Le Faux Martel à Thiers, domaine restructuré en 1662, participe pour la première fois aux Journées européennes du patrimoine
Sur le plateau qui domine la ville de Thiers et la Limagne, le domaine du Faux Martel, à 650 mètres d’altitude, traverse les siècles entre les champs, la forêt, la vue et le ciel. Autour du paisible jardin, s’élèvent une grande maison en pierre avec une tour et des colombages, d’autres édifices anciens et aussi une chapelle… Une propriété qui va participer, pour la première fois, aux Journées européennes du patrimoine.
Ce domaine, c’est Alain Néron et sa femme qui l’ont sauvé de la décrépitude. Ce sont ses arrières arrières grands-parents, agriculteurs originaires de la Montagne thiernoise, qui l’avaient acheté. À l’époque, il faisait 80 hectares. De succession en succession, la propriété a été morcelée et Alain Néron n’avait hérité que d’une petite partie. "Quand ma mère a disparu, on s’est dit : qu’est-ce qu’on fait de tous ces bâtiments ? J’aimais bien cet endroit. Cela me faisait mal au cœur de voir que tout s’effondrait, confie-t-il. J’ai racheté à des cousins, aux Domaines, etc. Ça a été long."
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L’idée : créer sur la partie haute du village des gîtes, pour faire découvrir ce patrimoine à des visiteurs et pouvoir financer les travaux et l’entretien. Depuis sept ans environ, trois gîtes ont ouvert, pouvant héberger jusqu’à 17 personnes. (En contrebas, subsiste une ferme possédée par un cousin d’Alain Néron.)
Restructuré en 1662C’est une nouvelle vie pour ces "vieilles" pierres. Si anciennes que leur date est imprécise. "Le domaine a été restructuré en 1662. Je dis “restructuré” parce qu’il y avait des choses avant, c’est sûr, livre-t-il. Dans un terrier (*) de Thiers, en 1477, deux habitants du Faux Martel déclarent déjà des revenus." Le propriétaire a remarqué d’autres indices qui lui laissent penser que ses biens sont antérieurs au XVIIe siècle : certaines poutres grossièrement taillées ou un souterrain effondré qui part vers un lieu inconnu…
La maison de maître a été la première à devenir un gîte. Depuis 2017-2018, les vacanciers peuvent profiter de ce patrimoine réhabilité. Dans la cuisine par exemple, demeurent des boiseries et une cheminée d’époque, du XVIIe. Dans la tour, s’élève un escalier à vis en bois massif. Le gîte de la Tour peut accueillir cinq personnes. Cette tour, c’est elle qui donne un petit air de château aux lieux. "C’est un marqueur d’une certaine aisance. Mais le Faux Martel était un “domaine” plus par sa superficie que par la richesse des bâtiments", analyse le retraité.
À côté, "La guinguette" est un petit gîte pour quatre. Ce nom fait référence à la jeunesse du propriétaire, quand il venait au Faux Martel chez ses grands-parents.
Quand j’étais gamin avec mes frères, des copains et des copines, on venait squatter ici, on y faisait des boums. Alors ma mère appelait ça “la guinguette”.
Refuge LPOLe troisième gîte, dit "Des trois cousins", pour huit personnes, a été aménagé en 2021 dans des anciennes écuries dont les toits étaient effondrés. Alain Néron, qui était par le passé adjoint en charge de l’environnement à la Ville de Thiers, en a fait un écogîte. "C’est un label Gîte de France qui est très exigeant", souligne-t-il. Le jardin est par ailleurs classé refuge par la LPO pour la protection des oiseaux. "On laisse des haies et des îlots de biodiversité, pour qu’ils puissent nicher", détaille-t-il.
La petite chapelle, qui avait beaucoup souffert, a été restaurée il y a deux ans. Elle arbore à nouveau au-dessus de la porte l’inscription "Temple de l’enfant Jésus" et l’année 1662. Avant, il y avait à l’intérieur un four à pain, écroulé. "À un moment, ils ont dû considérer que les nourritures terrestres étaient plus intéressantes", sourit Alain Néron. Pour ne pas complètement perdre ce pan de l’histoire, il a réutilisé les briques du four pour refaire le sol de la chapelle.
Autant d’anecdotes que lui et l’une de ses filles partageront aux visiteurs lors des Journées européennes du patrimoine.
(*) Un terrier est un registre.
logis abbatial du Moutier.
Pour élaborer un programme participatif, la municipalité a aussi cherché à s’entourer d’associations. Les Amis du patrimoine thiernois, qui ont mené de nombreux chantiers de rénovation et défrichage dans les lieux-dits, ont créé trois itinéraires de randonnée à la découverte des villages, du petit et du grand patrimoine. "Cela permettra aussi de mettre en avant le travail de l’association", souligne Pierre Contie.
Trois parcours périphériques qui compléteront l’offre de rallye pédestre, concoctée par "Bon pied, bon œil", cette fois en centre-ville.
Le programme complet des JEP est à retrouver ici.
Alice Chevrier