Léane Morceau (CAPO Limoges) a réussi à trouver les codes pour disputer ses premiers Jeux paralympiques à 21 ans
Ne nous ne méprenons pas. Léane Morceau, 21 ans, est Poitevine et fière de l’être. Pourtant, tout a changé pour elle lorsqu’elle a débarqué à Limoges, en septembre 2021, où des installations, un club, des entraîneurs, un encadrement et un cadre lui ont permis de disputer aujourd’hui ses premiers Jeux paralympiques.
Avant de poser les pieds en Limousin, la jeune femme n’est qu’un potentiel. Adepte de la natation estivale (elle nageait d’avril à octobre au Club Nautique Neuvillois), elle découvre le milieu handisport tardivement. En 2019. Huit ans après l’apparition de son handicap (neuropathie optique de Leber) qui a nettement réduit son champ visuel (elle ne voit que de manière tubulaire).
« Une personne de mon club, qui faisait de la natation adaptée, m’a emmenée sur une compétition », se souvient-elle. Tout s’enchaîne alors. Un stage de jeunes à potentiel. L’intégration au Centre Fédéral Handisport l’année suivante. Puis une année en sports études à Talence.
« C'était un diamant brut à tailler »La bachelière décide alors de s’installer à Limoges. D’abord pour ses études : « J’ai toujours voulu travailler dans le médical ou paramédical. Étant donné ma pathologie, les possibilités étaient restreintes. L’école de kiné pour malvoyants de Limoges est apparue comme la formation idéale. Beaucoup de kinés déficients visuels sont réputés pour leur dextérité ».
Le milieu handisport la met en contact avec le CAPO Limoges qui possède une section de natation adaptée. Ancien nageur international, Benoit Monpion l’intègre à son groupe de nageurs valides. « C’était une nana avec beaucoup de qualités. Elle avait une marge de progression importante car elle nageait techniquement très bien », constate le coach. Il résume : « C’était un diamant brut à tailler ».
Or, le technicien peine à polir son bijou. « Elle n’avait pas les codes, explique le Limougeaud. Elle est issue de la natation estivale, elle pensait que nager une fois par jour suffisait. En natation, même si t’es hyper douée, il faut passer des heures dans l’eau, plusieurs fois par jour, tôt le matin, tard le soir ».
« Cette fille a du caractère »L’intéressée n’arrive pas à jongler entre ses études de kiné et ses entraînements. « Nous n’avons pas assez communiqué, rembobine-t-elle. La ville, la fac, les séances : cela faisait beaucoup de changements d’un coup ». Léane change d’entraîneur, lève le pied et termine quatrième du 100 m dos des championnats du monde à l’été 2022. Cela ne lui suffit pas.
« Elle m’a appelé pour m’annoncer qu’elle voulait revenir dans le groupe, raconte Benoit Monpion. Je me suis dit : cette fille a du caractère, elle en veut ». À l’été 2023, elle croque dans une nouvelle médaille en chocolat aux championnats du monde. Mais, il y a du mieux : le chrono descend, compétition après compétition. Jusqu’à ce vendredi 7 juin 2024, lors des World Series, à L’Aquapolis, à deux pas de son appartement limougeaud.
Lors de la compétition de la dernière chance, elle réalise les minima A pour les Jeux Paralympiques. Deux fois. En séries (1’12”07) et en finale (1’12”47). Elle sortait de trois semaines d’entraînement intensif… « Avec les années, elle a gagné en expérience, étaye son entraîneur. Elle a compris et accepter d’encaisser des charges d’entraînement ».
Cet été, elle a de nouveau eu droit à ces séries qui font peur, qui font mal. Au corps et à la tête. Souffrir pour briller aux Jeux. « J’ai encore du mal à réaliser », affirmait-elle mi-juillet.
Si son entraîneur pense qu’un podium est à sa portée – « la médaille de bronze voire d’argent sont jouables, le public français peut la pousser à se sublimer » –, la nageuse du CAPO Limoges est plus mesurée. Par modestie ou pour ne pas se mettre la pression?? Réponse aujourd’hui…
Kevin Cao Kevin.cao@centrefrance.com