyage.
Les girolles, on le sait, sont de petits champignons orangés aussi bons que difficiles à nettoyer. Pour cette opération laborieuse, André Chatelard n’a pas, hélas, de botte secrète. Il use de « la méthode classique » qui consiste à « racler délicatement le pied avec le revers du couteau » quand d’autres se saisissent d’un blaireau de rasage, d’une brosse à dents ou de la brosse fixée au manche du couteau à champignons pour retirer les saletés. Un rinçage à l’eau froide et le tour est joué. Simple comme bonjour, mais « attention, prévient le restaurateur retraité, il ne faut pas laisser tremper les girolles, car elles risqueraient de se gorger d’eau ».Du nettoyage au séchage en passant par la cuisson et la congélation, focus sur les bons gestes à adopter. Photo d’illustration Lionel Ciochetto
On peut congeler l’eau de trempage et en faire des glaçons qui serviront à faire des sauces
La cuisson.
Fin prêtes pour la phase 2, les girolles (aussi appelées chanterelles) filent dans une poêle chauffée à feu doux, dans laquelle André Chatelard verse un peu d’huile de pépins de raison (qui monte assez haut en température), conseillant au passage de bannir l’huile d’olive dont le goût prononcé pourrait masquer celui des girolles. Le but de la manœuvre : « faire dégorger » ces petits champignons qui ont tendance à rendre beaucoup d’eau. Après cinq minutes de cuisson environ, « il faut égoutter », puis repartir pour un tour de chauffe lors duquel « on ajoute cette fois un peu de beurre et de l’échalote ciselée. Ça fonctionne bien », garantit le chef qui recommande de « ne pas attendre » pour passer à l’ultime étape : la dégustation.La dégustation. Contrairement aux cèpes dont on peut préserver l’arôme durablement, « les girolles, elles, sont délicates à conserver », commente André Chatelard. Et bien plus savoureuses au retour de la cueillette.
Les cèpesL’astiquage.
Avec les cèpes, c’est une autre paire de manches. Certes, le nettoyage à l’économe est facilité par l’aspect rondelet, charnu de ces nobles bolets, mais le cuisinier se doit néanmoins d’être précautionneux s’il ne veut pas commettre un faux pas. Il faut par exemple « éviter de les passer sous l’eau, car le vert (parfois visible sous le chapeau) risque de pomper l’eau », met en garde André Chatelard. Mieux vaut se munir « d’un torchon humide » pour débarrasser le champignon de ses excroissances. Ensuite, un tri s’impose. Les plus jolis cèpes seront poêlés et consommés dans la foulée. Quant aux spécimens les moins beaux, souvent très volumineux et d’âge mûr, ils rejoindront les véreux sur la planche à découper pour une remise en forme, prélude à leur conservation.
Le séchage.
Pour prolonger la durabilité des cèpes et profiter de leur saveur tout l’hiver, certains cuisiniers pourraient être tentés de placer des bolets frais dans leur congélateur. Une idée qu’André Chatelard préconise d’abandonner, au profit du séchage, dont le résultat est moins aléatoire. Pour cela, c’est comme tout, un peu d’huile de coude et un soupçon de patience s’avèrent nécessaires. « Il faut d’abord couper les cèpes finement, en escalope, puis les disposer sur du papier sulfurisé ou sur une grille », détaille le restaurateur, ajoutant que « l’idéal, pour ceux qui le peuvent, est de faire sécher les cèpes au soleil afin qu’ils restent bien blancs ». Pour cette opération, « compter entre deux et trois jours » ; bien moins en investissant dans un séchoir ou déshydrateur alimentaire, en vente dans le commerce dès 25 €. Après quoi, réserver au frais.
La congélation.
S’il est possible de conserver ses cèpes secs dans des bocaux, la vigilance reste de mise. Car la moindre once d’humidité (provenant par exemple d’un champignon mal séché) peut anéantir les efforts consentis et les espoirs de dégustation. Une valeur sûre : la congélation. Déconseillée par André Chatelard en ce qui concerne le cèpe frais, elle convient en revanche tout à fait au sec et présente même l’avantage de pérenniser sa texture. « Cela lui évite d’être grignoté par des bêtes imperceptibles à l’œil nu et de tomber en poussière. »
Le retour en cuisine.
Sorti du congélateur, le cèpe sec pourra être incorporé à un gratin de pommes de terre, à des pommes boulangères ou encore à ce velouté de cèpes servi à Saint-Bonnet-le-Froid les jours de foire aux champignons, dont André Chatelard livre ici la recette (lire par ailleurs). Au préalable, celui-ci devra être réhydraté, en le laissant tremper dans un contenant rempli d’une eau tiède. Surtout, « ne gaspillez pas l’eau de trempage », clame le restaurateur, indiquant que cette eau très aromatisée sera parfaite pour « arroser la pomme boulangère. On peut aussi la congeler et en faire des glaçons qui serviront à faire des sauces », conseille André Chatelard qui, avec son épouse Viviane, a remis les clés du restaurant, véritable institution à Saint-Bonnet-le-Froid, à un jeune couple au lendemain de la pandémie de Covid-19 (en 2021).
Ophélie Crémillieux