L'église Notre-Dame-des-Malades de Vichy se refait une santé, et une beauté
Son étonnant clocher en béton, surmonté d’une croix vitrée, domine les toits du vieux Vichy. On l’appelle souvent Saint-Blaise, à tort : l’emblématique église de la cité thermale porte en réalité le nom de la statue qui trône au sommet de son dôme de cuivre : Notre-Dame-des-Malades.
L’édifice religieux, construit sur les vestiges d’une chapelle du XIIe siècle, est en fait composé d’un ensemble de trois bâtiments accolés : l’église Saint-Blaise, la plus ancienne, achevée au XVIe siècle ; son extension Notre-Dame-des-Malades, érigée entre 1925 et 1931, et dont le clocher a dû attendre l’après-guerre pour être finalisé, en 1956 ; et enfin l’annexe, bâtie en même temps que Notre-Dame-des-Malades, abritant une église orthodoxe. Chaque espace dispose de son accès extérieur, mais l’ensemble communique par l’intérieur. Et surtout, par le haut. C’est d’ailleurs là que tout se joue, durant cette première phase de rénovation entammée à l’automne, et qui s’achèvera en fin d’année.L'église porte le nom de la statue qui surplombe son dôme de cuivre : Notre-Dame-des-Malades.
Une valeur patrimoniale remarquableCamille Jacquemin et Virginie Ravoux-Imbert sont les architectes du patrimoine en charge du chantier. Cette dernière est intarrissable sur le sujet, depuis qu’elle s’est découvert une passion pour l’édifice en l’étudiant. « À la fin de notre diagnostic, on s’est dit “c’est un bijou !” Sur Vichy, c’est vraiment quelque chose d’incroyable. »
Deux aspects, en particulier, lui confèrent une valeur patrimoniale remarquable, à l’origine de son inscription aux monuments historiques : « l’ensemble des décors de la nef et du choeur, qui font partie d’une oeuvre d’art totale réalisée par les ateliers d’artistes Mauméjean, et les bétons armés utilisés pour la construction. »Les bétons ont subi d'importants dégâts.
Première découverte durant ce diagnostic : les couleurs, actuellement sombres, de la fresque grandiose qui recouvre l’intérieur de l’église, ne sont pas censées l’être. Si la restauration de la fresque n’est pas prévue avant la deuxième phase des travaux, des tests de nettoyage laissent déjà apparaître la clarté des teintes initiales.
On s’est aperçues que les peintures étaient remplies de moisissures, à cause de l’humidité. Mais à l’origine, les couleurs étaient vives, c’était d’ailleurs typique à l’époque !
Des tests de restauration laissent apparaître la couleur d'origine, beaucoup plus lumineuse, des peintures.
Mais c’est au-dessus de cette fresque qu’il faut grimper pour prendre la mesure du chantier en cours. « On a réalisé qu’il y avait de gros problèmes d’infiltration d’eau sur le toit en ardoise de ND des Malades, au niveau des jonctions entre les différents bâtiments, et des toits terrasses qui se trouvent de part et d’autre du toit de la nef. » Et qui dit humidité dans le béton armé, dit armatures qui gonflent, et béton qui explose... Avant de tomber en morceaux sur la chaussée. « L’objectif de cette première phase, c’est donc la mise en sécurité, et en accessibilité du site. Avec des questions techniques, comme comment retoucher l’étanchéité bitumeuse en 2024, quand on veut éviter les matériaux polluants. »
Le béton, à la mode de l’époquePremière urgence, donc, recouvrir complètement les toits en ardoise des bâtiments : une opération bientôt terminée, malgré la pluie incessante des derniers mois. « Les entreprises ont vraiment joué le jeu, elles ont mis du monde sur le chantier, apprécie l’architecte. Toute l’ardoise a été changée sur Saint-Blaise et son clocher, ainsi qu’une partie de la charpente, et plus de la moitié du toit de ND des malades est achevée. »La couverture du toit en ardoise est quasiment terminée.
Terminée également, la purge et la consolidation des façades en béton qui s’effritaient. « C’était le matériau de l’époque, et comme les architectes d’aujourd’hui, tout ce qui était nouveau, ils l’utilisaient ! C’était l’effervescence. » Une mode largement déployée par Auguste Perret, l’architecte dont se sont inspirés les concepteurs locaux de ND des Malades, Chanet et Liogier.
Ces derniers avaient d’ailleurs prévu une petite innovation, qui n’avait pu être mise en place au moment de la construction de l’édifice, sans doute pour des raisons budgétaires... Mais qui va finalement voir le jour, près d’un siècle plus tard. « Nous allons créer un ascenseur dans le clocher, explique Virginie Ravoux-Imbert. Cela va nous permettre la mise en accessibilité de l’édifice, dernière priorité de cette première phase de travaux. »Un ascenseur est en cours de création dans le clocher, pour accéder à l’église par la crypte.
Prévue pour durer une quinzaine d’années, la rénovation de cette inestimable triple église est chiffrée à 3,4 millions d’euros TTC. Elle reste accessible aux visiteurs durant le chantier.
La crème du savoir-faire localParmi les entreprises mobilisées dans cette première phase de travaux de l’ensemble des bâtiments de Notre-Dame-des-Malades, certaines le sont également sur de prestigieux chantiers, comme celui de Notre-Dame-de-Paris, ou du chateau de Versailles. C’est dire le niveau d’expertise et de savoir-faire des artisans retenus à Vichy. « Toutes les entreprises qui interviennent sont spécialisées dans la rénovation des monuments historiques, précise Virginie Ramoux-Imbert, architecte du chantier. C’est un énorme travail de coordination, et nous avons vraiment bien choisi les entreprises ! » Sur les douze structures sollicitées à Saint-Blaise, cinq sont situées dans la région, et six sont vichyssoises. Charlotte Benoît, 1ère adjointe au maire déléguée aux travaux ; Julien Plasse, responsable d'exploitation pour l'entreprise Bourgeois ; Virginie Ravoux-Imbert, architecte du patrimoine en charge du chantier
Texte Sandrine Gras
Photos François-Xavier Gutton