Aurélien Bellanger : “Cela m’aurait paru fou de n’avoir aucune attaque”
Dans la presse, du JDD au Figaro ou à L’Express, mais aussi sur les réseaux sociaux, ton roman, Les Derniers jours du Parti socialiste, a reçu de nombreuses attaques, souvent assez violentes, ces dernières semaines. Est-ce qu’elles t’ont blessé ?
Aurélien Bellanger – Alors bizarrement pas du tout. J’évite en général de taper mon nom sur Twitter, de peur d’assister à des désaveux déprimants, mais là rien ne m’a atteint. Mon exploration : mes ennemis, sur ce coup, sont des mort-vivants de la pensée, qui déroulent des éléments de langage venus d’un autre temps, qui ne pensent plus depuis longtemps, ou qui ont remplacé la théorie par la défense exclusive de leurs positions médiatiques.
T’attendais-tu à ce tir groupé d’attaques contre toi ?
Cela m’aurait paru fou d’avoir aucune attaque. Limite vexant. Mais ils étaient heureusement incapables de cette intelligence tactique. Je note le silence de l’un d’eux, mais je suis prêt à parier qu’il prépare un livre de 60 pages qui s’appellera Freluquet, ou un truc dans le genre.
Où situes-tu l’outrance dans ces polémiques ? Dans ces réactions violentes, ou dans ton roman lui-même ?
Je suis techniquement l’agresseur, sur ce coup. Sauf à considérer que je n’ai fait que réagir à un affront bien supérieur, à des positions philosophiques et politiques honteuses, plus encore, à une mise en scène outrageusement caricaturale du débat d’idées par ceux qui se fantasment du cercle de la raison ou du centre de l’arc républicain.
Comment analyses-tu ces critiques acerbes ? Comme le signe d’une réaction des personnalités proches des idées du Printemps républicain ? Ou comme des critiques plus esthétiques, qui renvoient à une autre tradition littéraire que la tienne ?
Il y a eu, au milieu de tout cela des tentatives plus sérieuses pour dévaluer mon roman sur le seul plan littéraire. En y trouvant des maladresses ou des ambiguïtés. Sans me faire crédit jamais qu’elles puissent avoir été volontaires… Si j’ai mis, parmi mes personnages, un romancier qui me ressemble, c’est pour, justement, ne pas me mettre spécialement en position d’arbitre du bon goût intellectuel et rentrer véritablement dans l’arène esthétique. J’ai une égale horreur des romanciers de la nuance, posture post-moderne assez creuse, et des donneurs de leçons. J’ai essayé de décrire plutôt de l’intérieur la tour d’ivoire quand elle est sur le point de vaciller. La situation politique, assez grave, exige ce genre de mises en danger …
propos recueillis par Jean-Marie Durand
Les Derniers jours du Parti socialiste d’Aurélien Bellanger, Seuil, 23 €