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Сентябрь
2024

Pourquoi le lac Pavin est-il constamment sous surveillance ?

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Suzanne et son mari Henri ont choisi le Sancy comme coin de vacances. "Nous sommes là pour quinze jours." Le couple de Belges a profité de leur premier séjour en Auvergne pour partir à la découverte du lac Pavin. "Il paraît qu’il y a plein de légendes ici. J’ai même entendu qu’au fond du lac, il y avait un village englouti."

Que Suzanne se rassure, le lac d’une profondeur de 92 mètres ne renferme pas de cité. Les nombreuses études réalisées l’attestent. Tout comme le fait que le Pavin soit considéré comme un lac meromictique. "La première couche d’eau de 60 mètres se retourne au fil des saisons. S’il y a du gaz, il est relâché de manière continue. Par contre, dans la seconde couche, les eaux restent stagnantes", illustre Guillaume Boudoire, enseignant-chercheur au laboratoire Magmas et Volcans, unité mixte de recherche de l’université Clermont-Auvergne (UCA).Le lac Pavin est un site apprécié du Sancy.

En effet, entre 60 et 92 mètres, les eaux ne circulent pas et sont chargées en gaz (principalement du dioxyde de carbone et du méthane). Gaz qui pourrait remonter et entraîner une éruption limnique.

Une station pour mesurer les flux de CO2

Le sujet du dégazage du lac Pavin est surveillé depuis 2008 par les services de l’État, "une zone d’émission de gaz a été mise en évidence", annonce la préfecture du Puy-de-Dôme. Des estimations ponctuelles de gaz ont été réalisées par le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) dès 2008, et complétées par des mesures de flux plus récemment. "Une station fixe pour mesurer en continu les flux de CO2 depuis le sol vers l’atmosphère a été installée au printemps 2024", ajoute la préfecture.

En parallèle, des scientifiques du laboratoire Magmas et Volcans de Clermont-Ferrand, la docteure Victoria Rafflin en tête, ont rédigé un article, publié en février dernier, sur les conséquences d’une éruption limnique. Guillaume Boudoire complète :

Nous nous sommes demandés quel était l’état du lac Pavin aujourd’hui et si le gaz remontait à la surface, quelles seraient les conséquences

Une modélisation numérique de cette potentielle dispersion de gaz dans l’atmosphère a ainsi été réalisée et plusieurs scenarii envisagés. "Ce sont les modèles les plus probables, théoriques, qui permettent d’estimer les aléas", précise le chercheur clermontois. "Notre question primaire était de savoir si le gaz pouvait transiter jusqu’à la ville de Besse-et-Saint-Anastaise", insiste Guillaume Boudoire.

Des conditions stables depuis 40 ans

Le dioxyde de carbone (CO2) enfermé dans le Pavin étant un gaz lourd, s’il était libéré, il s’accumulerait à hauteur humaine près de la surface de l’eau et se disperserait ensuite selon la topographie. Pouvant, effectivement, franchir les portes de Besse. "Les modélisations nous ont permis de nous rendre compte que si le nuage pourrait bien atteindre la ville, il arriverait dans des concentrations qui ne seraient pas préoccupantes pour la santé de la population", rassure le scientifique.Le lac est constamment sous surveillance.

Les cartes probabilistes montrent cependant que les zones autour du lac (abords et sentiers de randonnées notamment) pourraient par contre connaître des teneurs létales en CO2 dans l’air dès 15 minutes après le début d’une éruption limnique et jusqu’à "deux heures après", avance Victoria Rafflin, docteure et auteure de l’article. Les scientifiques ont, par ailleurs, répertorié trois zones proches du lac pouvant permettre au public de se mettre en sécurité en cas d’aléas.

Des éléments de précision complémentaires

Les études des chercheurs du laboratoire auvergnat ont également permis de comparer les mesures réalisées ces dernières années au fond du lac avec celles effectuées depuis les années 80. Guillaume Boudoire assure :

Cela montre que depuis une quarantaine d’années, les conditions sont restées très stables dans la couche du fond du Pavin

Les conclusions de cette modélisation numérique du laboratoire Magmas et Volcans devraient être prochainement présentées aux services de l’État. "Cela pourrait éventuellement amener d’ici là quelques éléments de précision complémentaires. Ceci afin d’échanger ensuite sur l’évolution du sujet", avance la préfecture puydômoise. Et si besoin, les services de l’État pourraient plancher sur la mise en place d’un système d’alerte ou encore d’itinéraires de secours.Plusieurs études ont été réalisées dans les eaux du Pavin.

Mais rassurez-vous, ces modélisations numériques restent théoriques. Une expertise menée par le BRGM et l’université de Clermont-Auvergne a d’ailleurs permis d’écarter, à court terme, un dégazage spontané du lac (*). Suzanne et Henri peuvent continuer leur découverte du Sancy en toute quiétude.

(*) Selon les scientifiques, un dégazage du Pavin ne pourrait intervenir qu’en cas d’une sollicitation externe intense : un important glissement de terrain, un éboulement conséquent d’une falaise ou encore un fort séisme.

Jean-Baptiste Botella