Pétrole et imprudence, un coktail explosif dont la Grande-Rue de Guéret se souvient
Elle provenait de la cave de M. Villatte, ferblantier-lampiste, au numéro 27, dont elle avait déchiqueté la porte, les éclats de bois brisant les devantures des boutiques d’en face.
Le premier moment d’émotion passé, les voisins se précipitaient vers la cave, où ils trouvaient l’artisan et son apprenti gisant au milieu d’une nappe de pétrole enflammée. Ils les amenaient aussitôt à la pharmacie Florent, où les docteurs Gomot et Byasson leur donnaient les premiers soins. Villate portait de graves brûlures au visage, aux mains et aux jambes ; son apprenti, Léon Rogat, était également brûlé au visage.
Pendant ce temps, d’autres voisins s’efforçaient d’éteindre les flammes… avec de l’eau, risquant ainsi de propager l’incendie. Heureusement, d’autres personnes plus avisées jetaient du sable sur le liquide en feu, étouffant ainsi les flammes.
Le souffle de l’explosion avait soulevé d’une seule pièce la voûte de la cave, retombée à peu près en place mais provoquant d’énormes fissures dans les murs que l’on étaya.
Si la devanture et la façade de la maison, côté rue avaient peu souffert, il n’en était pas de même sur le côté cour, encombré par les débris des fenêtres de tous les étages arrachées de leurs gonds ; à l’intérieur, un escalier en bois menant au premier étage était descellé ; dans le magasin, des objets en fonte étaient cassés. Les fenêtres des maisons voisines avaient perdu leurs carreaux et subi d’autres dommages.
Heureusement, le feu ne s’était pas communiqué aux cinq ou six fûts de pétrole entreposés dans la cave. C’est d’ailleurs en voulant tirer du pétrole en s’éclairant avec une bougie que le ferblantier provoqua l’explosion. Les victimes gardèrent sans doute les marques de cette fatale imprudence.
Rendant compte de cet accident, le journal Le Courrier de la Creuse, demandait que les règlements interdisant les dépôts de pétrole en ville soient respectés. D’ailleurs, quelques jours plus tard, le préfet de la Creuse, M. Dumonteil, constatant que les règlements concernant l’emmagasinage et la vente des huiles de pétrole et de schiste, essence et autres hydrocarbures, étaient inexécutés dans un grand nombre de communes, adressait à tous les maires du département une circulaire les invitant à veiller à ce que tous les entrepositaires et vendeurs de matières dangereuses, se conforment au règlement du 19 mai 1873.