Pourquoi le directeur de l'hôpital d'Aubusson parle de "rupture de confiance" et décide de quitter son poste ?
Il y a un mois à peine, le directeur du Centre hospitalier d’Aubusson annonçait officiellement le lancement d’un chantier attendu depuis des lustres : la restructuration de l’hôpital sur le site du Mont, un temps menacée par le déficit de l’Ehpad du Chabanou à La Courtine, doit en effet débuter en 2026. Une nouvelle qui avait de quoi réjouir tout ce bassin du sud creusois, quand bien même la question du devenir du Chabanou restait toujours en suspens.Las. En ce début de semaine, Yoann Campocasso a fait part de sa volonté de quitter la direction de l’établissement. Dans un long courrier de huit pages adressé à la présidente du Département – que La Montagne s’est procuré –, le directeur argue « prendre acte d’une rupture de confiance manifeste ». Ce qui aurait mis le feu aux poudres ? Une lettre, dont il a eu copie, de Valérie Simonet envoyée le 18 avril au directeur général de l’ARS.
La présidente du Département veut « clarifier le déficit »Dans celle-ci, la présidente du Conseil départemental fait « suite à la restitution de l’audit portant sur les trois Ehpad gérés par le Centre hospitalier d’Aubusson » et exprime ses « inquiétudes dans la mesure où il est désormais clairement établi que la situation de ces établissements laisse apparaître : une défaillance de gestion et des clés de répartition et des affectations de charges peu claires, ne permettant pas de déterminer la situation exacte de chacun des trois établissements ».
Quel est ce chantier à 47 millions d'euros qui va enfin être lancé dans le sud de la Creuse ?
La présidente estime, en outre, qu’il serait intéressant « de poursuivre le travail engagé par le cabinet SPQR (qui a réalisé cet audit, N.D.L.R.) pour revoir les clés de répartition afin de clarifier la répartition du déficit entre les trois établissements et le Centre hospitalier et d’envisager des pistes pour une meilleure gestion ».Contactée, Valérie Simonet nous explique s’interroger notamment sur la situation particulière d’un des trois Ehpad (celui du Mont, N.D.L.R.) « qui a un taux de remplissage inférieur à celui de La Courtine et qui dégage des excédents. Cela nous pose question et il faudrait regarder ce qu’il s’est passé ces dix dernières années ». Et de citer l’audit qui souligne « la présence d’un résultat systématiquement excédentaire, malgré un taux d’occupation très faible et une baisse du personnel dérisoire dans un contexte de hausse limitée du tarif [invitant] à se questionner sur sa sincérité ».
"Il y a un certain nombre d’éléments factuels qui nous interrogent. Partant de cela et n’ayant pas d’autorité sur le directeur, je m’adresse au directeur de l’ARS pour lui demander quelles suites il souhaite donner à ces éléments caractérisant une défaillance de gestion des trois Ehpad, afin que l’on puisse aussi travailler plus sereinement à l’avenir de celui de La Courtine. Là, on a l’impression qu’on a mis l’audit dans un tiroir et qu’on ne va pas donner suite."
De son côté, le directeur de l’hôpital ne « souhaite pas s’exprimer publiquement » sur sa décision.
Le directeur en « tire toute conséquence utile »Mais dans sa lettre à Valérie Simonet, il explique : « Il est, bien entendu, de votre plein droit et de votre devoir de contrôler la bonne gestion des établissements. Dans ce cadre, vous soulignez la défaillance de gestion de ce CH, je me dois donc d’en tirer toute conséquence utile. Ainsi, de par la rupture manifeste de confiance sur la gestion du CH et de par la dissonance entre mes valeurs professionnelles et les méthodes employées, je tire la conclusion que je ne peux continuer à l’avenir à exercer la fonction de directeur. Mon souhait a toujours été de défendre l’intérêt des patients, des résidents et des agents. En outre, je ne souhaite pas continuer à mettre en jeu ma responsabilité pénale en l’absence d’horizon de résolution ». La date de départ du directeur n’est pas connue, il faudra attendre les parutions au Journal officiel.
« Moi, je n’ai pas demandé un retour sur la gestion de Monsieur Campocasso mais sur la gestion des trois Ehpad, reprend la présidente du Département. La situation du Centre hospitalier ne me regarde pas. Sa réponse, je peux l’entendre mais je pense qu’il ne l’adresse pas à la bonne personne. Il devrait l’adresser au directeur de l’ARS. »
Séverine Perrier