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World News
Май
2024

La pilule contraceptive prise pour cible par des influenceurs américains

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Cette explosion de la désinformation sur la pilule via TikTok et Instagram survient au moment où les questions d'avortement et de contraception sont au coeur de la campagne présidentielle opposant le démocrate Joe Biden au républicain Donald Trump.

Ce dernier se targue d'avoir, lorsqu'il était président, été l'architecte des nombreuses restrictions voire interdictions du droit à l'avortement à travers les Etats-Unis.

Taylor Gossett compte près de 200.000 abonnés sur TikTok. Qualifiant la pilule de "toxique", elle propose un cours sur le contrôle "naturel" des naissances. Sur la même plateforme, la très conservatrice Candace Owens suggère, sans avancer de preuve, que ce médicament serait à l'origine des problèmes d'infertilité. Quant au "coach" Naftali Moses, il affirme à ses 280.000 abonnés que la pilule "change votre comportement sexuel".

Dans une vidéo visionnée plus de 550.000 fois, la podcasteuse Sahara Rose va jusqu'à dénoncer une "pilule du divorce" qui conduirait celles qui la prennent à jeter leur dévolu sur le mauvais partenaire.

Les impacts de la pilule sur les femmes font l'objet de débat depuis des décennies, certaines se plaignant notamment d'une baisse de leur libido ou d'une prise de poids.

Si certaines femmes ressentent des effets secondaires, les experts de la santé estiment que ces vécus individuels ne reflètent pas un véritable lien de causalité.

Selon eux, il n'existe pas non plus de preuve d'effets généralisés de la pilule sur la fertilité ou le comportement sexuel.
"Besoin de conseils"
Mais la nouvelle campagne de désinformation pourrait "dissuader" les gens de l'utiliser, prévient Michael Belmonte, membre de l'ACOG, l'une des principales associations des gynécologues obstétriciens américains.

Et "le plus inquiétant dans le paysage politique actuel des Etats-Unis" est que ces mêmes femmes "pourraient ne pas avoir accès à l'avortement", souligne-t-il à l'AFP.

Le médecin dit avoir lui même reçu des patientes tombées enceintes après avoir cessé leur moyen de contraception en raison de cette "désinformation nuisible".

Depuis que la Cour suprême, alors largement remaniée par Donald Trump, a annulé en 2022 la garantie fédérale du droit à l'avortement, une vingtaine d'Etats américains l'ont interdit ou sévèrement restreint.

Jenna Sherman, chercheuse en désinformation, voit "une corrélation entre ce pic de désinformation sur la contraception et la restriction de l'accès à l'avortement".

"Les gens ont davantage besoin de conseils pour prendre leurs décisions en matière de santé reproductive et ont de plus en plus peur de s'adresser à un professionnel", dit-elle à l'AFP.

Certains influenceurs recommandent par exemple de suivre le cycle menstruel et la température corporelle pour programmer les rapports sexuels en dehors des fenêtres de fertilité.

Mais les experts affirment que ces méthodes sont beaucoup moins efficaces que la contraception médicale, avec un taux d'échec jusqu'à 23%, entraînant des grossesses non désirées.
"Honte et stigmatisation"
D'autres conseillent d'abandonner la contraception pour perdre du poids, souvent à l'aide de vidéos spectaculaires montrant un "avant et après". Là encore, sans preuve scientifique.

Mais ces fausses informations peuvent avoir un impact psychologique: "il est probable que cela contribue à accroître la honte, la stigmatisation et la distorsion de l'image du corps", fait valoir Jenna Sherman.

La pilule contraceptive est considérée comme sûre et efficace par les experts de la santé, mais comme beaucoup d'autres médicaments, elle peut avoir des effets indésirables: nausées, maux de tête, saignements entre les règles.

Dans de rares cas, elles peuvent également entraîner la formation de caillots sanguins et des accidents vasculaires cérébraux.

Selon l'agence américaine des médicaments (FDA), le risque de caillots peut toucher trois à neuf femmes prenant la pilule sur 10.000.

"Les gens ne réalisent pas que nombre de ces influenceurs ont leurs propres motivations financières pour diffuser des informations fausses ou trompeuses qui ne donnent pas la priorité à la santé des personnes qu'ils ciblent", observe Jenna Sherman.

burs-ac/nro/aem