Comment sortir de notre médiocratie
Après les combines politiciennes sans lendemain, l’heure de la refondation du pays est venue.
La campagne des élections législatives a été le théâtre de combines politiciennes dignes des plus mauvaises heures de la IIIe et de la IVe Républiques au détriment d’une réflexion de fond, objective, sur l’état réel du pays et les voies et moyens de répondre à ses difficultés, à ses défis et aux aspirations de la majorité de sa population. Résultat : une France non seulement sans cap, mais totalement paralysée, incapable même d’assurer la gestion du quotidien sans majorité claire à l’Assemblée nationale.
Nous sommes en médiocratie
Les principaux partis en place ne sont plus des laboratoires d’idées qui présentent aux Français des projets pour le pays élaborés de longue date à l’image de ce qui se passe encore dans la plupart des autres démocraties. Il suffit de regarder leur communication et leurs sites internet pour voir qu’ils se sont mués depuis des années en écuries à individualités, à égos, vraisemblablement du fait de l’inversion du calendrier électoral avec une élection présidentielle qui écrase tout et qui renvoie au second plan le vrai scrutin démocratique, les élections législatives qui décident du cap donné à la nation au-delà de l’incarnation. C’est en quelque sorte un « concours de beauté » permanent. On nous parle déjà de candidats putatifs à l’élection présidentielle, mais pour faire quoi ?
Un projet pour gouverner ne s’improvise pas car une fois aux manettes, c’est un peu comme entrer dans le grand huit d’une fête foraine. Vous ne maîtrisez plus grand-chose, happé que vous êtes par la gestion du quotidien avec ses moult urgences et rebondissements.
Le fonctionnement du pays n’est pas viable et nous amène tout droit aux chaos sans changements en profondeur
Notre « modèle » craquelle de toute part faute de réformes structurelles trop longtemps renvoyées aux calanques grecques. Derrière le théâtre d’ombres de la politique politicienne et ses jeux d’appareils, notre pays s’enfonce dans une crise globale d’ampleur, vraisemblablement la plus importante depuis 1958, qui pourrait se muer en « mai-juin 1940 économique et social », soit un effondrement temporaire si rien n’est fait au cours des mois à venir. La France apparaît encore une fois incapable de réparer le toit par beau temps, en retard d’une réforme et en avance d’une révolte, voire d’une révolution.
Le cœur de nos maux est une mauvaise gestion de l’argent public, de notre argent. Le budget de la France, de nos jours, c’est comme si vous gagnez 3000 € et dépensez 4500 € avec des personnes qui vous prêtent qui sont majoritairement extérieures à votre famille et vos amis, soit qui peuvent vous envoyer l’huissier à chaque instant. Pire, on s’endette pour payer des factures et non simplement pour investir et générer des recettes futures. Si, en face, les services publics étaient de très hauts niveaux, on pourrait se dire que ce sont des avances de trésorerie que l’on récupère en aval par une Ecole, une Santé, une Justice, une Sécurité, etc. performantes. Mais hélas non. Dans tous les classements de l’Union européenne (UE) et de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), la France figure en queue de peloton. Par conséquent, cette mauvaise gestion asphyxie le pays à petit feu, le pouvoir d’achat des Français et les marges de nos TPE-PME-ETI qui emploient 70% des salariés sans pouvoir optimiser via des filiales à l’étranger comme les grands groupes. Selon une étude KPMG de 2019, une PME qui réalise 34 M€ de chiffre d’affaires dégage en France 1 M€ de résultat net (i.e. après impôts) contre 3 M€ en Italie, 4,4 M€ en Allemagne et 5 M€ aux Pays-Bas, pays qui sont loin d’être des enfers sociaux, affichant souvent des indicateurs de prospérité désormais supérieurs aux nôtres. Corollaire, si notre argent public était géré comme dans la plupart des pays de l’UE (on ne parle même pas des meilleurs), sur 100 € versés par l’employeur, 60 € resteraient dans la poche du salarié français contre 47 € aujourd’hui, soit plus de 300 € d’augmentation potentielle pour un salaire net de 2700 €. Le cercle vicieux est enclenché: forts prélèvements obligatoires, perte de compétitivité, faible croissance, chômage de masse, dépenses publiques en hausse, aggravation du déficit et de la dette, hausse des prélèvements, etc.
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Concrètement, si cela continue, c’est le scénario grec qui nous menace, soit une mise sous tutelle du pays par le FMI, l’UE, avec pour conséquence le blocage de tout ou partie de l’épargne des Français (assurance-vie, livrets A, de développement durable, etc.) et une limitation de leurs retraits en banque au quotidien (60€ en Grèce, en 2015) le temps que les comptes publics soient rétablis. En effet, les 6000 Md€ d’économies des Français compensent largement les 3000 Md€ de dette publique avec un cadre juridique (loi Sapin II de 2016) et technique (Haut Conseil de stabilité financière) déjà prêt…
Le nœud gordien du sursaut français consiste donc en une réforme ciblée, puissante et ambitieuse du fonctionnement de la nation
Dans cette période d’incertitude, de troubles à venir, un puissant projet de refondation ne s’improvise pas. Il doit être le fruit d’une longue réflexion, d’une longue maturation à l’image de la situation du pays en 1958 lorsque le général de Gaulle est revenu au pouvoir alors que la France traversait aussi une grande crise politique et économique avec une mise sous tutelle du FMI. Et si le général a pu redresser rapidement la situation, c’est qu’il avait réfléchi bien en amont aux ressorts du sursaut, tant sur le plan constitutionnel depuis au moins le discours de Bayeux de 1946 que, ce qui est moins connu, sur le plan économique avec une troisième voie entre capitalisme et communisme longuement réfléchie, soit un capitalisme à visage humain au service de la grandeur du pays et non un libéralisme transnational purement financier.
Nouvel essor français met sur la table à la disposition de toutes les bonnes volontés un puissant projet de refondation, toute grande nation devant se réinventer tous les 50/100 ans
Ce projet pour la France, élaboré pendant plus de cinq ans de façon collaborative, collective et actualisé depuis par des dizaines de personnes au plus près du terrain, s’articule en trois axes.
Tout d’abord, financer notre modèle social et environnemental de haut niveau et augmenter le pouvoir d’achat des Français en relocalisant la création de richesses dans nos territoires par :
- une baisse massive des prélèvements sur nos TPE/PME/ETI, les plus taxées de l’UE et de l’OCDE, qui emploient 70% des salariés du pays ;
- un alignement des normes qui pèsent sur nos entreprises, y compris le Code du travail, sur le cadre européen en laissant ensuite les partenaires sociaux adapter en toute autonomie ;
- et un gros effort de recherche, les pays les plus dynamiques sur le temps long (Allemagne, Etats-Unis, Corée du Sud par exemple) y consacrant au moins 3,5% de leur PIB contre 2,2% pour la France.
Il s’agit en quelque sorte pour ce premier axe de « faire grossir le gâteau avant de partager les parts ».
Ensuite, il nous faut remettre l’Etat à l’endroit, soit plus de moyens dans ses missions essentielles : Santé, Education, Sécurité, Justice et Défense.
Enfin, nous ne pouvons financer cela qu’en diminuant les dépenses. Face à l’impossibilité d’augmenter les impôts, taxes, cotisations ou l’endettement, nous devons enfin dégonfler intelligemment la sphère publique qui absorbe le pouvoir d’achat des Français et asphyxie nos entreprises, la France étant le pays champion du monde des prélèvements obligatoires et des dépenses publiques avec pourtant des services aux citoyens qui se dégradent jour après jour et une dette qui s’envole, 40 000€ par Français aujourd’hui. Il s’agit en cela d’économiser 10% de la dépense publique (150 Md€) en tapant « dans le gras », soit l’administration de bureaux qui a pris le pas sur l’administration de terrain. Pour ce faire, trois principes doivent être suivis :
- remettre l’État sur la stratégie (le pourquoi/quoi) et laisser aux forces vives dans les territoires (préfets, élus, entreprises, branches professionnelles) le soin de déterminer « comment » atteindre les objectifs nationaux déclinés localement ;
- mettre moins d’agents dans les bureaux et plus sur le terrain (« moins de gras, plus de muscles ») ;
- ne jamais séparer le décideur du payeur afin de responsabiliser les acteurs (les maires étant un bon exemple, ils n’ont plus la main, au mieux, que sur 40% de leurs ressources).
En conclusion, ce projet de refondation peut se résumer par la phrase suivante : « Dégonfler intelligemment la sphère publique pour augmenter le pouvoir d’achat des Français, donner de l’oxygène à nos PME dans les territoires et redonner la clé de leur municipalité à nos maires ! ». Il n’y a aucune fatalité au déclin. Le pire n’est jamais certain et le meilleur jamais acquis…
Vers un nouvel essor français, sous la direction de Patrice Huiban, 328 pages, VA Editions, juillet 2024.
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