Dans le Puy-de-Dôme, Emmaüs aussi est affaiblit par la crise du textile
René Araya, directeur d’Emmaüs Puy-de-Dôme, balaye immédiatement d’un revers de la main la corrélation qui est faite, depuis quelques semaines, entre les difficultés de collecte des vêtements et l’affaire abbé Pierre. Pour lui, aucun lien. Le mal est ailleurs.Les problèmes rencontrés pour la collecte de vêtements n’ont, selon vous, aucun lien avec les révélations sur l’abbé Pierre ?Cela n’a absolument rien à voir. La problématique de la collecte des vêtements, cela fait bien plus longtemps que nous la rencontrons, et cela ne va pas s’arrêter si nous ne trouvons pas une vraie solution rapidement.
Toujours autant de dons, mais pas assez de débouchésVous faites face à une baisse des dons ?Non, au contraire. Ce qui nous bloque, c’est le manque de débouchés. Les gens donnent toujours autant. Nous avons ici à Puy-Guillaume, qui proviennent de tout le département, entre 600 et 700 tonnes de vêtements en attente. Alors collecter pour collecter, à quoi ça sert ?En prime, vous faites face à des containers régulièrement vandalisés ?Oui. Nous en avons eu jusqu’à 300 installés dans tout le département, et petit à petit, nous les retirons car ils sont soit vandalisés gratuitement, soit vandalisés pour voler leur contenu. Les personnes éparpillent les vêtements partout, et après on nous accuse nous, mais nous n’y sommes pour rien. Et ce n’est ni le rôle de la police municipale, ni le nôtre, de gérer ça.Mais il y a un vrai besoin de collecte.Bien sûr, les mairies nous appellent très régulièrement, mais nous sommes bloqués.On collecte les vêtements gratuitement, et après on les revend.
Sauf qu’aujourd’hui, nous ne revendons plus rien. Encore cette semaine, trois camions de 20 tonnes devaient venir, et finalement ils ont annulé parce que, eux non plus, ils ne savent pas quoi en faire.
La revente en direct ne fonctionne pas ?Si, nos trois boutiques fonctionnent très bien, mais cela représente entre 20 et 30 % de l’ensemble des vêtements que l’on collecte. Et puis c’est comme dans nos armoires, il y a des vêtements que personne ne veut.
Il faut trouver quoi en faire. Et aujourd’hui, en France, à ma connaissance, malgré nos recherches, il n’y a pas de solution. Il faut créer un circuit de recyclage.Aucun projet ne se profile ?Si, le Valtom a demandé de faire une étude pour mettre sur pied un centre de tri. Mais le projet ne verra peut-être pas le jour avant quatre ans, et on ne résistera pas jusque-là. Car il faut bien avoir à l’esprit que Emmaüs ne dépend de personne, nous n’avons aucune aide, aucune subvention. Tout ce que nous gagnons, c’est en travaillant, et cela permet de faire vivre 50 personnes ici, qui n’ont nulle part où aller. La collecte est gratuite, si on ne peut pas revendre ensuite, nous ne pouvons plus collecter.Propos recueillis Par Sarah Douvizy