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Сентябрь
2024

Le procès des viols de Mazan, pourrait être celui de "bons pères de famille"

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Évoquant le procès de Dominique Pelicot et de ses 51 coaccusés, du « silence assourdissant » de la classe politique, ordinairement si prompte à instrumentaliser l’émotion, l’essayiste Rose Lamy (*) voit se dessiner « un boulevard pour les féministes ». « C’est un procès qui va contre la novation habituelle et qui doit déranger ». Pourtant, pour l’Instagrameuse, à l’origine de Préparez-vous pour la bagarre, « il est impossible soit de se taire soit de ne pas soutenir » une victime violée, objetisée par son mari, pendant dix ans, par des dizaines d’inconnus. Face l’absence presque totale de parole publique, l’autrice pointe cependant « un grand retentissement auprès de l’opinion ». Sans doute qu’il y a « un peu de sensasionnalisme » mais « la population semble ébranlée ». Même si, interviewé par la BBC, « le maire de Mazan », rappelle Rose Lamy, « a déclaré qu’il n’y avait pas mort d’homme, que cela ne touchait pas des enfants… ». Tandis que le média britannique s’étonnait, que « la France en soit encore là », l’élu de 74 ans, a fini par « présenter ses excuses, notamment aux femmes blessées par la maladresse de certains mots prononcés sous la pression au micro d’un média étranger »

"Ce ne sont pas des marginaux"

Pour sordide qu’il soit, le contexte judiciaire est de ceux qui vont permettre « d’amener la politisation du sujet » espère l’experte. « Cela fait des années, qu’il y a des féministes, des chercheuses qui nous expliquent qu’il n’y a pas de profil des hommes violents et là, on a une affaire qui en fait la démonstration magistrale ».Le procès de viols de Mazan « ne doit pas être une aberration dont on ne tire aucune conséquence. C’est quelque chose de très profond qui se joue ».Synthétiser cette douloureuse affaire derrière l’intitulé « procès de Mazan », Rose Lamy n’y voit pas la volonté de diluer la responsabilité humaine mais plutôt « d’aller plus loin en visant une communauté » inscrite dans d’un paysage ordinaire.

"La violence vient souvent de l'intérieur"

Parce qu’au fond, c’est de cela dont il est question, de cette violence qui n’est pas celle des monstres identifiés comme tels mais qui est commise par le citoyen lambda.  « Dans le récit des violences sexuelles, on raconte une histoire et on pense que ce sont des éléments perturbateurs extérieurs qui arrivent pour troubler la paix » des couples, des familles. Or, poursuit l’essayiste, « la violence vient souvent de l’intérieur mais cela ne veut pas dire que derrière chaque homme il y a un monstre ».Au soutien de son propos, les statistiques du ministère de l’Intérieur qui, en France, pointent « les 45 interventions par heure de la police pour violences intrafamiliales. Et il n’y a pas un jour qui se passe sans intervention du RAID ou du GIGN pour sauver des femmes ou des enfants séquestrés » note Rose Lamy.Ces hommes-là qui sévissent dans la cellule familiale, « ce ne sont pas des marginaux ou des rôdeurs de parking, ce sont des conjoints, des pères ». Potentiellement, « des bons pères de famille » dont l’image extérieure est semblable à celle que renvoyait Dominique Pelicot.

Si #MeToo n’a pas encore poursuivi cette trace-là « l’histoire nous dira si ce procès » peut ouvrir l’exploration de ces violences intrafamiliales au-delà des cas des hommes célèbres. « Peut-être que c’est celui-là, le procès #MeToo qu’en France on attendait car il est spectaculaire et porte sur le profil de Monsieur Toulemonde ».

Sophie Leclanchésophie.leclanche@centrefrance.com