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Сентябрь
2024

Changement climatique : comment les éleveurs peuvent-ils dès maintenant préserver les prairies de demain ?

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Les effets du changement climatique sont là. Alors pour ne pas seulement subir mais bien agir, le monde agricole a besoin d’outils de prospection et d’analyses lui permettant d’adapter ses pratiques. Le projet AP3C est de ceux-là, comme l’a démontré le quatrième colloque organisé par ses équipes à Clermont-Ferrand.

Lancée en 2015, cette « Adaptation des pratiques culturales au changement climatique » est animée par le Service interdépartemental pour l’animation du Massif central (Sidam). Elle unit les chambres d’agriculture de onze départements et un climatologue, Vincent Cailliez, qui analyse trente ans de données collectées par Météo-France.

Les chambres d'agriculture de l'Allier, de l'Aveyron, du Cantal, de la Corrèze, de la Creuse, de la Haute-Loire, de la Haute-Vienne, de la Loire, du Lot, de la Lozère et du Puy-de-Dôme

Dès maintenant

Ces données doivent permettre d’obtenir des informations localisées jusqu’en 2050, et surtout une analyse fine des impacts du changement sur le Massif central, en vue d’adapter les systèmes de production agricole du territoire et d’en sensibiliser les acteurs. Plus de six millions de données observées, issues de plus de 200 stations Météo-France du Massif central, ont été acquises, homogénéisées et analysées. 150 cartes AP3C sont disponibles sur le site du Sidam et de la Copamac (Conférence des présidents des organisations agricoles du Massif central), pour permettre aux agriculteurs d’anticiper ce qui se va se passer sur leur territoire et de s’y préparer dès maintenant.

Ces données sont également utilisées par les conseillers des chambres d’agriculture, tels que Clémentine Lacour, l’une des cinq conseillers fourrages de la chambre d’agriculture du Puy-de-Dôme, qui est revenue sur l’impact du changement climatique sur les prairies lors de ce colloque. Elle s’est particulièrement focalisée sur la partie printemps, période durant laquelle « il se joue énormément de choses : le démarrage de végétation, le démarrage du pâturage… C’est très important parce que si on ne valorise pas cette herbe de printemps, on le paye un peu toute l’année ».

L’éleveur doit être assez stratégique pour arriver à la fois à pâturer cette herbe, bien la valoriser en pâturage mais aussi pouvoir faire du report à partir de fauche pour pouvoir l’utiliser après, sur le reste de l’année.

Mise à l'herbe

Car entre les années 2000 et 2050, les dates de mise à l’herbe des troupeaux ont et vont évoluer. D’à peu près cinq jours dans certains secteurs?; d’une vingtaine de jours dans d’autres. Dans le secteur montagne du Sancy dans le Puy-de-Dôme, l’avancement de cette mise à l’herbe va être d’une vingtaine de jours, « ce qui est assez conséquent sur cinquante années », relève la conseillère.

Et si cette date repère avance différemment en fonction de la situation géographique (si on se trouve en plaine ou en montagne notamment), elle peut également varier d’une année à l’autre. En face, les dates de dernières gelées aussi évoluent, « mais pas forcément en parallèle de l’avance et de la mise à l’herbe. Cela veut dire qu’on peut avoir une mise à l’herbe précoce mais avoir une forte gelée derrière. Donc là aussi il va falloir pouvoir s’adapter et réagir. »Le changement climatique impose aux agriculteurs d’être davantage stratégique, notamment pour mieux valoriser son herbe de printemps (photo d'illustration Agnès Gaudin)

Conseils

Alors quels conseils donner aux éleveurs?? Avoir la possibilité de sortir les animaux par lots, jouer avec les surfaces qu’ils réservent à la fauche, avoir des stocks d’avance s’il faut affourager ou re-rentrer le troupeau. Surtout, « il est très important de connaître ses prairies parce qu’on en a qui sont plus précoces, d’autres plus tardives. Certaines démarrent vite et il faut rapidement les utiliser pour qu’elles ne se dégradent pas au niveau de la qualité », insiste Clémentine Lacour. La gestion fourragère devient de plus en plus technique.

L’éleveur doit également être dans l’anticipation, disposer de clôtures prêtes plus tôt, avoir une diversité de prairies mais aussi adapter le chargement et le temps de retour à la flore des prairies.

On a la chance, dans le Massif central, d’avoir une grande diversité de prairies, d’avoir énormément d’espèces différentes à l’intérieur de ces prairies. Donc utilisons cet atout, on a tout à y gagner. 

Pousse estivale

D’autant que la pousse estivale, elle, se dégrade, en raison d’une forte progression des jours chauds. « C’est aussi pour ça qu’il est important de favoriser cette période du printemps et de prévoir pour l’été de pouvoir affourager et d’améliorer le confort des animaux. Il est très important d’avoir de l’ombrage dans les pâtures », voire d’inverser les pratiques en sortant les animaux plutôt la nuit que le jour.

Pâturage d'automne

Les projections montrent aussi qu’il y aura plus de jours favorables au pâturage d’automne, avec 10 à 15 jours supplémentaires possibles, suivant les années. « Il faut essayer de favoriser ce pâturage d’automne dans la mesure du possible et prendre soin des prairies sur la fin de saison. On observe de plus en plus de prairies qui se dégradent parce qu’elles sont surpâturées, rasées. Donc attention aux fauches rases, attention au surpâturage », conclut Clémentine Lacour. Cet exemple de l’impact du changement climatique sur les prairies témoigne de la complexification de l’agriculture d’aujourd’hui, qui n’a d’autre choix que de s’adapter et qui s’appuie sur des outils de plus en plus précis comme AP3C.

 En savoir plus. Plus d’infos sur sidam-massifcentral.fr/developpement/ap3c/

Gaëlle Chazal