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Июнь
2024

Cet ambassadeur d'Enedis part à la retraite : "Le vrai sujet, c’est l’équilibre entre la conso et la production"

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De l’extérieur, le poste semble indéfinissable, alors on lui a demandé à quoi il passait ses journées : Alain Riehl est, depuis 2011, le directeur territorial d’Enedis dans le département.

« Je suis l’ambassadeur de l’entreprise, à la fois une porte d’entrée et de sortie », explique celui qui part à la retraite. Au contact des élus et de l’État, il s’assure que l’électricité arrive dans des bonnes conditions, là où elle doit être. Il ne la produit pas, il ne la vend pas : il l’achemine. « Je fais de la communication externe, avec les élus et l’administration, et on répond lorsqu’il y a un diagnostic de non-qualité sur le réseau. »

Enfant, il ne se prédisait pas un avenir dans la relation publique. « Je suis curieux de nature. J’ai grandi dans un poste téléphonique, donc autant vous dire que j’ai très vite tout démonté, pour comprendre. » Polytechnicien, il entre à Électricité de Strasbourg, travaille, déjà, « à maintenir la qualité des réseaux ».

Il se rapproche de la clientèle et des élus une première fois en Moselle, puis à la Réunion. Il est alors un commercial unique en son genre : sur l’île, l’électricité est vendue au même prix qu’en métropole, alors qu’elle coûte bien plus cher. Il faut alors convaincre les clients… de ne pas consommer, « d’avoir les bons réflexes, d’aérer plutôt que climatiser… »

On est au début des années 2000. Il passe ensuite quelques années loin du public, à Paris. Puis le Cantal se libère. « L’entreprise avait compris l’intérêt de communiquer avec les élus, au plus proche. Jusqu’ici, le Cantal était joint avec la Corrèze, et tout se passait à Tulle. Quand ils ont décidé que le Cantal devait avoir son responsable territorial, j’ai postulé. »

Par hasard

Il se rappelle l’édition de La Montagne, le 5 septembre 2011 : le photographe avait saisi le passage de cigognes. L’Alsacien y voit un signe, « je me suis dit que je m’y sentirais bien. Je ne connaissais rien du département, je connaissais Garabit mais je ne savais pas que c’était là, et le point bleu sur la carte météo, c’est tout. Mais je m’y suis senti très bien. D’ailleurs, j’y reste ! »

Dans le département, il a accompagné la séparation des réseaux et de la commercialisation. EDF est devenu Enedis, et les camions bleus ont déménagé du cours d’Angoulême à la Zac d’Esban. En 2022, Enedis revendiquait 115 salariés, plus de 9.600 interventions, 19 millions en investissement.

Surtout, en dix ans, l’énergie est devenue un enjeu, avec l’arrivée du renouvelable, des panneaux photovoltaïques jusque sur les toits des particuliers. Le technicien s’est fait pédagogue, lutte contre les idées reçues, rappelle que l’électricité est une onde.

En ambassadeur du réseau, il recentre le débat :

On se concentre sur la problématique de la production de l’électricité, mais ce n’est pas sujet. Le vrai sujet, c’est l’équilibre entre la consommation et la production.

Il rappelle le stockage n’en est qu’à ses balbutiements, que l’énergie produite doit correspondre à la consommation instantanée. Il note que les énergies renouvelables peinent à assurer une réelle fiabilité de la production, voit mal comment elles pourraient assurer toute la production énergétique du pays à l’avenir. En clair : il refuse d’abaisser la discussion technique au débat politique.

Pédagogue

Même chose sur Linky. Inlassablement, il a réexpliqué aux « antis », rappelé que le compteur n’est qu’un « boîtier communiquant, faisant un relevé toutes les dix minutes. » Le débat s’est parfois tendu, même si, dans le département, « on a une notoriété forte, une confiance. Le discours est mieux perçu par les opposants. Sur Linky, le problème n’est pas technique. La critique est sociale. Nous, on essaye de rassurer, mais nous ne sommes pas sociologues. »

Alors, il explique, reprend, tente d’écarter l’ignorance. À la rédaction de La Montagne, pas besoin d’avoir interviewé Alain Riehl pour le connaître. Une fois de temps en temps, souvent pour les sujets concernant Enedis ou l’électricité en général, mais pas toujours, il appelle pour faire une remarque, corriger une imprécision.

Il s’en amuse. « Je repère les erreurs, mais je passe pour un enquiquineur ! » Au point de vexer… la communication d’Enedis, forcée de reprendre les plaquettes de présentation pour avoir écrit que le réseau était en 220 volts alors qu’il est « en 230 depuis 1987 ! »

Il ne compte pas s’arrêter à la retraite. Il a prévu de rester dans le Cantal, de participer à des conférences, des débats, « d’essayer d’aider à rendre les gens meilleurs. » Sa dernière hantise : que l’on se trompe dans son nom, en mettant le « h » derrière le « l », comme Reilhac. On ne se trompera pas. Dans le Cantal, Alain Riehl s’est fait un nom.

Pierre Chambaud