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Август
2024

Destitution de Macron : pourquoi la menace de LFI ne fait pas trembler l'exécutif

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"Démettre plutôt que se soumettre". Depuis dimanche, La France Insoumise (LFI) appelle à lancer une procédure de destitution contre Emmanuel Macron, responsable selon elle d’un "coup de force institutionnel". Dans une tribune publiée dans La Tribune dimanche ce 18 août, les leaders du mouvement reprochent au chef de l’Etat de refuser "de prendre acte" du résultat du vote des élections législatives le 7 juillet, où le Nouveau front populaire (NFP) est arrivé en tête. Ceux-ci invoquent alors l’article 68 de la Constitution, qui permet au Parlement de destituer le président pour "manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec l’exercice de son mandat". Une demande qui n’a pas laissé leurs alliés indifférents, plusieurs membres du NFP, comme le patron du PS Olivier Faure, s’étant désolidarisé sur X.

Au-delà de cette divergence tactique, l’article 68 de la Constitution est surtout difficile à mettre en œuvre, et a peu de chances de faire trembler la Macronie et l'exécutif. Dans un premier temps, les élus à l’initiative de cette procédure devront convaincre l’Assemblée et le Sénat de se constituer en "Haute cour". Ce qui passe par une proposition de résolution qui doit être successivement validée par le Bureau de l’Assemblée (le NFP y dispose d’au moins 12 voix sur 22), puis adoptée en commission des lois et dans l’hémicycle, à une majorité des deux tiers. Un parcours similaire doit ensuite être effectué au Sénat, à majorité de droite.

Une procédure très improbable

Mais si La France insoumise, qui compte 72 députés, peut a priori déposer seule sa résolution à l’Assemblée nationale (il faut 1/10e des 577 députés), mettre d’accord 2/3 des députés, soit 384 parlementaires, semble difficile. Dans l’hypothèse - morte dans l’œuf après le refus du PS de soutenir cette procédure de destitution - où tous les députés NFP votaient pour, ils ne seraient que 151. Et même dans le cas où la Haute Cour se constitue, la destitution du président de la République doit être votée elle aussi par la majorité des deux tiers de ses membres (soit 617 parlementaires sur 925). Très improbable, donc, au vu des rapports de force au sein des deux chambres parlementaires. "Nous estimons que c’est aux chefs des partis de notre coalition et aux présidences de nos groupes parlementaires d’en débattre et de prendre respectivement leur décision", a toutefois défendu LFI. Dans cette perspective, la cheffe des écologistes Marine Tondelier, également interrogée par La Tribune, a éludé : "Je n’ose imaginer qu’Emmanuel Macron ne nomme pas Lucie Castets. En tout cas, mon énergie et celle des Ecologistes sont prioritairement employées à ce qu’il le fasse."

Depuis son entrée en vigueur en France, l’article 68 n’a été utilisé qu’une seule fois. En 2016, des députés Les Républicains (LR) avaient lancé une procédure de destitution à l’encontre de François Hollande en raison de révélations et de confidences classées secret-défense faites dans le livre des journalistes du Monde Gérard Davet et Fabrice Lhomme, Un président ne devrait pas dire ça… (Stock, 2016). La proposition avait été rejetée dès son examen par le bureau de l’Assemblée. Ce vendredi 23 août, Emmanuel Macron recevra les responsables politiques, dont les dirigeants du NFP, avec leur candidate désignée pour Matignon, Lucie Castets. Nul doute que cet appel à la destitution fera partie de la discussion.