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Июль
2024

Comment les records du monde d'athlétisme et de natation ont évolué en 100 ans et pourquoi ils ont fait un bond en avant

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À table : « Un petit truc en plus »

Les sportifs s’intéressent au contenu de leur assiette, « depuis pas si longtemps », note le diététicien nutritionniste David Padaré. « Ça date vraiment des années 1970-1980. Les États-Unis et le Canada étaient en pointe de ce côté-là. Le cyclisme et la musculation s’y sont intéressés assez tôt, les sports les plus riches comme le football ont suivi. Tous les gros clubs ont un nutritionniste à présent », constate le spécialiste installé à Orléans. Une alimentation bien pensée ne transforme évidemment pas un âne en cheval de course, mais « à talent égal, ça donne un petit truc en plus », estime-t-il.

Et au fait, en 2024, c’est quoi une bonne alimentation pour un sportif ? Le plat de pâtes règne-t-il toujours en maître à la cantine des champions ? Pas forcément. « Le blé qu’on utilise pour la fabrication des pâtes est de moins bonne qualité qu’auparavant, car sa formule génétique a été beaucoup transformée et il est moins bien digéré par beaucoup de personnes. On voit ainsi de nombreux sportifs consulter pour des syndromes de côlon irritable », indique David Padaré. Il observe également une forte tendance au véganisme chez certains athlètes, dans le milieu du trail notamment, et au régime sans gluten, popularisé par des stars du sport mondial, comme le tennisman Novak Djokovic.

Raphaël Coquel

Au sol : trois changements majeurs

Trois évolutions majeures ont marqué les équipements sportifs. La principale a été le passage des pistes en cendrée à des pistes en EPDM (un caoutchouc synthétique dont la marque la plus connue est Tartan, le nom qui lui est souvent donné). Elles offrent un effet de rebond plus important, qui permet davantage de vitesse. Ces changements, à la fin des années 1960 (la première utilisation sur des Jeux olympiques remonte à 1968), ont bouleversé les chronos. Les autres révolutions viennent de l’arrivée du carbone dans les javelots (à la place de l’aluminium) et les perches (à la place de la fibre de verre).

« Pour le reste, c’est plutôt la performance qui nous fait transformer les produits que l’inverse », explique Charly Martinez, co-fondateur de La Fabrique du Sport, entreprise lyonnaise spécialisée dans la fabrication d’équipements sportifs. Par exemple, l’évolution du record du monde du saut à la perche a entraîné une modification de la hauteur des poteaux de perche. « Il y a quelques années, ils faisaient 6,25 m. Désormais, ils font 6,50 m », indique Charly Martinez. Idem sur les dimensions des tapis, avec des athlètes arrivant de plus en plus vite. Pour lui, les autres principaux changements sur les équipements sont avant tout pour le confort et l’entretien des équipements. « Typiquement, on a fait un cercle de lancer drainant pour évacuer l’eau, ce qui permet d’avoir un sol toujours sec », illustre le co-fondateur de La Fabrique du sport.

Ludovic Aurégan

Au pied : un avant et un après 2019

Le 12 octobre 2019, dans une opération promotionnelle pour un célèbre équipementier, Eliud Kipchoge brise la barrière des 2 heures sur marathon. L’effervescence bat son plein autour des « chaussures carbones ». Dans les faits, cela fait déjà deux ou trois ans que ces nouvelles chaussures font des merveilles sur la route. Sur la piste, cela remonte au meeting de Monaco, en cette année 2019. « Les années 2020 et 2021 ont été des demi-années, mais en demi-fond, les tout meilleurs étaient au même niveau que les années pleines, analyse Vincent Guyot, ancien doctorant à l’Insep, ayant travaillé sur l’économie de course et donc ces chaussures, et désormais entraîneur international de demi-fond. Depuis, il y a une amélioration très franche. »

Elle se vérifie pour le top 10 français, le top 100 ou le top 1.000. La raison ? Ces chaussures amènent une économie de course. « Les premières études permettent de constater que l’on utilise moins d’oxygène pour la même vitesse donnée », indique Vincent Guyot. Ce gain d’énergie, qui s’observe en fin de course avec une fatigue retardée, est lié à des chaussures à la fois plus épaisses, avec de la mousse, et plus raides, avec la fameuse plaque carbone ou une tige selon les marques. Cette combinaison offre un meilleur rebond au sol. L’appui s’écrase moins, est plus efficace et nécessite donc moins d’énergie. Vincent Guyot estime le gain à une seconde au 800 mètres. Un gain plus difficile à évaluer sur le sprint et encore plus sur les différents concours de saut.

Ludovic Aurégan

Dans la tête : « On a passé un cap »

Au-delà des préparateurs purement physiques ou athlétiques, les sportifs sont de plus en plus accompagnés de préparateurs mentaux. « L’adhésion chez les athlètes est là, c’est évident que l’on a passé un cap. Petit à petit, au niveau structuration, ressources humaines et économiques, les responsables et entraîneurs acceptent et considèrent ce nouveau corps de métier au sein du collectif. C’est vraiment un nouveau membre du staff à gérer », note Virginie Nicaise.

La préparatrice mentale qui suit notamment les équipes de France de basket féminin et de cyclisme sur piste, aborde de multiples thématiques avec ses protégés : « La question centrale, c’est la gestion des émotions, avant, pendant et après la compétition. Cela passe par leur faire apprendre des techniques comme l’imagerie mentale, la respiration, la capacité à anticiper, mettre en place sa stratégie, échanger avec l’entraîneur… » Lors des JO, la (sur) charge mentale est naturellement poussée à son paroxysme : « La singularité des Jeux, c’est la temporalité, avec la question de quotas resserrés pour y participer. Cela génère un surplus de pression bien en amont. Pendant, c’est l’événement qui fait le plus rêver les athlètes, avec une médiatisation bien supérieure. Sans compter la fatigue, l’adversité, le public… C’est vraiment tout un apprentissage », conclut Virginie Nicaise.

Florent Leybros