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Август
2024

Sports collectifs : comment la réussite des équipes de France à Tokyo s’est prolongée jusqu’aux JO de Paris 2024

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Si les 33es Jeux olympiques ne sont pas terminés, les phases finales des tournois des sports collectifs s’avancent vers leur dénouement. Et le constat pour les équipes de France peut déjà se dessiner dans les disciplines collectives, puisque certaines ont une médaille autour du cou et d’autres s’en rapprochent progressivement. Au 9 août, le bilan affiche six breloques (l’or pour le rugby à VII, l’argent pour le basket 3x3 masculin, un métal à déterminer en finale pour le football, le hand féminin, le basket et le volley masculin) et pourrait s’élever à sept grâce aux basketteuses, en lice aujourd’hui contre la Belgique.

C’est déjà autant que le total enregistré à Tokyo. Un résultat exceptionnel : trois titres pour le handball et le volley, deux médailles d’argent pour le rugby féminin et le basket masculin, ainsi que le bronze pour les basketteuses. C’était autant, en une seule édition, que le total cumulé depuis le début du siècle et les JO de Sydney (une en 2000, une en 2008, deux en 2012 et autant en 2016), et cela avait enchanté le ministre de l’Éducation nationale de l’époque, Jean-Michel Blanquer, qui avait associé sur les réseaux sociaux les professeurs d’EPS à cette réussite inédite, avant de se faire reprendre de volée par les basketteurs Vincent Poirier et Evan Fournier…

 

Pourtant, l’olympisme tricolore a longtemps tourné autour des sports individuels. « Lorsqu’on débarque avec les Barjots à Barcelone, en 1992, et qu’on prend le bronze, on est en décalage complet », se souvient Philippe Bana, président de la Fédération française de hand après avoir été directeur technique national (DTN) de 1999 à 2020. « Cela a été le point de départ de la professionnalisation massive des sports co, et notamment du basket, du hand et du volley, à la fin des années 90. Depuis, il y a eu une réelle montée en régime. Il y a vingt ans c’était artisanal. Depuis, les staffs sont passés de trois ou quatre personnes à quinze, toutes expertes dans leur domaine et les fédés savent aussi, désormais, gérer le haut niveau avec réussite. Nous, nos sélectionnés portent le maillot bleu 60 à 100 jours par an », ajoute-t-il.

« On sait que ces sports-là ne vivent pas que par le prisme de l’Olympisme, mais ils sont tout aussi olympiques », soutient Jacques Monclar, l’une des voix du basket en France. « LeBron James ne vient pas pour prendre des sous, Steph Curry non plus et nos joueurs non plus. »

Une architecture efficiente

La science de la formation. « On a des structures fédérales qui développent des jeunes, des pôles, des clubs et des bénévoles, des coachs qui travaillent et des joueurs qui jouent partout dans le monde », rappelle Jacques Monclar. « C’est le deuxième grand facteur de réussite : grâce aux lois Buffet et Lamour, dans les années 2000, sur le financement des centres, l’architecture de la formation française est devenue la meilleure au monde. Elle est exemplaire, et son modèle économique aussi », corrobore Philippe Bana.

Ces phénomènes conjugués, on peut figurer dans le top 8 mondial quasi systématiquement. Le “BHV” français fabrique les meilleurs joueurs du monde. Et les “nouveaux”, comme le rugby à VII ou le basket 3x3, ont fait un copier-coller de ce système d’encadrement.

Des stars et des joueurs rodés à l’excellence

« Nos jeunes s’expérimentent au plus haut niveau avant de s’exporter et de continuer à progresser », soutient Philippe Bana. Et c’est vrai : aujourd’hui par exemple, les équipes de France de hand s’appuient sur des filles et des gars qui évoluent partout en Europe, dans les plus grands clubs. Idem au volley. Au basket, huit des douze Français ont connu la NBA. Un seul, Matthew Strazel, n’a jamais disputé un championnat étranger, mais il a joué en Euroligue, comme la plupart de ses équipiers.

L’avantage de jouer « à la maison »

« On a été portés par un truc, c’est sûr, mais je ne saurais pas dire quoi », a reconnu le central, Nicolas Le Goff, après la victoire des volleyeurs, mercredi, face à l’Italie en demi-finale. Peut-être était-ce ce fameux « home advantage », l’avantage de disputer des Jeux dans son pays. Un phénomène étudié de près qui naît à la fois du soutien populaire du public, d’un plus grand investissement des acteurs locaux (politiques, sportifs, fédérations), d’une recherche accrue de performance pour briller « à la maison », d’une connaissance parfaite de l’environnement et du contexte de la compétition.

Les handballeurs, les poloïstes ou les rugbywomen, candidats déclarés à podium au vu de leurs récents résultats, vous diront que cela ne marche pas toujours. Les volleyeuses et les équipes de France de hockey sur gazon ajouteront que cela ne génère pas de miracle.

La disparition du verrou psychologique

Les victoires, dit-on, appellent les victoires. Le premier titre fait souvent office de déclic qui permet de franchir plus facilement, ensuite, les temps plus difficiles. L’exemple des volleyeurs est frappant : mal engagés dans la Ligue mondiale en juin, ils ont trouvé les ressources pour la remporter et trouver la confiance dont ils avaient besoin pour ces Jeux. Comme en alpinisme, une fois que la voie est tracée, il ne reste qu’à la suivre.

Des absences qui comptent

Il n’est pas question de dénigrer les résultats des collectifs français, mais le contexte olympique a aussi une incidence, plus ou moins marquée. Elle est prégnante à Paris, avec l’exclusion de la Russie du paysage sportif, un adversaire que les handballeuses et les volleyeurs avaient affronté en finale. Le principe d’universalité des tournois et les modalités de participation aussi ont un léger impact. Pays hôte, la France est engagée partout. Dans plusieurs disciplines, des nations fortes comme l’Angleterre en rugby, l’Allemagne ou l’Italie en foot et la Slovénie de Luka Doncic en basket, n’ont pas franchi l’écueil de la qualification.

Sébastien Devaur