Tous fous à lier… sauf le peuple!
Que de fous à lier, aux côtés de cette multitude qui probablement va demeurer indifférente à tous ces désistements contre-nature…
Mon titre n’est pas si provocateur que cela. Il me semble résumer le sentiment qu’on éprouve d’une apocalypse tellement évoquée et fantasmée qu’elle paraît désirée. Comme si la France, au niveau de ses élites de toutes sortes qui se sont accordées le droit, notamment à notre place, de penser, de parler, d’écrire, de choisir et d’exclure, avait besoin d’une effervescence délirante conjuguant des périls en chambre avec des résistances en toc. Quand je fais référence au peuple, je songe à tous les citoyens de droite, de gauche, d’extrême gauche et d’extrême droite qui se sont contentés de voter le 30 juin en attendant le 7 juillet, en prenant une parole dont ils ont fait l’usage que leur liberté et leurs convictions leur dictaient. Ce peuple divers, contrasté, riche de son pluralisme démocratique, est à respecter quelles qu’aient été ses choix et ses options. Pour lui, la République n’a pas été un mot creux à force d’être ressassé mais une pratique, une exigence. Mais que de fous à lier aux côtés de cette multitude qui probablement va demeurer heureusement indifférente aux injonctions politiques, sportives, artistiques, présidentielles, gouvernementales, universitaires, judiciaires, culturelles ou médiatiques ! À ces désistements autorisés mais contre-nature qui vont dénaturer les conséquences du premier tour et la rectitude démocratique du second.
Directeurs de conscience autoproclamés
Je découvre dans cette France qui prescrit comme si elle se croyait vraiment d’en haut davantage qu’un grain de folie mais des comportements et des positions tellement absurdes, des extravagances et des partialités assumées avec tant de bonne conscience qu’ils contraignent à réfléchir sur l’état mental de tous ces directeurs de conscience autoproclamés, de cette minorité prenant ses préjugés et ses opinions pour des vérités révélées.
La psychologie me semble être la clé essentielle, aujourd’hui, et depuis quelques années, pour comprendre la politique et le pouvoir. C’est un bonheur intellectuel pour moi qui ai toujours considéré que derrière l’apparence des conduites et des décisions rationnelles et objectives, il y avait l’humus des caractères et la subjectivité souvent débridée et perturbée des personnalités.
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On ne peut en douter quand on lit le remarquable numéro du Point consacré à « ce que les psys disent d’eux » et notamment à une analyse fouillée et pluraliste d’Emmanuel Macron et de son tempérament sous le titre de « Macron, président sans limites »[1]. Si la perception des psychologues et des psychiatres offre plusieurs pistes, elle révèle cependant, pour rester convenable, des anomalies, des déséquilibres et des blessures qui ne sont pas loin d’expliquer ses coups de dés erratiques et une étrange et solitaire manière de présider. Il est impossible d’appréhender Emmanuel Macron sans rechercher l’influence de ses obscurités et le poids de son histoire personnelle.
Tous ensemble, ouais !
Qui peut contester le fait qu’une approche similaire serait nécessaire pour Jean-Luc Mélenchon et que derrière la foudre et la violence de cette personnalité brillante et vindicative, se glisse un récit d’offenses intimes et de frustrations personnelles ?
La particularité du climat exacerbé et désordonné de ces dernières semaines est qu’il paraît avoir fait perdre leur boussole à des citoyens connus et médiatisés ainsi qu’à des institutions saisies par la débauche d’un engagement partisan. Les grandes écoles et les universités se dévergondent en appelant à voter contre le RN. Comme si c’était leur rôle. Des syndicats de professeurs tremblent et nous alertent sur un péril que nous ne serions pas assez adultes pour deviner tout seuls. Des footballeurs et des sportifs se piquent de monter au front contre le RN et ils ne se questionnent pas une seconde sur leur prétendue légitimité non pas à penser pour eux-mêmes mais à se croire suffisamment pertinents et lucides pour oser nous enjoindre de voter comme eux. Des rappeurs s’imaginent en pleine guerre d’Espagne et nous assènent un « No pasaran » grotesque, feignant de craindre un bouleversement révolutionnaire alors qu’il ne s’agira, dans tous les cas, que d’un changement inédit, peut-être radical mais démocratique. Les paroles de cet immonde morceau sont haineuses, insultantes, complotistes, sexistes et menacent de mort Jordan Bardella. Qu’on ne nous oppose pas qu’il s’agit de propos au figuré quand ils ne sont que trop plausibles dans la tête de ceux qui les crachent.
Des journalistes de 20 minutes – j’en suis resté stupéfié – ont exigé que cette publication cesse de traiter avec objectivité et impartialité le RN mais s’engage contre lui. Je ne parle pas des tribunes, des collectifs, des groupuscules, des cénacles inconnus mais ne gagnant pas à être connus, des associations et des clans militants se ruant dans l’espace médiatique pour exprimer – c’est original ! – leur hostilité à l’encontre du RN. Je n’aurai garde d’oublier les artistes qui ont toujours estimé qu’ils étaient programmés pour n’être pas seulement sur la scène ou sur les écrans mais dans nos têtes trop futiles pour comprendre.
À considérer l’ensemble de ces folies à lier – ces minorités sortant de leur rôle et nous dictant avec arrogance notre conduite civique -, on ne peut qu’être effrayé par une démocratie qui se délite et demeure pourtant, dans ses hautes sphères, fière d’elle. Des millions d’électeurs par ce matraquage hémiplégique sont rejetés dans les coulisses de la République. Tous ces citoyens auxquels j’ai rendu hommage vont voter le 7 juillet et je parie qu’ils feront comme bon leur semble et ce sera tant mieux. Pour la France.
[1] https://www.lepoint.fr/politique/emmanuel-macron-sur-le-divan-qu-en-disent-les-psys-et-ses-proches-27-06-2024-2564106_20.php
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